x.Axe de perception Mise en contexte Dans cette partie du travail proposé, nous nous posons la question de savoir si les ménages belges ont conscience de l’impact écologique qu’ont les bodies de leurs enfants âgés entre zéro et deux ans. Nous examinerons également la perception des ménages concernant les types d’impacts écologiques possibles et les aspects pratiques de l’utilisation des bodies. Pour aller plus loin dans notre enquête, nous avons aussi demandé aux ménages d’imaginer des solutions possibles pour réduire l’impact écologique des bodies.
Nous supposons que les questions écologiques n’influencent que rarement le choix des parents lors de l’acquisition de bodies et formulons l’hypothèse que la connaissance des impacts écologiques des bodies varie en fonction du statut économique des ménages, les « favorisés » étant bien plus sensibilisés à ce sujet.
y. Méthodologie Nous avons réalisé notre enquête auprès d’un échantillon réduit de parents d’enfants âgés entre zéro et deux ans issus de milieux économiques différents. Nous avons interrogé 10 personnes différentes correspondant à autant de situations familiales différentes.
Dans un premier temps, nous comptions évaluer le statut économique du ménage interrogé par un unique indicateur, celui du quartier. Néanmoins, lors de nos entretiens, nous nous sommes rendu compte que le quartier à lui seul ne suffisait pas pour déterminer si un ménage appartient à une classe « normale à favorisée » ou « défavorisée ». Nous avons donc choisi d’inclure également d’autres facteurs tels que l’âge, la composition du ménage, le travail, le diplôme, le nombre de revenus de la famille, le type d’habitation et le statut de locataire ou propriétaire afin de nous aider à classer les sujets dans la catégorie adaptée. Conscients du caractère subjectif et, probablement, incomplet des critères de classification choisis, nous nous sommes adressés au CPAS afin qu’il nous oriente, dans le respect de la vie privée des ménages, vers des personnes appartenant à une catégorie décrite comme économiquement défavorisée.
En ce qui concerne la méthode d’enquête, nous avons opté pour des entretiens personnels avec des questions ouvertes. Nous avons choisi cette façon de faire car nous voulions pouvoir adapter notre questionnement aux réponses qui nous étaient faites (Kaufmann, 2001). Dans les faits, une conversation en direct avec les ménages nous a permis d’avoir une grande variété dans les réponses, représentatives des différentes perceptions au sein du groupe visé. De plus, cette méthode nous a permis d’adapter notre langage et la façon de poser les questions aux besoins de la personne interrogée. L’essence des questions elles-mêmes n’a pas été modifiée.
z. Présentations de résultats L’acquisition des bodies Le terme « acquisition » doit se comprendre ici comme le fait de se procurer des bodies, que ce soit par l’achat ou la réception de cadeau/dons.
Généralités
Les façons de se procurer des bodies pour leurs enfants de zéro à deux ans varient en fonction du ménage : une grande majorité affirme acheter les bodies dans des grandes chaînes commerciales telles que le H&M, le C&A ou Hema. Seulement les personnes les plus favorisées économiquement envisagent d’acheter leurs bodies dans des magasins « locaux ». Les plus défavorisées évitent d’acheter des bodies neufs, préférant le seconde main, les marchés et les dons.
Certaines personnes interrogées évoquent l’idée que les magasins « locaux » de petite taille proposent des bodies de meilleure qualité et supposent que ces bodies ont un impact écologique moindre par rapport à ceux vendus par les grandes chaînes. En effet, ces personnes supposent que les bodies vendus dans les magasins « locaux » sont produits localement ce qui, selon un des sujets, est bénéfique pour l’environnement en réduisant l’émission de gazes produit par le transport.
De manière générale, les personnes interrogées disent ne pas se poser la question d’un possible impact écologique lors qu’elles achètent un body. Les priorités dans l’acquisition de bodies pour les ménages semblent être, dans un ordre décroissant, le confort, la santé, le prix, l’aspect esthétique. Pour approfondir la notion de confort et de santé, la plupart des personnes interrogées évoquent le coton comme leur matière de préférence, ce qui confirme notre choix de concentrer notre étude sur les bodies en coton. Le coton est perçu par presque toutes les personnes interrogées comme étant une matière douce et naturelle qui laisse transpirer la peau du bébé. Un sujet d’étude appartenant à la catégorie des « économiquement favorisés » affirme préférer acheter des bodies de seconde main, non pas pour des raisons économiques, mais parce qu’il pensait que, suite aux nombreux lavages subis, les bodies de seconde main contiendraient moins de produits nocifs pour son enfant. Ceci est un exemple assez clair que nous avions raison de supposer que des critères de santé passeraient avant celui de la protection de l’environnement.
Les ménages affirment en moyenne posséder une quinzaine de bodies par enfant. Ce nombre semble être totalement indépendant du statut économique du ménage.
Le cas des bodies « biologiques »
Dans un premier temps, nous avons demandé aux personnes interrogées si elles pensaient que des bodies « biologiques » existaient et si elles pouvaient imaginer ce que c’est. Leurs réponses nous ont apporté une première différence relativement marquante entre le groupe de la classe économiquement « favorisée » et « défavorisée ». En effet, un peu plus de la moitié des personnes « défavorisées » ne connaissait pas du tout le concept et les autres disaient ne le connaître que par le magasin H+M qui en propose de manière voyante dans ses rayons. L’ensemble des personnes « défavorisées » a eu beaucoup de difficultés à identifier des différences entre un body « normal » et un body « biologique ». Le terme bio semble d’ailleurs générer une certaine confusion dans le chef des répondants de cette catégorie. Ils ne le voient pas forcément comme un gage de qualité et dénoncent, parfois, une stratégie commerciale pour monter les prix.
En revanche, toutes les personnes « favorisées » avaient connaissance de l’existence des bodies « biologiques », une majorité affirmant en posséder, et, pour expliquer ce que c’est, évoquaient l’absence de produits artificiels et toxiques dans la culture du coton et de la production du body. Toutes ces personnes sont d’accord pour dire que les bodies « biologiques » sont un moyen efficace pour aider à protéger l’environnement. Néanmoins, les connaissances de ces personnes restent vagues et le « biologique » est très souvent confondu avec le « fair-trade » en ce que les personnes pensent qu’acheter des bodies « biologiques » aiderait également à réduire les problèmes sociaux liés à leur fabrication.
La perception d’un impact écologique des bodies dans le cadre de l’acquisition
Afin d’évaluer la perception qu’ont les sujets de l’impact écologique des bodies de leurs enfants, nous leur avons d’abord posé la question s’ils avaient conscience de l’existence d’un tel impact. La différence entre les deux catégories de sujets est flagrante. Les personnes « défavorisées » disent toutes ne s’être jamais posé de telles questions et ne voient pas comment un vêtement pourrait avoir un impact sur l’environnement. En revanche, toutes les personnes issues d’un milieu « favorisé » ont conscience que les bodies produisent un impact sur l’environnement. Néanmoins, comme nous l’avons vu indirectement dans la partie précédente par rapport aux bodies « biologiques », les connaissances précises d’un tel impact restent floues. Certains pensent surtout à l’utilisation de produits toxiques lors de la production des bodies ce qui abîmerait les sols. Un sujet a également évoqué les émissions de gaz dues à l’acheminement et lieux de stockages des bodies.
L’usage des bodies Le terme « usage » doit s’entendre ici au sens large afin d’y inclure l’utilisation et l’entretien des bodies au sein d’un ménage jusqu’à ce que ces derniers ne soient plus utilisés. Se pose alors la question de ce qui est fait des bodies quand ils ne sont plus nécessaires.
Généralités
Afin de nous familiariser avec les habitudes des sujets d’étude et pourvoir comparer ces habitudes avec leurs perceptions, nous leur avons posé des questions quantitatives. Nous savons déjà que les ménages interrogés disent, en moyenne, posséder une quinzaine de bodies par enfant. Le nombre de fois que les parents changent le body de leur enfant ne semble pas varier en fonction du statut économique du ménage, mais plutôt en fonction de l’âge de l’enfant, les plus jeunes ayant plus souvent besoin de plus d’un body par jour. En moyenne, le body se change entre une et deux fois par jour. La quantité de lavages par semaine varie énormément de ménage en ménage et certains des sujets n’étaient pas sûrs d’avoir donné le chiffre correct. De plus, l’échantillon de sujets d’étude étant réduit, nous nous garderons d’établir une moyenne de lavages par semaine dans cette partie du chapitre. Un aspect est néanmoins intéressant à retenir, parmi les personnes « défavorisées » plusieurs affirment laver leurs vêtements à la main plutôt que dans une machine. Ceci n’a pas été le cas pour les personnes « favorisées ». Quant aux produits d’entretien, l’utilisation de produits « biologiques » n’est présente que dans les ménages « favorisés ». Le repassage des bodies semble également être plus pratiqué dans les ménages « favorisés » que dans les « défavorisés ».
Perception de l’impact écologique des bodies dans le cadre de l’usage
De façon globale, les sujets d’étude ne semblent pas avoir conscience d’un impact écologique important de l’entretien des bodies de leurs enfants. Ceci est vrai pour les deux catégories, bien que, une fois guidées par des questions plus précises de l’enquêteur, les personnes issues d’un milieu « favorisé » ont eu plus de facilités à s’imaginer quels pourraient être les impacts. En effet, seulement un sujet issu d’un milieu « défavorisé » a pu donner une réponse à cette question : il supposait que les saletés qui étaient sur les bodies s’enlevaient lors du lavage et salissaient l’eau par la suite. Une autre personne du même milieu a évoqué la toxicité des produits utilisés mais uniquement comme source de danger directe pour la santé de son enfant dans le cadre d’une ingestion. Quant aux sujets issus d’un milieu « favorisé », la majorité met en avant une contamination des eaux par des produits toxiques et certains affirment utiliser des produits de label « biologique » ou naturels comme le vinaigre dans le but de réduire cet impact. Aucun des sujets n’a évoqué l’utilisation d’énergie ou d’eau.
L’arrêt de l’utilisation d’un body est généralement causé par la croissance de l’enfant et non pas, comme dans le cas des vêtements d’adultes, par un changement de mode ou une dégradation de son état. Les questions de l’après utilisation et du recyclage ont alors été posées aux sujets d’étude. Tous affirment ne pas jeter le body à moins qu’il ne soit très fortement abîmé. De manière générale, les sujets affirment faire don des bodies dont ils n’ont plus besoin avec un objectif caritatif. Une petite partie des sujets issus d’un milieu « défavorisé » préfère revendre les bodies en question dans un but économique. Confrontés aux questions précises à propos de quelle influence le recyclage des bodies pourrait avoir sur l’impact écologique des bodies, seuls quelques sujets appartenant à la catégorie des « favorisés » ont pu donner une réponse. Pour résumer, leur réponse était la suivante : plus on recycle de bodies, moins on en fabrique et donc moins on pollue la nature avec des produits toxiques.
Propositions des sujets d’études pour réduire l’impact écologique des bodies
En accord avec les résultats que nous avons déjà traités, l’existence d’une différence entre les deux groupes d’étude se dessine par rapport à la capacité de faire une ou plusieurs propositions pour réduire l’impact écologique des bodies. En effet, les sujets « défavorisés » rencontrent des difficultés à envisager des mesures pouvant réduire un tel impact et, pour une quasi majorité, ne semblent pas s’intéresser à la question environnementale. A l’inverse, les personnes « favorisées » ont été promptes à proposer des mesures à prendre, y inclus plus de sensibilisation de la population, une adaptation des produits en produits plus verts, un encouragement à la réutilisation des bodies et l’achat en magasins de proximité (et rendre les prix accessibles) ou encore de modifier la législation.
aa.Conclusion L’objectif de cette partie a été de répondre aux questions suivantes : Les ménages interrogés, ont-ils conscience de l’impact écologique des bodies de leurs enfants ? Si oui, quelle est leur perception de cette problématique ? Les résultats sont-ils influencés par le statut économique des personnes interrogées ?
A la lumière de l’ensemble des réponses obtenues dans le cadre de notre enquête de terrain, nous constatons que les connaissances des sujets d’étude à propos de l’impact écologique des bodies et des vêtements en général sont assez faibles, les plus « défavorisés » n’ayant quasi aucune conscience de l’impact écologique et les « favorisés » n’ayant qu’une idée approximative de ce que cela implique. Néanmoins, une différence assez importante entre les deux groupes se confirme dans le cadre de la capacité à réagir au problème posé, les « favorisés » étant les seuls à construire un raisonnement autour du problème, avec bien entendu les guides de l’enquêteur. Suite aux résultats obtenus, nous pourrions nous poser la question de l’insuffisance de l’éducation à l’environnement parmi la population bruxelloise ainsi que si le niveau d’éducation en général des personnes, souvent influencé par des facteurs économiques, ne conditionnent pas aussi le rapport des personnes aux questions d’impacts écologiques.
Pour résumer, les ménages « défavorisés » n’ont pas vraiment conscience de l’impact écologique des bodies et rencontrent des difficultés à s’en faire une image. Les ménages « favorisés » ont conscience qu’il existe un tel impact, mais leurs connaissances du domaine sont assez vagues. Nous constatons donc que le facteur économique a bel et bien un effet sur la perception des personnes dans le domaine de l’impact écologique, bien qu’il soit moins prononcé que ce nous supposions.
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