Rapport du Congrès de Rome







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in Paris en l’an 2000).
Nam Sibyllam quidem Cumis

ego ipse oculis meis vidi in

ampulla pendere, et cum illi

pueri dicerent : 

 respondebat illa :



(Satyricon, xlviii).
Ramener l’expérience psychanalytique à la parole et au langage comme à ses fondements, ne saurait aller sans retentir sur sa technique. À en restaurer les principes dans leur fondement, le chemin parcouru se découvre et le sens unique où l’interprétation analytique s’est déplacée pour s’en éloigner toujours plus. On est dès lors fondé à soupçonner que cette évolution de la pratique motive les nouveaux buts dont la théorie se pare.

À y regarder de plus près, les problèmes de l’interprétation symbolique ont commencé par intimider notre petit monde avant d’y devenir embarrassants. Les succès obtenus par Freud y étonnent maintenant par le sans-gêne de l’endoctrination dont ils paraissent procéder, et l’étalage qui s’en remarque dans les cas de Dora, de l’homme aux rats et de l’homme aux loups, ne va pas pour nous sans scandale. Il est vrai que nos habiles (135)ne reculent pas à mettre en doute que ce fût là une bonne technique.

Cette désaffection relève en vérité, dans le mouvement psychanalytique, d’une confusion des langues dont, dans un propos familier d’une époque récente, la personnalité la plus représentative de son actuelle hiérarchie ne faisait pas mystère avec nous.

Il est assez remarquable que cette confusion s’accroisse avec la prétention où chacun se croit délégué de découvrir dans notre expérience les conditions d’une objectivation achevée, et avec la ferveur qui semble accueillir ces essais théoriques à mesure même qu’ils s’avèrent plus déréels.

Il est certain que les principes, tout bien fondés qu’ils soient, de l’analyse des résistances, ont été dans la pratique l’occasion d’une méconnaissance toujours plus grande du sujet, faute d’être compris dans leur relation à l’intersubjectivité de la parole.

À suivre, en effet, le procès des sept premières séances qui nous sont intégralement rapportées du cas de l’homme aux rats, il paraît peu probable que Freud n’ait pas reconnu les résistances en leur lieu, soit là même où nos modernes techniciens nous font leçon qu’il en ait laissé passer l’occurrence, puisque c’est son texte même qui leur permet de les pointer, – manifestant une fois de plus cette exhaustion du sujet qui, dans les textes freudiens, nous émerveille sans qu’aucune interprétation en ait encore épuisé les ressources.

Nous voulons dire qu’il ne s’est pas seulement laissé prendre à encourager son sujet à passer outre à ses premières réticences, mais qu’il a parfaitement compris la portée séductrice de ce jeu dans l’imaginaire. Il suffit pour s’en convaincre de se reporter à la description qu’il nous donne de l’expression de son patient pendant le pénible récit du supplice imaginaire qui constitue le thème de son obsession, celui du rat forcé dans l’anus du supplicié : « Son visage, nous dit-il, reflétait l’horreur d’une jouissance ignorée ». La signification actuelle de la répétition de ce récit ne lui a donc pas échappé, non plus que l’identification du psychanalyste au « capitaine cruel » qui a fait entrer de force ce récit dans la mémoire du sujet, et non plus donc la portée des éclaircissements théoriques dont le sujet requiert le gage pour poursuivre son discours.

(136)Loin pourtant d’interpréter ici la résistance, Freud nous étonne en accédant à sa requête, et si loin qu’il paraît entrer dans le jeu du sujet.

Mais le caractère extrêmement approximatif, au point de nous paraître vulgaire, des explications dont il le gratifie, nous instruit suffisamment : il ne s’agit point tant ici de doctrine, ni même d’endoctrination, que d’un don symbolique de la parole, gros d’un pacte secret, dans le contexte de la participation imaginaire qui l’inclut, et dont la portée se révélera plus tard à l’équivalence symbolique que le sujet institue dans sa pensée des rats et des florins dont il rétribue l’analyste.

Nous voyons donc que Freud loin de méconnaître la résistance, en use comme d’une disposition propice à la mise en branle des résonances de la parole, et il se conforme, autant qu’il se peut, à la définition première qu’il a donnée de la résistance, en s’en servant pour impliquer le sujet dans son message. Aussi bien rompra-t-il brusquement les chiens, dès qu’il verra qu’à être ménagée, la résistance tourne à maintenir le dialogue au niveau d’une conversation où le sujet dès lors perpétuerait sa séduction avec sa dérobade.

Mais nous apprenons que l’analyse consiste à jouer sur les multiples portées de la partition que la parole constitue dans les registres du langage : dont relève la surdétermination de l’ordre qu’intéresse l’analyse.

Et nous tenons du même coup le ressort du succès de Freud. Pour que le message de l’analyste réponde à l’interrogation profonde du sujet, il faut en effet que le sujet l’entende comme la réponse qui lui est particulière, et le privilège qu’avaient les patients de Freud d’en recevoir la bonne parole de la bouche même de celui qui en était l’annonciateur, satisfaisait en eux cette exigence.

Notons au passage qu’ici le sujet en avait eu un avant-goût à entrouvrir la « psychopathologie de la vie quotidienne », ouvrage alors dans la fraîcheur de sa parution.

Ce n’est pas dire que ce livre soit beaucoup plus connu maintenant même des analystes, mais la vulgarisation des notions freudiennes dans la conscience commune, leur rentrée dans ce que nous appelons le mur du langage, amortirait l’effet de notre parole, si nous lui donnions le style des propos tenus par Freud à l’homme aux rats.

(137)Mais il n’est pas question ici de l’imiter. Pour retrouver l’effet de la parole de Freud, ce n’est pas à ses termes que nous recourront, mais aux principes qui la gouvernent.

Ces principes ne sont rien d’autre que la dialectique de la conscience de soi, telle qu’elle se réalise de Socrate à Hegel, à partir de la supposition ironique que tout ce qui est rationnel est réel pour se précipiter dans le jugement scientifique que tout ce qui est réel est rationnel. Mais la découverte freudienne a été de démontrer que ce procès vérifiant n’atteint authentiquement le sujet que décentré de la conscience de soi, dans l’axe de laquelle la maintenait la reconstruction hégélienne de la phénoménologie de l’esprit : c’est dire qu’elle rend encore plus caduque toute attribution d’efficacité à la « prise de conscience » qui, de se réduire à l’objectivation d’un phénomène psychologique, fait déchoir la Selbstbewusstsein de son sens universel, et du même coup de sa particularité en la réduisant à sa forme générale.

Ces remarques définissent les limites dans lesquelles il est impossible à notre technique de méconnaître les moments structurants de la phénoménologie hégélienne : au premier chef la dialectique du Maître et de l’Esclave, ou celle de la belle âme et de la loi du cœur, et généralement tout ce qui nous permet de comprendre comment la constitution de l’objet se subordonne à la réalisation du sujet.

Mais s’il restait quelque chose d’inaccompli dans la reconnaissance, où se mesure le génie de Hegel, de l’identité foncière du particulier et de l’universel, c’est bien la psychanalyse qui lui apporte son fondement concret chaque fois qu’elle ouvre la voie à travers ses obstacles vers le point où ils se confondent pour un sujet dès aujourd’hui. Et si dans cette voie rien de proprement individuel et du même coup de collectif ne peut apparaître qui ne soit de l’ordre du mirage, c’est ce qui ne peut plus être oublié, grâce à elle, sinon par les psychanalystes eux-mêmes qui dans les prétendues « nouvelles tendances » de leur technique forgent une discipline renégate à son inspiration.

Que si Hegel seul peut nous permettre d’assumer authentiquement la position de notre neutralité, ce n’est pas que nous n’ayons rien à apprendre de la maïeutique de Socrate, ni même de l’usage technique où Platon nous la présente, ne serait-ce que pour situer par rapport à l’idée ce que nous mettons en (138)œuvre dans le sujet, et qui en est aussi distinct et distant que la répétition analysée par Kierkegaard l’est de la réminiscence supposée par Platon.

Mais il est aussi une différence historique qu’il n’est pas vain de mesurer de l’interlocuteur de Socrate au nôtre. Quand Socrate prend appui sur une raison artisane qu’il peut extraire aussi bien du discours de l’esclave, c’est pour faire accéder des maîtres authentiques à la nécessité d’un ordre qui fasse justice de leur puissance et vérité des maîtres-mots de la cité. Mais nous avons affaire à des esclaves qui se croient être des maîtres et qui trouvent dans un langage de mission universelle le soutien de leur servitude avec les liens de son ambiguïté. Si bien qu’on pourrait dire avec humour que notre but est de restituer en eux la liberté souveraine dont fait preuve Humpty Dumpty quand il rappelle à Alice qu’après tout il est le maître du signifiant, s’il ne l’est pas du signifié où son être a pris sa forme.

Nous retrouvons donc toujours notre double référence à la parole et au langage. Pour libérer la parole du sujet, nous l’introduisons au langage de son désir, c’est à dire au langage premier dans lequel, au delà de ce qu’il nous dit de lui, déjà il nous parle à son insu, et dans les symboles du symptôme tout d’abord.

C’est bien d’un langage qu’il s’agit, en effet, dans le symbolisme mis au jour dans l’analyse. Ce langage, répondant au vœu ludique qu’on peut trouver dans un aphorisme de Lichtenberg, a le caractère universel d’une langue qui se ferait entendre dans toutes les autres langues, mais en même temps, pour être le langage qui saisit le désir au point même où il s’humanise en se faisant reconnaître, il est absolument particulier au sujet.

Langage premier, disons-nous aussi, en quoi nous ne voulons pas dire langue primitive, puisque Freud, qu’on peut comparer à Champollion pour le mérite d’en avoir fait la totale découverte, l’a déchiffré tout entier dans les rêves de nos contemporains. Aussi bien le champ essentiel en est-il défini avec quelque autorité par l’un des préparateurs associés le plus tôt à ce travail, et l’un des rares qui y ait apporté du neuf, j’ai nommé Ernest Jones, le dernier survivant de ceux à qui furent donnés les sept anneaux du maître et qui atteste par sa présence aux postes d’honneur d’une association internationale qu’ils (139)ne sont pas seulement réservés aux porteurs de reliques.

Dans un article fondamental sur le symbolisme, le Dr Jones, vers la page 15, fait cette remarque que, bien qu’il y ait des milliers de symboles au sens où l’entend l’analyse, tous se rapportent au corps propre, aux relations de parenté, à la naissance, à la vie et à la mort.

Cette vérité, ici reconnue de fait, nous permet de comprendre que, bien que le symbole psychanalytiquement parlant soit refoulé dans l’inconscient, il ne porte en lui-même nul indice de régression, voire d’immaturation. Il suffit donc, pour qu’il porte ses effets dans le sujet, qu’il se fasse entendre, car ces effets s’opèrent à son insu, comme nous l’admettons dans notre expérience quotidienne, en expliquant maintes réactions des sujets normaux autant que névrosés, par leur réponse au sens symbolique d’un acte, d’une relation ou d’un objet.

Nul doute donc que l’analyste ne puisse jouer du pouvoir du symbole en l’évoquant d’une façon calculée dans les résonances sémantiques de ses propos.

Ce peut être là l’objet d’un retour à l’usage des effets symboliques, dans une technique renouvelée de l’interprétation.

Nous y pourrions prendre référence de ce que la tradition hindoue enseigne du dhvani20,en ce qu’elle y distingue cette propriété de la parole de faire entendre ce qu’elle ne dit pas. C’est ainsi qu’elle l’illustre d’une historiette dont la naïveté, qui paraît de règle en ces exemples, montre assez d’humour pour nous induire à pénétrer la vérité qu’elle recèle.

Une jeune fille, dit-on, attend son amant sur le bord d’une rivière, quand elle voit un brahme y engager ses pas. Elle va à lui et s’écrie du ton du plus aimable accueil : « Quel bonheur aujourd’hui ! Le chien qui sur cette rive vous effrayait de ses aboiements n’y sera plus, car il vient d’être dévoré par un lion qui fréquente les alentours… »

L’absence du lion peut donc avoir autant d’effets que le bond qu’à être présent, il ne fait qu’une fois, au dire du proverbe.

Le caractère premier des symbole les rapproche, en effet, de ces nombres dont tous les autres sont composés, et s’ils sont donc sous-jacents à tous les sémantèmes de la langue, nous (140)pourrons par une recherche discrète de leurs interférences, au fil d’une métaphore dont le déplacement symbolique neutralisera les sens seconds des termes qu’elle associe, restituer à la parole sa pleine valeur d’évocation.

Cette technique exigerait pour s’enseigner comme pour s’apprendre une assimilation profonde des ressources d’une langue, et spécialement de celles qui sont réalisées concrètement dans ses textes poétiques. On sait que c’était le cas de Freud quant aux lettres allemandes, y étant inclus le théâtre de Shakespeare par la vertu d’une traduction sans égale. Toute son œuvre en témoigne, en même temps que du recours qu’il y trouve sans cesse, et non moins dans sa technique que dans sa découverte. Sans préjudice de l’appui d’une connaissance classique des Anciens, d’une initiation moderne au folklore, et d’une participation intéressée aux conquêtes de l’humanisme contemporain dans le domaine ethnographique.

On pourrait demander au technicien de l’analyse de ne pas tenir pour vain tout essai de le suivre dans cette voie.

Mais il y a un courant à remonter. On peut le mesurer à l’attention condescendante qu’on porte, comme à une nouveauté, au wording : la morphologie anglaise donne ici un support assez subtil à une notion encore difficile à définir, pour qu’on en fasse cas.

Ce qu’elle recouvre n’est pourtant guère encourageant et l’émerveillement dont un auteur21 nous fait part du succès opposé qu’a rencontré auprès de son patient l’usage successif qu’il a fait sans préméditation, nous dit-il, des mots de need et de demand pour analyser la même résistance, laisse rêveur. Nous croyons ne faire preuve ni d’un grand besoin de purisme, ni d’une excessive exigence de rigueur, en y mesurant le degré de bafouillage que cet émerveillement démontre être courant dans la pratique.

Car need et demand pour le sujet ont un sens diamétralement opposé, et tenir que leur emploi puisse même un instant être confondu revient à méconnaître radicalement l’intimation de la parole.

Car dans sa fonction symbolisante, elle ne va à rien de moins (141)qu’à transformer le sujet à qui elle s’adresse par le lien qu’elle établit avec celui qui l’émet, soit : par la vertu du don qu’elle constitue.

C’est pourquoi il nous faut revenir, une fois encore, sur la structure de la communication interhumaine et dissiper définitivement le malentendu du langage-signe, source en ce domaine des confusions du discours comme des malfaçons de la parole.

Si la communication du langage est en effet conçue comme un signal par quoi l’émetteur informe le récepteur de quelque chose par le moyen d’un certain code, il n’y a aucune raison pour que nous n’accordions pas autant de créance et plus encore à tout autre signe quand le « quelque chose » dont il s’agit est le sujet lui-même : il y a même toute raison pour que nous donnions la préférence à tout mode d’expression qui se rapproche du signe naturel.

C’est ainsi que le discrédit est venu chez nous sur la technique de la parole et qu’on nous voit en quête d’un geste, d’une grimace, d’une attitude, d’une mimique, d’un mouvement, d’un frémissement, que dis-je, d’un arrêt du mouvement habituel, car nous sommes fins et rien n’arrêtera plus dans ses foulées notre lancer de limiers.

Nous allons montrer l’insuffisance de la notion du langage-signe par la manifestation même qui l’illustre le mieux dans le règne animal, et dont il semble que, si elle n’y avait récemment fait l’objet d’une découverte authentique, il aurait fallu l’inventer à cette fin.

Chacun admet maintenant que l’abeille revenue de son butinage à la ruche, transmet à ses compagnes par deux sortes de danse l’indication de l’existence d’un butin proche ou bien lointain. La seconde est la plus remarquable, car le plan où elle décrit la courbe en 8 qui lui a fait donner le nom de
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