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HISTOIRE DU CIRQUE « MODERNE » AU CIRQUE « CONTEMPORAIN » Ce document a été réalisé à partir de la thèse intitulée Devenir artiste de cirque aujourd'hui: espace des écoles et socialisation professionnelle soutenue par Emilie SALAMERO en 2009 et du texte Esthétique du cirque contemporain écrit par Jean-Michel Guy et Julien Rosemberg pour la collection Images de la création hors les murs produit par Hors les Murs. Le cirque dit « moderne » naît en Angleterre à la fin du 18e siècle. Sa naissance tient de la rencontre entre les professeurs de la haute école équestre et des écuyers d’origine foraine ou saltimbanque. En effet, à la fin du 17e siècle, les nobles gens se détournent de l’apprentissage guerrier et les instructeurs d’équitation se voient contraints à la reconversion. L’équitation jusqu’alors militaire et utilitaire bascule vers une équitation de type spectaculaire. Philippe Asthley, sergent-major, se reconvertit en entrepreneur du spectacle et crée son académie en 1768. Il s’allie avec des voltigeurs et enrichit ses spectacle par des numéros juxtaposés qu’il puise parmi des formes populaires (acrobates, dresseurs d’animaux, clown) qu’ils contribuent à légitimer et à civiliser. Asthley édifie un bâtiment rappelant le théâtre élisabéthain, sa construction en bois et en pierre est pourvue d’une arène circulaire. L’amphithéâtre d’Asthley prend le nom de « Royal amphithéâtre of arts », terme d’allure noble et romaine. Cet espace de représentation à l’architecture close et au droit d’entrée monétaire offre un nouveau cadre de pratique pour les artistes ambulants et permet la cristallisation et l’identification de cette nouvelle pratique. Asthley envisage le spectacle dans sa globalité : le lieu, le numéro, les artistes…et est en ce sens l’inventeur d’une forme sociale totale. L’intégration de la figure comique et populaire du clown permet une théâtralisation de ces jeux équestres et acrobatiques. La mise en scène et la théâtralisation vont renforcer la reconnaissance de cette pratique comme art. Cette formalisation obtient un retentissement important et marque le développement d’une forme de spectacle urbain qui s’exporte tant vers la capitale française que vers l’Europe. « Ayant séduit Louis XIV, puis Louis XV et Marie-Antoinette, les Asthley exportent le modèle de leur « amphithéâtre anglais » au faubourg du Temple à Paris où ils ouvrent un établissement en 1783. » (Wallon, 2001, 117) La piste de 13 mètre de diamètre, le rouge, les fanfares et l’uniforme des hommes de cirque issus des champs de bataille, les chevaux, les acrobaties spectaculaires et burlesques sont autant de témoins e l’empreinte militaire d’Asthley. Les premiers codes de représentation du cirque « moderne » vont se perpétuer dans le cirque « traditionnel » : piste circulaire, juxtaposition de numéros, prouesse et situations comiques. L’évolution du cirque se poursuit. Sa dimension corporelle et l’absence de texte sont les deux éléments principaux de son fort potentiel d’acculturation et de sa diffusion dans de nombreuses cultures. La création d’établissements en dur se développe dans les villes. La querelle entre le théâtre et le cirque grandit alors. L’apparition de révolutions industrielles, le développement des moyens de transports, notamment avec l’arrivée des voies de chemins de fer et de l’automobile, vont faciliter ; avec l’invention du chapiteau, une diffusion plus rapide sur les territoires. L’urbanisation croissante permet également aux établissements de cirques urbains de bénéficier d’un public de plus en plus large. La réintroduction des « Jeux Olympiques » en 1896, tout comme le développement du sport, marque également l’intérêt pour la culture du corps et de l’exploit physique. Enfin, c’est l’apogée des empires coloniaux et de leur emprise internationale ; ce qui suscite parallèlement la curiosité des européens pour l’exotisme, à laquelle les cirques n’omettent pas de répondre au travers des ménageries. Le cirque emprunte les techniques de la gymnastique, notamment l’invention du trapèze volant par Jules Léotard ainsi que ses valeurs, l’exaltation de l’exploit physique. L’industrialisation entamée dans les pays les plus riches altère progressivement le prestige du cheval, devenant ainsi moins convoité. Le cirque rentre dans une première ère importante de renouvellement. Afin d’attirer un public toujours plus nombreux et pour pallier le désintérêt de l’aristocratie pour le spectacle équestre, le cirque utilise ce que Pascal Jacob appelle des « artifices de complément » (2008). A la fin du 19e s, les animaux exotiques, rendus accessible par la colonisation, sont prisés par le marché économique et font la fortune des certaines familles de cirque. L’intégration des animaux et du trapèze volant va marquer l’évolution des valeurs qui mutent de l’excellence équestre et technique vers la mise en scène du spectaculaire, du danger. Le suivi des numéros devient secondaire par rapport aux émotions émanant de la foule sous le chapiteau. Au cours du 19e et 20e s, le cirque « moderne », devenu un cirque acrobatique et clownesque, devient avant tout une forme commerciale porté par des entrepreneurs du spectacle. Le cirque s’éloigne de son public aristocratique initial. Au 20e s, dans le cirque dit « traditionnel » le spectacle est avant tout un divertissement qui a pour première vocation la rentabilité économique. Cette offre culturelle, devenue populaire, connaît une période faste où culminent les dynasties mondiales du cirque : les Fratellini, Zavatta, Gruss, Boulglione… qui multiplient les chapiteaux. Un spectacle familial : le jeu des sensations Dans cette forme enrichie et codifiée au fil de deux siècles de développement, les numéros présentés couvrent un ensemble de disciplines : les techniques aériennes (trapèze fixe, ballant, volant), la jonglerie (balles, massues, anneaux…), le jeu clownesque, les techniques d’équilibre (fil de fer, funambulisme…), le dressage d’animaux et l’art équestre pour les enseignes qui ont conservé une certaine richesse économique (Jacob, 2008). Gilbert Edelstein, acteur du Cirque Pinder-Jean Richard, expose à Pierre Notte sa définition du cirque « traditionnel » : « La tradition, ce sont quatre éléments primordiaux : les animaux, les acrobates, et particulièrement les volants (trapézistes), la magie et les clowns, les vrais, c'est-à-dire l’Auguste et M. Loyal. Autour, l’unité des couleurs, notamment pour les camions, pour le chapiteau, et même pour les uniformes, avec paillettes, est indispensable. L’itinérance, les treize mètres de diamètre de la piste sont aussi des caractéristiques premières de cette tradition.» (2003, 33). Le spectacle présente donc une série de numéros, entrecoupés par des intermèdes clownesques et musicaux (Forette, 1998). La succession obéit à des soucis logistiques de montage et démontage de matériel, et les numéros sont individuellement choisis par les recruteurs avant tout pour leur qualité performative. Chaque numéro est construit de manière autonome et peut se vendre « clés en main » à toute autre entreprise de spectacle (Pencenat, 2002). L’excellence n’est donc plus seulement, comme elle le fut pour le cirque « moderne », celle des exercices équestres de haute école, mais plutôt sportive33 afin de renforcer la dimension spectaculaire et la prouesse corporelle. La seule « dramaturgie » tient en la présence d’une figure récurrente, M. loyal, qui fait le lien entre des numéros juxtaposés et dans la mise en scène du risque, devenue centrale. « Le risque reste l’un des critères majeurs de ce qui fait le cirque » traditionnel, le « cirque moderne » étant construit sur la base d’une excellence technique équestre (Pencenat. 2002, 46). M. Loyal a pour fonction d’animer les transitions et de détourner l’oeil du spectateur lors du changement de matériel. Seules les entrées et sorties de numéros font l’objet d’une mise en scène minimale, mais celle-ci n’est, tout comme l’accès à un statut d’art plus légitime, pas une préoccupation centrale du cirque « traditionnel ». Celui-ci est tout autant une entreprise de spectacle qu’un mode de vie. Les caravanes, l’entretien des animaux et des corps, l’itinérance, la gestion économique, l’arrivée du spectacle après une journée de labeur sont autant de critères qui caractérisent ce que C. Pencenat (2002) appelle un mode d’existence de type « agricole », bien différencié de celui des comédiens à la même période. L’ensemble des éléments de ce divertissement répond à une préoccupation économique et l’esthétique « voyante et tapageuse » (Forette, 1998) relève d’un goût « populaire » accessible au plus grand nombre. Le cirque « traditionnel » joue sur la sensation, les accessoires et les rituels (Wallon, 1999a). « Jusqu’au milieu du 20ème siècle, le cirque est traditionnellement un univers festif, coloré », à l’instar du théâtre populaire (Proust, 2001), et représente le « symbole fort de l’enfance, du merveilleux, de la difficulté aussi… de délivrer l’illusion d’une réconciliation entre l’homme et l’animal et de magnifier un être surhumain, protéiforme, capable avec élégance de distorsion ou d’étirement et à qui les objets obéissent ou se soumettent avec constance » (Forette, 1998, 9). De fait, le public principalement attiré par le cirque « traditionnel » est un public familial, majoritairement mobilisé par l’intérêt de l’enfant et la performance de l’artiste (Forette, 1998 ; Lévy, 2001 ; David & Sagot- Duvauroux 2001). A l’instar des spectacles sportifs qui se développent fortement au 20ème siècle, le cirque « traditionnel » est un spectacle conçu pour le « peuple » (Bourdieu, 1980). Ce genre de cirque est familial, tant du côté du public que du côté des artistes et des entrepreneurs du spectacle. Mais il est à se demander dans quelle mesure ce spectacle sensationnel peut répondre aux exigences inédites d’un nouveau public davantage doté en capital culturel (Boltanski, 1975 ; Dubois, 1999). Au début du 21e s le cirque « traditionnel » est en perdition. Face au combats et dans l’entre deux guerres, les artistes se sont dispersés. Après la seconde guerre mondiale, la France fait face à d’importants travaux de reconstruction des infrastructures, au détriment de toute forme de loisirs. Les collectivités territoriales contribuent au déclin du cirque en refusant d’autoriser le stationnement, en durcissant la réglementation de l’affichage et en isolant les campements dans des zones périphériques désertes de la ville. Par ailleur, après la première guerre mondiale, le disque et la radio font entrer les artistes dans l’univers domestique. Le music-hall, quant à lui, récupère un certain nombre de numéros de qualité pour ses spectacles. Les spectacles vivants se voient fortement concurrencés par le développement du cinéma et de la télévision, autrement dit du « triomphe de l’image » (Vigarello, 200). La sensibilisation du public à la condition animale et l’ouverture de parcs où les animaux vivent en semi-liberté finissent par discréditer les ménageries de cirque. Pour pallier au déni du public, le cirque traditionnel cherche non pas à améliorer la qualité des prestations mais à bénéficier de recettes annexes, par la vente de produits et de services adjoints à la représentation. Les grandes enseignes, comme les plus petits cirques, s’évertuent à alléger les charges en recrutant moins d’artistes, en achetant moins d’animaux et en faisant disparaître l’orchestre (David et Sagot-Duvauroux, 2001) Les plus petits cirques disparaissent, les grands cirques résistent en s’alliant à des publicitaires ou en recrutant pour leurs spectacles boxeurs, chanteurs, vedettes sportives. Le fonctionnement familial « hermétique » contribue également au déclin car il fige les savoir-faire et empêche le renouvellement du cirque, indispensable à sa survie. Les jeunes générations contestent l’héritage professionnel familial qu’ils jugent trop autoritaire. Le cirque est en marge de l’évolution sociale. Les cirques traditionnels sont le lieu d’une « sur différentiation sexuelle » entre hommes et femmes. Les hommes occupent tous les postes de représentations sur le devant de la piste et diffusent les valeurs viriles telles que le domination, l’adresse, la force et le prise de risque (Cordier, 2007). Alors que le cirque « moderne » valorisait des écuyères en exercice, les femmes du cirque « traditionnel, vêtues de costumes « hyper sexués » apparaissent le plus souvent sur la piste pour mettre en valeur le numéro en incarnant « une femme-objet, objet d ‘admiration et de convoitise, de désir… » (Lefèvre & Sizorn, 2004, 41). Dans la division du travail en dehors de la piste et propre au cirque traditionnel, les femmes sont dévouées à la gestion quotidienne de la communauté (entretien, nourriture, éducation des enfants ...) La sclérose du cirque et les difficulté économique engendrent de nombreuses faillites et permettent au cirque soviétique de briller internationalement, et au « nouveau cirque » de révolutionner le paysage français. Dans un contexte économiquement difficile seule l’Union soviétique a gardé pied (Jando, 2005) en mettant notamment « le cirque au service de son idéologie » (Dupavaillon, 2005, 16). Sur cette période, elle devient la piste mondiale du cirque (Jacob, 2001). Dans un contexte de nationalisation impulsé par Lénine en 1919, la première école de l ‘« art du cirque » est crée en 1927, et marque une rupture avec la conception mondiale et artisanale antérieur du cirque (Achard, 2001) Le cirque soviétique est donc le premier à concevoir un cirque d’Etat et une formation associée à des fins de propagande d’une nation et d’une idéologie (Achard 2001 ; Jacob 2008). Pour faire à la pénurie d’artistes et de directeurs – très souvent d’origine étrangère et ayant fuit les événements politique du début du siècle – l’élaboration d’une formation professionnelle et artistique devient primordiale. Cette école d’Etat a principalement pour vocation la réhabilitation et le renouvellement des arts de la piste en Union Soviétique et va pour cela opter pour la dramaturgie et l’originalité (Jacob, 2004). Dès 1956, les troupes soviétiques commencent à se produire dans toutes l’Europe, « étourdie face à une telle machine ». En 1972 cette même école met en place les « Studios de Moscou », un dispositif élaboré afin de mettre en scène la prouesse corporelle et technique. Pour ce faire, les formateurs convoquent assez vite des éléments externes au cirque, notamment l’acrobatie gymnique et les « arts frères » - la danse et le théâtre principalement (Achard, 2001) – et n’hésitent pas à les mêler. L’école n’hésite pas à recruter des formateurs et des apprentis artistes dans des écoles de sport. L’innovation soviétique, à la fois pédagogique et esthétique, est donc centrée sur la pluridisciplinarité et la dramaturgie et inspire très vite les écoles de l’Est puis les écoles françaises. Le « monstre soviétique » domine le cirque mondial jusque dans les années 1970. En France, le prolongement de la scolarité obligatoire jusqu’à l’âge de seize ans à partir de 1959 permet d’accueillir un public autrefois exclu et de donner à tous l’accès à la culture par l’éducation artistique. Cette entreprise de démocratisation culturelle permet l’accumulation d’un « capital culturel », déterminant dans l’accès à la vie d’artiste. La généralisation de la scolarisation entraîne la multiplication des vocations et l’essor des marchés de la production culturelle. La grande majorité des acteurs du « nouveau cirque », qu’ils soient initiateurs de compagnies ou d’écoles de secteur amateur ou professionnelles sont étrangers au cirque « traditionnel ». Les acteurs pourvus de dispositions scolaires mais dépourvus de capital technique « traditionnel », investissent une pratique sociale fragilisée, voire désuète et y transfèrent, en l’intellectualisant et en la théâtralisant, le capital culturel transmis par l’école ou la famille. Dix ans après la loi concernant l’allongement de la scolarité, des mouvements socioculturels regroupés sous l’appellation « gauchisme culturel » ou encore de « démocratie culturelle » éclatent et favorisent l’avènement de nouvelles esthétiques. La révolution socioculturelle de 1968 est en marche et le « nouveau cirque » comme les « arts de la rue » émergent avec. Ils sont le reflet de l’esprit de l’époque : rupture avec la culture légitime dominante et l’ordinaire, volonté de réhabiliter les « exclus », créativité par tous, abolition de la distance entre l’art et le peuple. Dans cette dynamique, certains acteurs souhaitent se marginaliser du théâtre, la rue devient la « plus belle des scènes » (Forette, 1998). Ils créent alors un mouvement de contestation culturelle, l »agit prop », à l’origine du théâtre de rue, qui lui-même se joint à l’univers forain et au cirque alternatif pour donner lieu à ce que certains nomment la « tribu des arts de la rue » (Wallon, 2002, 234). Le cirque en investissant la rue devient un instrument de revendication. Le théâtre, attiré par la rue également, rejette la dictature du texte et s’appuie plus amplement sur la mise en jeu du corps en tant qu’instrument expressif et charge érotique. La plupart des compagnies du « nouveau cirque » naissent de la rencontre entre des acteurs de théâtre et des « passionnés » polyvalents ou acteurs de cirque, à l’image de la rencontre entre Silvia Monfort et Alexis Gruss. Issue du théâtre et future co-créatrice d’une des premières écoles de cirques publiques, elle incite Alexis Gruss, héritier d’une dynastie circassienne, à remonter un spectacle à l’ancienne, et l’inscrit ainsi dans une « franche modernité » (Forette, 1998). Dans le même temps Annie Fratellini ouvre l’Ecole Nationale de Cirque. L’ouverture de ces deux écoles encourage l’expression de nouvelles vocations et deviennent le moteur d’un renouvellement esthétique. 1974 est un point de départ. Les années qui suivent vont voir l’éclosion de dizaines d’écoles de cirque de loisirs, d’associations et de festivals. Dans la continuité des mouvements de 1968, le « nouveau cirque » devient un instrument de renversement des hiérarchies sociales orienté vers l’ensemble des rapports de domination, culturels et politiques (Maigret, 1994) : art populaires/arts bourgeois, mais aussi jeunesse subversive/ adultes conservateurs. Dans les années 70 et 80 les troupes se multiplient, elles importent un certain nombre de fonctionnements théâtraux tel que le regroupement en « compagnies » et la division du travail autour d’un metteur en scène principalement. Elles revendiquent leur caractère culturel et artistique, construit en opposition avec toute logique commerciale. Les compagnies deviennent des familles d’ « esprit ». La posture du nouveau cirque consiste en l’opposition au cirque traditionnel et la transgression. Archaos, Cirque Plume, Zingaro, Dromesko sont les représentants de ce mouvement. Le « nouveau cirque » se démarque du cirque traditionnel grâce une triple rupture : esthétique, éthique, et économique. Le nouveau cirque développe la narration selon deux modalité dominantes : l’humour et la poésie, et souhaite dépasser l’unicité esthétique de son ancienne forme, basée sur trois émotions : la peur, le rire et l’émerveillement. Les jeunes compagnies prônent l’humanité, la simplicité, la sincérité, l’authenticité, la popularité, la solidarité...des aspirations au cœur de la création. Les relations humaines deviennent centrales et nourrissent les productions artistiques. Une des différences fondamentales entre cirque traditionnel et nouveau cirque réside dans la conception même du spectacle ; le cirque traditionnel présente une série de numéro, indépendants les uns des autres, reliés entre eux par des intermèdes clownesques et musicaux, le tout coordonné par Monsieur Loyal. Le nouveau cirque s’appuie sur une mise en scène, une histoire, un scénario. Les prouesses s’enchaînent dans un déroulé, écrit, les artistes, en général, étant présents sur la durée du spectacle comme au théâtre. L’artiste assurant sa prestation sur la durée du spectacle au lieu de se produire pour un numéro de quelques minutes, se devra d’être plus polyvalent. Le CNAC sera le promoteur de cette nouvelle exigence propre au métier d’artiste de cirque. Il propose en effet une formation de type pluridisciplinaire, où l’apprenti touche à tout, apte à la création et à l’interprétation. Les références artistiques deviennent multiples : arts plastiques, littérature, bande dessinée, théâtre, danse, musiques classiques et actuelles et participent au décloisonnement des genres. Le nouveau cirque s’engage vers un cirque d’art singulier et original revendiquant la subvention, l’aide à la création mais aussi l’aide à la diffusion. Il souhaite dès lors accéder à une palette plus diverses de lieux de diffusion que l’unique chapiteau, signe fort de l’identification de la forme classique et ainsi accéder à un public nouveau qui fréquente habituellement les lieux culturels plus légitimes. L’ensemble de ces processus participe au passage du numéro au statut d’œuvre. Les acteurs du nouveau cirque obtienne en 1979 le transfère de tutelle du Ministère de l’agriculture au Ministère de la Culture. Silvia Monfort est un des acteurs pionniers dans l’accès au cirque aux subventions publiques. Venant du champ théâtral, elle contribue à transférer le modèle d’appel aux subventions du théâtre vers le cirque. Le cirque s’institutionnalise peu à peu. En 1981 le Ministre Jack Lang s’engage à réduire l’écart entre les arts dits « mineurs » et « majeurs », le budget s’accroît. On assiste à la fondation d’institutions permettant la liaison entre l’administration et la profession. La logique soutien / contrôle de l’Etat se fait progressivement. L’Etat sélectionne une modalité de pratique circassienne qui correspond à sa définition actuelle de l’art. Il appuie alors exclusivement les pratiques contemporaines de cirque. Les institutions (CNAC, ANDAC, Hors les Murs, FFEC etc..) permettent la création de diplôme d’Etat, de normes de sécurité, de manifestations, de développement de pôle de recherche. Le CNAC est crée en 1985, il devient l’épicentre du développement du cirque et, en tant que modèle, aura une influence croissante sur son évolution. (Wallon, 2002) Le CNAC est un agent de la consécration du cirque en art. Les pratiques du « nouveau cirque » se sont institutionnalisées, professionnalisées pour se cristalliser en un courant esthétique appelé « cirque contemporain » mondialement consacré dans les années 1990. Le cirque « contemporain » est désormais un cirque « adulte », structuré. Le nombre de compagnies explose en même temps que le nombre de festivals. Les formes contemporaines cherchent à tenir un discours, à proposer un mode de vie, à un transmettre un possible message. L'une des caractéristiques majeures du cirque contemporain est, comme le prouvent la majorité des créations actuelles, de ne se concentrer plus que sur une seule discipline (par exemple la jonglerie, le trapèze ou le fil de fer, etc.), et d'en faire un spectacle complet. Aujourd’hui dans « Esthétique du cirque contemporain », Jean-Michel Guy et Julien Rosemberg listent 6 tendances du cirque d’aujourd’hui. Trois d’entre elles concernent l’évolution du genre. Le chapiteau : un choix : naguère consubstantielle au cirque, la création sous chapiteau est devenue une pratique minoritaire ; Du cirque aux arts du cirque : la plupart des spectacles met désormais à l’honneur une seule spécialité ; L’outre-cirque : un nombre croissant de spectacles hybrides déjoue les codes jusqu’à présent en vigueur (chacune des spécialités se mêle tantôt au théâtre, tantôt à la danse, puis, de plus en plus souvent, à des moyens d’expression comme la vidéo, le cinéma, les marionnettes , les arts plastiques et numériques). Trois autres concernent l’évolution des propositions artistiques. L’interpellation sociale : l’art doit jouer un rôle social, prendre les spectateurs à témoin de faits de société ou aller à la rencontre des habitants d’un territoire ; Drôle de rire : le réveil des clowns féroces et autres burlesques : Mouvements graphique : la recrudescence de formes très visuelles et/ou chorégraphiques (certains artistes recherchent l’avènement du beau et du sens par la forme seule. Ils visent alors la poésie visuelle, la magie des formes, la pureté du geste et du mouvement). |