Rapport du Congrès de Rome







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sic).

Telle est l’une des arches où l’auteur fait passer la route qui conduit du signal au symbole. On y circule à double voie, et le sens du retour n’y montre pas de moindres ouvrages d’art.

Car si chez l’homme vous associez à la projection d’une vive lumière devant ses yeux le bruit d’une sonnette, puis le maniement de celle-ci à l’émission de l’ordre : contractez (en anglais : contract), vous arriverez à ce que le sujet, à moduler cet ordre lui-même, à le murmurer, bientôt seulement à le produire en sa pensée, obtienne la contraction de sa pupille, soit une réaction du système que l’on dit autonome, parce qu’ordinairement inaccessible aux effets intentionnels. Ainsi M. Hudgins, s’il faut en croire notre auteur, « a-t-il créé chez un groupe de sujets, une configuration hautement individualisée de réactions affines et viscérales du symbole idéique (idea-symbol) « contract », – une réponse qui pourrait être ramenée à travers leurs expériences particulières à une source en apparence lointaine, mais en réalité basiquement physiologique : dans cet exemple, simplement la protection de la rétine contre une lumière excessive ». Et l’auteur conclut : « La signification de telles expériences pour la recherche psychosomatique et linguistique n’a même pas besoin de plus d’élaboration ».

Nous aurions pourtant, quant à nous, été curieux d’apprendre si les sujets ainsi éduqués réagissent aussi à l’énonciation du même vocable articulée dans les locutions : marriage (119)contract, bridge-contract, breach of contract, voire progressivement réduite à l’émission de sa première syllabe : contract, contrac, contra, contr… La contre-épreuve, exigible en stricte méthode, s’offrant ici d’elle-même du murmure entre les dents de cette syllabe par le lecteur français qui n’aurait subi d’autre conditionnement que la vive lumière projetée sur le problème par M. Jules H. Massermann. Nous demanderions alors à celui-ci si les effets ainsi observés chez les sujets conditionnés lui paraîtraient toujours pouvoir se passer aussi aisément d’être élaborés. Car ou bien ils ne se produiraient plus, manifestant ainsi qu’ils ne dépendent pas même conditionnellement du sémantème, ou bien ils continueraient à se produire, posant la question des limites de celui-ci.

Autrement dit, ils feraient apparaître dans l’instrument même du mot, la distinction du signifiant et du signifié, si allègrement confondue par l’auteur dans le terme idea-symbol. Et sans avoir besoin d’interroger les réactions des sujets conditionnés à l’ordre don’t contract, voire à la conjugaison entière du verbe to contract, nous pourrions faire observer à l’auteur que ce qui définit comme appartenant au langage un élément quelconque d’une langue, c’est qu’il se distingue comme tel pour tous les usagers de cette langue dans l’ensemble supposé constitué des éléments homologues.

Il en résulte que les effets particuliers de cet élément du langage sont liés à l’existence de cet ensemble, antérieurement à sa liaison possible à toute expérience particulière du sujet. Et que considérer cette dernière liaison hors de toute référence à la première, consiste simplement à nier dans cet élément la fonction propre du langage.

Rappel de principes qui éviterait peut-être à notre auteur de découvrir avec une naïveté sans égale la correspondance textuelle des catégories de la grammaire de son enfance dans les relations de la réalité.

Ce monument de naïveté, au reste d’une espèce assez commune en ces matières, ne mériterait pas tant de soins s’il n’était le fait d’un psychanalyste, ou plutôt de quelqu’un qui y raccorde comme par hasard tout ce qui se produit dans une certaine tendance de la psychanalyse, au titre de théorie de l’ego ou de technique d’analyse des défenses, de plus opposé à l’expérience freudienne, manifestant ainsi à contrario la (120)cohérence d’une saine conception du langage avec le maintien de celle-ci. Car la découverte de Freud est celle du champ des incidences, en la nature de l’homme, de ses relations à l’ordre symbolique, et la remontée de leur sens jusqu’aux instances les plus radicales de la symbolisation dans l’être. Le méconnaître est condamner la découverte à l’oubli, l’expérience à la ruine.

Et nous posons comme une affirmation qui ne saurait être retranchée du sérieux de notre propos actuel que la présence du raton laveur, plus haut évoqué, dans le fauteuil où la timidité de Freud, à en croire notre auteur, aurait confiné l’analyste en le plaçant derrière le divan, nous paraît être préférable à celle du savant qui tient sur le langage et la parole un pareil discours.

Car le raton laveur au moins, par la grâce de Jacques Prévert (« une pierre, deux maisons, trois ruines, quatre fossoyeurs, un jardin, des fleurs, un raton laveur ») est entré à jamais dans le bestiaire poétique et participe comme tel en son essence à la fonction éminente du symbole, mais l’être à notre ressemblance qui professe ainsi la méconnaissance systématique de cette fonction, se bannit à jamais de tout ce qui peut par elle être appelé à l’existence. Dès lors, la question de la place qui revient au dit semblable dans la classification naturelle nous paraîtrait ne relever que d’un humanisme hors de propos, si son discours, en se croisant avec une technique de la parole dont nous avons la garde, ne devait être trop fécond, même à y engendrer des monstres stériles. Qu’on sache donc, puisqu’aussi bien il se fait mérite de braver le reproche d’anthropomorphisme, que c’est le dernier terme dont nous userions pour dire qu’il fait de son être la mesure de toutes choses.

Revenons à notre objet symbolique qui est lui-même fort consistant dans sa matière, s’il a perdu le poids de son usage, mais dont le sens impondérable entraînera des déplacements de quelque poids. Est-ce donc là la loi et le langage ? Peut-être pas encore.

Car même apparût-il chez l’hirondelle quelque caïd de la colonie qui, en gobant le poisson symbolique au bec béant des autres hirondelles, inaugurât cette exploitation de l’hirondelle par l’hirondelle dont nous nous plûmes un jour à filer (121)la fantaisie, ceci ne suffirait point à reproduire parmi elles cette fabuleuse histoire, image de la nôtre, dont l’épopée ailée nous tint captifs en l’île des pingouins, et il s’en faudrait de quelque chose pour faire un univers « hirundinisé ».

Ce « quelque chose » achève le symbole pour en faire le langage. Pour que l’objet symbolique libéré de son usage devienne le mot libéré de l’hic et nunc, la différence n’est pas de la qualité, sonore, de sa matière, mais de son être évanouissant où le symbole trouve la permanence du concept.

Par le mot qui est déjà une présence faite d’absence, l’absence même vient à se nommer en un moment original dont le génie de Freud a saisi dans le jeu de l’enfant la recréation perpétuelle. Et de ce couple modulé de la présence et de l’absence, qu’aussi bien suffit à constituer la trace sur le sable du trait simple et du trait rompu des koua mantiques de la Chine, naît l’univers de sens d’une langue où l’univers des choses viendra à se ranger.

Par ce qui ne prend corps que d’être la trace d’un néant et dont le support dès lors ne peut s’altérer, le concept, sauvant la durée de ce qui passe, engendre la chose.

Car ce n’est pas encore assez dire que de dire que le concept est la chose même, ce qu’un enfant peut démontrer contre l’école. C’est le monde des mots qui crée le monde des choses, d’abord confondues dans l’hic et nunc du tout en devenir, en donnant son être concret à leur essence, et sa place partout à ce qui est de toujours : .

L’homme parle donc, mais c’est parce que le symbole l’a fait homme. Si en effet des dons surabondants accueillent l’étranger qui s’est fait connaître, la vie des groupes naturels qui constituent la communauté est soumise aux règles de l’alliance, ordonnant le sens dans lequel s’opère l’échange des femmes, et aux prestations réciproques que l’alliance détermine : comme le dit le proverbe Sironga, un parent par alliance est une cuisse d’éléphant. À l’alliance préside un ordre préférentiel dont la loi impliquant les noms de parenté est pour le groupe, comme le langage, impérative en ses formes, mais inconsciente en sa structure. Or dans cette structure dont l’harmonie ou les impasses règlent l’échange restreint ou généralisé qu’y discerne l’ethnologue, le théoricien étonné retrouve toute la logique des combinaisons : ainsi les lois du (122)nombre, c’est-à-dire du symbole le plus épuré, s’avèrent être immanentes au symbolisme originel. Du moins est-ce la richesse des formes où se développent les structures qu’on dit élémentaires de la parenté, qui les y rend lisibles. Et ceci donne à penser que c’est peut-être seulement notre inconscience de leur permanence, qui nous laisse croire à la liberté des choix dans les structures dites complexes de l’alliance sous la loi desquelles nous vivons. Si la statistique déjà laisse entrevoir que cette liberté ne s’exerce pas au hasard, c’est qu’une logique subjective l’orienterait en ses effets.

C’est bien en quoi le complexe d’Œdipe en tant que nous le reconnaissons toujours pour couvrir de sa signification le champ entier de notre expérience, sera dit, dans notre propos, marquer les limites que notre discipline assigne à la subjectivité : à savoir, ce que le sujet peut connaître de sa participation inconsciente au mouvement des structures complexes de l’alliance, en vérifiant les effets symboliques en son existence particulière du mouvement tangentiel vers l’inceste qui se manifeste depuis l’avènement d’une communauté universelle.

La Loi primordiale est donc celle qui en réglant l’alliance superpose le règne de la culture au règne de la nature livré à la loi de l’accouplement. L’interdit de l’inceste n’en est que le pivot subjectif, dénudé par la tendance moderne à réduire à la mère et à la sœur les objets interdits aux choix du sujet, toute licence au reste n’étant pas encore ouverte au delà.

Cette loi se fait donc suffisamment connaître comme identique à un ordre de langage. Car nul pouvoir sans les nominations de la parenté n’est à portée d’instituer l’ordre des préférences et des tabous qui nouent et tressent à travers les générations le fil des lignées. Et c’est bien la confusion des générations qui, dans la Bible comme dans toutes les lois traditionnelles, est maudite comme l’abomination du verbe et la désolation du pécheur.

Nous savons en effet quel ravage déjà allant jusqu’à la dissociation de la personnalité du sujet peut exercer une filiation falsifiée, quand la contrainte de l’entourage s’emploie à en soutenir le mensonge. Ils peuvent n’être pas moindres quand un homme épousant la mère de la femme dont il a eu un fils, celui-ci aura pour frère un enfant frère de sa mère. Mais s’il est ensuite, – et le cas n’est pas inventé –, adopté (123)par le ménage compatissant d’une fille d’un mariage antérieur du père, il se trouvera encore une fois demi-frère de sa nouvelle mère, et l’on peut imaginer les sentiments complexes dans lesquels il attendra la naissance d’un enfant qui sera à la fois son frère et son neveu, dans cette situation répétée.

Aussi bien le simple décalage dans les générations qui se produit par un enfant tardif né d’un second mariage et dont la mère jeune se trouve contemporaine d’un frère aîné, peut produire des effets qui s’en rapprochent, et l’on sait que c’était là le cas de Freud.

Cette même fonction de l’identification symbolique par où le primitif se croit réincarner l’ancêtre homonyme et qui détermine même chez l’homme moderne une récurrence alternée des caractères, introduit donc chez les sujets soumis à ces discordances de la relation paternelle une dissociation de l’Œdipe où il faut voir le ressort constant de ses effets pathogènes. Même en effet représentée par une seule personne, la fonction paternelle concentre en elle des relations imaginaires et réelles, toujours plus ou moins inadéquates à la relation symbolique qui la constitue essentiellement.

C’est dans le nom du père qu’il nous faut reconnaître le support de la fonction symbolique qui, depuis l’orée des temps historiques, identifie sa personne à la figure de la loi. Cette conception nous permet de distinguer clairement dans l’analyse d’un cas les effets inconscients de cette fonction d’avec les relations narcissiques, voire d’avec les relations réelles que le sujet soutient avec l’image et l’action de la personne qui l’incarne, et il en résulte un mode de compréhension qui va à retentir dans la conduite même des interventions. La pratique nous en a confirmé la fécondité, à nous, comme aux élèves que nous avons induits à cette méthode. Et nous avons eu souvent l’occasion dans des contrôles ou dans des cas communiqués de souligner les confusions nuisibles qu’engendre sa méconnaissance.

Ainsi c’est la vertu du verbe qui perpétue le mouvement de la Grande Dette dont Rabelais, en une métaphore célèbre, élargit jusqu’aux astres l’économie. Et nous ne serons pas surpris que le chapitre où il nous présente avec l’inversion macaronique des noms de parenté une anticipation des découvertes ethnographiques, nous montre en lui la substantifique (124)divination du mystère humain que nous tentons d’élucider ici.

Identifiée au hau sacré ou au mana omniprésent, la Dette inviolable est la garantie que le voyage où sont poussés femmes et biens ramène en un cycle sans manquement à leur point de départ d’autres femmes et d’autres biens, porteurs d’une entité identique : symbole zéro, dit Lévi-Strauss, réduisant à la forme d’un signe algébrique le pouvoir de la Parole.

Les symboles enveloppent en effet la vie de l’homme d’un réseau si total qu’ils conjoignent avant qu’il vienne au monde ceux qui vont l’engendrer « par l’os et par la chair », qu’ils apportent à sa naissance avec les dons des astres, sinon avec les dons des fées, le dessin de sa destinée, qu’ils donnent les mots qui le feront fidèle ou renégat, la loi des actes qui le suivront jusque-là même où il n’est pas encore et au delà de sa mort même, et que par eux sa fin trouve son sens dans le jugement dernier où le verbe absout son être ou le condamne, – sauf à atteindre à la réalisation subjective de l’être-pour-la-mort.

Servitude et grandeur où s’anéantirait le vivant, si le désir ne préservait sa part dans les interférences et les battements que font converger sur lui les cycles du langage, quand la confusion des langues s’en mêle et que les ordres se contrarient dans les déchirements de l’œuvre universelle.

Mais ce désir lui-même, pour être satisfait dans l’homme, exige d’être reconnu, par l’accord de la parole ou par la lutte de prestige, dans le symbole ou dans l’imaginaire.

L’enjeu d’une psychanalyse est l’avènement dans le sujet du peu de réalité que ce désir y soutient au regard des conflits symboliques et des fixations imaginaires comme moyen de leur accord, et notre voie est l’expérience intersubjective où ce désir se fait reconnaître.

Dès lors on voit que le problème est celui des rapports dans le sujet de la parole et du langage.

Trois paradoxes dans ces rapports se présentent dans notre domaine.

Dans la folie, quelle qu’en soit la nature, il nous faut reconnaître, d’une part, la liberté négative d’une parole qui a renoncé à se faire reconnaître, soit ce que nous appelons obstacle au transfert, et, d’autre part, la formation singulière d’un délire qui, – fabulatoire, fantastique ou cosmologique –, (125)interprétatif, revendicateur ou idéaliste –, objective le sujet dans un langage sans dialectique14.

L’absence de la parole s’y manifeste par les stéréotypies d’un discours où le sujet, peut-on dire, est parlé plutôt qu’il ne parle : nous y reconnaissons les symboles de l’inconscient sous des formes pétrifiées qui, à côté des formes embaumées où se présentent les mythes en nos recueils, trouvent leur place dans une histoire naturelle de ces symboles. Mais c’est une erreur de dire que le sujet les assume : la résistance à leur reconnaissance n’étant pas moindre que dans les névroses, quand le sujet y est induit par une tentative de cure.

Notons au passage qu’il vaudrait de repérer dans l’espace social les places que la culture a assignées à ces sujets, spécialement quant à leur affectation à des services sociaux afférents au langage, car il n’est pas invraisemblable que s’y démontre un des facteurs qui désignent ces sujets aux effets de rupture produite par les discordances symboliques, caractéristiques des structures complexes de la civilisation.

Le second cas est représenté par le champ privilégié de la découverte psychanalytique : à savoir les symptômes, l’inhibition et l’angoisse, dans l’économie constituante des différentes névroses.

La parole est ici chassée du discours concret qui ordonne la conscience, mais elle trouve son support ou bien dans les fonctions naturelles du sujet, pour peu qu’une épine organique y amorce cette béance de son être individuel à son essence, qui fait de la maladie l’introduction du vivant à l’existence du sujet15, – ou bien dans les images qui organisent à la limite de l’
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