Correction de l’analyse du texte 3 :
Le principe de compétitivité est paradoxal dans le sport parce que l’étymologie de « sport » renvoie ce terme au vieil anglais « desport » qui signifie « amusement », or l’attitude compétitive empêche le sportif de se concentrer sur le plaisir que pourrait lui procurer son activité physique : il ne joue plus, il concourt.
Albert Jacquard propose de passer d’un sport compétitif à un sport plus collaboratif : il s’agit de changer les règles du jeu afin que le plaisir et la qualité de jeu l’emporte devant le score, tout en passant d’un enjeu individuel à un enjeu plus collectif.
Cet esprit compétitif que dénonce Albert Jacquard est plus présent dans notre société que celui de « connivence ». En effet, dès l’école primaire, le principe du classement des élèves puis l’orientation auquel il donne lieu nous prépare à la sélection qui s’effectue ensuite dans la vie professionnelle : avec un taux de chômage officiel avoisinant les 10%, la concurrence est rude pour décrocher un emploi. Une fois celui-ci obtenu, le management oriente les salariés vers une lutte sans merci où chacun doit dépasser l’autre pour augmenter le rendement global de l’entreprise elle-même insérée dans une compétition mondialisée. L’urbanisation croissante, brisant les liens traditionnels qui prévalaient autrefois dans les villages va dans le sens de la perte des relations de « connivence ». En conclusion, notre époque semble plus que jamais celle de la compétition et le sport, dans son évolution récente, en est bien le reflet.
Séquence 3 : Le sport, un reflet des dérives de notre société ?
Synthèse 3-b : sport et argent
Documents issu du recueil « Le sport, miroir de notre société ? » BTS 2012, Étonnants classiques, GF Flammarion.
Document 1 : p. 82, Hugo, L’homme qui rit (1869)
Document 2 : p. 84, Éric Maitrot et Karim Nedjari, L’Histoire secrète des Bleux. De la gloire à la désillusion (2002)
Document 3 : p.87, Isabelle Queval, Le Sport : petit abécédaire philosophique (2009)
Document 4 : p.90, Interview de Chantal Jouanno (2011), Le Figaro
Correction de l’analyse du texte 1 :
L’argent est lié ici à la boxe par le biais des paris sportifs que les lords anglais échangent entre eux pendant que les boxeurs, des gens du peuple, s’entretuent sous leurs yeux, tels les gladiateurs des arènes greco-romaines.
Les conséquences pour le tournoi de cette importance accordée à l’argent sont que tous les participants ont intérêts à poursuivre le match, même dans les pires conditions et jusque mort s’ensuivent, quitte à passer sur certaines fautes ou fraude évidente, les sommes en jeu étant trop importantes pour ceux qui les convoitent.
Un pari peut dénaturer le sens d’un sport parce que plus l’argent prend d’importance dans une activité sportive et plus l’on s’éloigne de l’origine du sport, terme venu de l’ancien anglais « desport » qui signifie « amusement ». Poussant à frauder, à recourir au dopage voire à truquer les matchs en achetant certains participants, le pari transforme les athlètes en marchandises censées rapporter un profit : on est bien loin alors du sport bon pour la santé ou pour le développement harmonieux de la personne humaine.
Correction de l’analyse du texte 2 :
Le problème rencontré lors de la séance de photographie de l’équipe de France pour Adidas est le refus de certains joueurs de poser vêtu de l’uniforme de l’équipe de France, sponsorisée par Adidas : en effet, ces derniers devaient par contrat servir de support publicitaire à une marque concurrente, en l’occurrence, Nike. Le problème, d’apparence anodine, concerne en fait des sommes exorbitantes puisque les tenues de l’Équipe de France, répliquées en vendues dans le monde entier bien au-dessus de leur coût de fabrication, représentent un enjeu commercial colossal.
Cet évènement est révélateur de la part de plus en plus importante, de l’argent dans le sport. On parle à ce sujet de « sport-business ». Le football est d’ailleurs l’un des sports les plus touchés par cette évolution, ses enjeux financiers étant à la mesure de sa popularité.
Cantona a tourné des publicités pour les rasoirs Bic, Zidane a posé sur de grandes affiches pour Leader Price… Adelca ( ?) a vu son contrat avec Mc Do suspendu suite aux insultes qu’il a proférées contre l’arbitre lors de la Coupe du monde football… On constate que les stars du foot se comportent comme les autres personnalités, de la chanson ou du cinéma : ils utilisent leur popularité pour redorer le blason des marques, vendant le processus d’identification de la jeunesse aux héros sportifs pour en tirer de substantiels bénéfices. Cela n’a rien d’étonnant dans une société tout entière tournée vers le profit. Cela influe nécessairement sur l’éthique du sport.
Correction de l’analyse du texte 3 :
L’argent dans le sport est démesuré parce que le spectateur moyen ne pourrait en toute une vie, faire l’expérience des sommes investies dans les spots publicitaires lors de grands évènements sportifs, ou dans les salaires des stars les mieux payées. Cette démesure est le symbole du caractère exceptionnel attribué au sportif, héros des temps modernes.
D’après ce texte, le sport est une activité capitaliste pour deux raisons. D’abord parce qu’il repose sur l’exploitation de la force de travail des sportifs pour générer des profits, ce qui est le fonctionnement de base du capitalisme. D’autre part parce que le sport-spectacle est devenu une marchandise obéissant à la loi de l’offre et de la demande, comme toutes les autres : c’est dans ce cas l’audimat qui fixe sa valeur d’échange.
Si l’argent peut apporter un intérêt supplémentaire au sport, c’est de faire rêver les jeunes des banlieues ou ceux des pays sous-développés, d’une ascension sociale fulgurante les amenant directement vers la fortune, en récompense de leur mérite. Cette illusion, que dénonce le roman Le Ventre de l’Atlantique, de Fatou Diome, a sans doute pour conséquence de constituer un dérivatif aux violences que provoquent inévitablement les inégalités sociales. L’intérêt de la financiarisation du sport serait donc, pour les gouvernants, de renforcer la paix sociale en proposant des modèles de réussite fabriqués de toutes pièces.
Correction de l’analyse du texte 4 :
Dans le texte, on voit l’omniprésence de l’argent dans le sport : en effet, il n’est question dans cet interview que de corruption, de paris sportifs plus ou moins autorisés, du contrôle des comptes des grands clubs, et du financement du lobbying par les autorités régionales et par les grandes entreprises.
Les solutions proposées pour lutter contre la corruption des paris sportifs sont de redéfinir par un encadrement juridique le rôle des fédérations, de mettre en place des sanctions financières en cas de fraude, et enfin de créer un site internet permettant de recouper les informations et de confondre les fraudeurs.
Selon moi, c’est le sport qui est aujourd’hui au service de l’argent et non l’inverse. On le voit notamment dans la répartition des sommes investies dans le sport. La part consacrée au financement des installations sportives à usage public, à la formation des jeunes de tous milieux et de toutes disciplines, est ridicule au regard des fortunes consacrées au sport de haut niveau et aux enjeux qu’il représente sur le plan marketting.
Séquence 3 : Le sport, un reflet des dérives de notre société ?
Synthèse 3-c : sport et dépolitisation
Documents issu du recueil « Le sport, miroir de notre société ? » BTS 2012, Étonnants classiques, GF Flammarion.
Document 1 : Paul Veyne, Le Pain et le Cirque, Sociologie historique d’un pluralisme politique (1976)
Document 2 : Italo Calvino, « Contentement passe richesse » (1943)
Document 3 : Maurice Duverger, « Le fétichisme olympique » (1972), Le Monde
Document 4 : Vincent Cespedes, « Des sportifs et des hommes… » (2010), Le Figaro Madame
Correction de l’analyse du texte 1 :
Divertir le peuple permet de le détourner de la vie politique, d’après le vers célèbre de Juvénal « Panem et circenses » (« du pain et des jeux »), parce que l’amusement procuré par le spectacle sportif par exemple compenserait de manière illusoire la perte de liberté du peuple au profit des élites dirigeantes et les inégalités sociales.
Mais selon Paul Veyne, il n’en serait pas forcément autrement sans divertissement car une majorité de la population se désintéresse de la politique.
Que l’apolitisme soit naturel est une idée qui semble contestable. En effet, l’histoire de l’humanité – qui n’est peut-être pas que celle de la lutte des classes, pour reprendre la formule de Marx- est néanmoins riche en révolutions et combats collectifs pour la conquête de droits sociaux. Il semble donc qu’au moins ponctuellement, les masses soient portées à lutter contre les inégalités dont elles se sentent victimes. Or, l’échec des idéaux communistes au siècle dernier paraît avoir désorienté la combativité du peuple : ce qu’on nomme aujourd’hui apolitisme n’est pas toujours un désintérêt total pour la gestion des affaires publiques, mais se rapprocherait plutôt d’un désespoir, d’une désillusion globale que nombre d’auteurs ont décrite. Dès lors, la désaffection des mouvements syndicaux et politiques s’explique par une expérience collective de l’échec et du désenchantement : que ce vide soit comblé par la médiatisation du sport n’est pas nécessairement la preuve d’un complot fomenté par nos dirigeants pour détourner les masses de la politique. Mais cela ne prouve pas non plus que l’apolitisme soit naturel : au contraire, il s’agit plutôt d’un phénomène historique.
Correction de l’analyse du texte 2 :
On peut qualifier ce texte d’apologue parce qu’il raconte l’histoire fictive d’un peuple que l’on prive de liberté en ne lui autorisant qu’un seul jeu et qui ne se révolte finalement que lorsque ce jeu sera supprimé, alors que la liberté lui est par ailleurs accordée : la visée du texte est de convaincre le lecteur par cet exemple fictif que le peuple tient plus à ses divertissements qu’à sa liberté.
Les leçons à tirer de ce texte seraient d’une part que le peuple est naturellement apolitique, docile et peu soucieux d’être dirigé par des élites qui ne le consultent pas, pour peu qu’il dispose d’un divertissement pour le distraire. D’autre part, que les révoltes qui secouent parfois la population sont motivées par des motifs futiles, tel la privation d’un divertissement – ce qui conforterait l’idée que le peuple est incapable de se diriger lui-même.
Il paraît difficile de penser que la société actuelle soit plus encline à manifester contre une privation de loisirs sportifs que contre une privation de ses libertés, alors que les révolutions arabes viennent de secouer plusieurs pays du monde, chassant des régimes oppressifs pour en instaurer d’autres – même si ces derniers ne sont pas toujours des démocraties… Les soulèvements populaires donnent toujours lieu à des répressions de la part de l’appareil d’Etat et on voit mal comment des citoyens accepteraient de perdre la vie pour défendre leur droit à pratiquer le sport. Au contraire, dans l’ancien bloc communiste, où la pratique du sport de haut niveau était très réglementé et soumis à un contrôle sévère des autorités – comme le raconte Jean Echenoz dans Courir- on constate que lorsque ses dirigeants empêchent Emile Zatopek de participer à des compétitions internationales, ce dernier obéit. En revanche, il se révoltera lors de l’arrivée des chars russes et sera pour cette raison envoyé dans une mine d’uranium. On peut donc penser que l’apologue d’Italo Calvino est un texte qui sous-estime l’amour du peuple pour la liberté et sa capacité à réagir face aux oppressions : l’engouement actuel pour le sport-spectacle ne signifie pas nécessairement que la population ait tout perdu de sa dignité et de sa combattivité.
Correction de l’analyse du texte 3 :
Selon Maurice Duverger, l’idéal olympique est une entreprise de dépolitisation parce que le projet de Pierre de Coubertin, faire s’affronter des nations sur un stade, ne vise qu’à dissimuler les antagonismes sociaux et nationaux afin de préserver la paix sociale.
D’après l’auteur, l’irruption de la violence, voire des nationalismes n’est pas une dégradation de cet idéal parce que d’une part, cette irruption était inévitable – contrairement à ce que prétend l’hypocrite éthique olympique- et d’autre part, parce que ces rencontres peuvent servir d’exutoires à des tensions qui pourraient s’exprimer de manière beaucoup plus violentes si elles s’affirmaient ailleurs que sur un stade.
Le sport peut refléter la vie politique comme l’attestent plusieurs exemples de notre histoire récente. Ainsi, lors des Jeux de Mexico, en 1968, des athlètes noirs américains à qui l’on remettait leurs médailles protestaient symboliquement, le poing levé, contre la ségrégation raciale qui sévissait dans leur pays. Auparavant, lors des Jeux de Berlin, en 1936, le tournage du film documentaire « Les Dieux du stade » à la demande d’Adolf Hitler montre l’utilisation des athlètes allemands en tant qu’image de propagande censée conforter l’idéal de perfection de la race aryenne. Ces deux exemples illustrent comment l’histoire des discriminations raciales peut se lire au travers des principales manifestations sportives.
Correction de l’analyse du texte 4 :
Selon Vincent Cespedes, jusqu’en 2010 l’intelligentsia avait une vision très méprisante du sport, considéré comme l’opium du peuple.
D’après lui, cela a changé parce que les grands rassemblements sportifs sont aujourd’hui porteurs de valeurs jugées révolutionnaires : fraternisation, oubli de la routine et de la soumission quotidienne, libération des corps frustrés par une vie devenue en grande partie virtuelle et où la place de la virilité est sans cesse remise en cause.
La phrase « […] beaucoup ont trouvé dans le spectacle sportif leur ultime dealer » est paradoxale. En effet, au début du texte, l’auteur semble dire que pour l’intelligentsia actuelle le sport n’est plus l’opium du peuple. Or cette phrase montre qu’en réalité, rien n’a changé même si les non-sportifs n’y voient que du feu : le sport exerce toujours une vertu cathartique qui délivre les hommes des tensions sociales accumulées… même si ces dernières ont changé de nature. Cette explication paraît en tous cas pertinente pour expliquer les effusions viriles et fraternelles que l’on peut observer dans les stades de football ou de rugby, et que l’on retrouve dans le film « Looking for Eric » de Ken Loach.
Séquence 3 : Le sport, un reflet des dérives de notre société ?
Synthèse 3-d : sport et violences
Documents issu du recueil « Le sport, miroir de notre société ? » BTS 2012, Étonnants classiques, GF Flammarion.
Document 1 : p.124, Johan Heilbron et Maarten van Bottenburg, « Gladiateurs du troisième millénaire » (2009), Le Monde diplomatique
Document 2 : p.128, Pascal Duret, « Perception du « coup de boule » de Zidane par les collégiens » (2007), Socio-logos
Document 3 : p.131, Patrick Mignon, « Hooliganisme en France » (1996), Lire et savoir
Document 4 : p.135, Laurent Mauvignier, Dans la foule, (2006)
Correction de l’analyse du texte 1 :
Le « combat ultime » est un affrontement entre deux lutteurs, aux techniques diversifiées, se déroulant en cage et devant public, sans aucune règle – excepté l’interdiction de mordre et d’arracher les yeux, ce combat se poursuivant jusqu’à la mort ou presque.
Les arguments qui prouvent que ce sport est très populaire sont les suivants : d’une part le tout premier match de combat ultime diffusé à la télévision américaine a réuni 80 000 foyers. Cette pratique s’est ensuite rapidement diffusée dans le monde, sous des noms variés, ce qui confirme sa popularité planétaire. Enfin, cette pratique est suffisamment répandue pour susciter des débats politiques voire des interdictions pure et simple, comme aux Pays-Bas. L’auteur explique cet engouement par le fait que la violence extrême est en général bannie de la société, et qu’elle trouve un exutoire dans ces matchs, tant pour les spectateurs que pour les participants.
Le sport canalise certainement les pulsions d’agressivité d’une partie de la population et permet ainsi de conforter la paix sociale.
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