Thèse pour obtenir le grade de docteur de l’Université Paris I panthéon-Sorbonne







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1ère partie : La création des Français d’Algérie


Sans réelle préparation ou plan de développement et d’étendue de sa civilisation, la France se lance au début du XIXème siècle dans une entreprise de colonisation de l’Algérie que, sans tarder, les économistes de la Restauration considèreront comme un « énorme fardeau »61. « Quand bien même, disent-ils, les avantages économiques d’Alger se révèleraient substantiels, encore faudrait-il des bras pour mettre les terres en valeur. Les Européens ? Accepteraient-ils de se perdre en « Berbérie » ? Les indigènes ? Collaboreraient-ils avec l’occupant chrétien ? Les Noirs ? Pouvait-on songer à une déportation massive alors que s’intensifient les campagnes internationales contre l’esclavage ? »62 C’est donc avec une large somme d’inquiétudes et d’interrogations que la France entame en Algérie une présence qui durera près de 130 années. En suivant Raphaël Delpard, nous pouvons préciser que l’entrée de cette terre, par la suite appelée Algérie, au sein de l’empire colonial français ne constituait pas, à l’origine du moins, un réel objectif de conquête. Mais, plusieurs événements se sont succédé, qui ont eu pour suite « logique » la colonisation pleine et entière de ce pan d’Afrique du nord. En effet, « ni le Prince Président Louis Napoléon Bonaparte, plus connu sous le nom de Napoléon III, ni le gouvernement et encore moins les parlementaires ne croient en son avenir. L’Algérie leur paraît lointaine et mystérieuse, ils l’imaginent peuplée de sauvages, le couteau entre les dents, prêts à en découdre avec tout ce qui est chrétien. Le maréchal Bugeaud (…) ne pense pas que l’on puisse y créer quelque chose de durable : il propose même à l’empereur d’abandonner cette terre d’Afrique. »63
Dès novembre 1830, « quand la question d’Alger vient pour la première fois à l’ordre du jour de la Chambre »64, ce sont trois courants qui diviseront le Parlement : « les colonistes favorables à « l’occupation définitive et perpétuelle », les anticolonistes qui (…) préconisent le renoncement à un pays « dont il n’est nul besoin de se constituer à grands frais les maîtres », et ceux enfin qui se résignent à l’idée « qu’après avoir commis la faute d’Alger », il ne faut pas commettre « celle de l’abandonner. »65 Mais c’est surtout avec la « caution des Lumières, de la Révolution française et du mouvement ouvrier »66 que l’entreprise de la France pourra prendre toute son ampleur, Louis Blanc se réjouissant « de constater que la France « reprend dans l’intérêt de la civilisation et pour le salut des peuples opprimés son influence sur les affaires du monde. »67 La colonisation de l’Algérie, d’abord « imprévue », se voit donc ainsi légitimée par des objectifs de grandeur, de générosité et de volonté d’élévation des peuples à travers le monde. Pourtant, « l’image originelle que la France donne d’elle-même en Algérie sera  longtemps celle de la barbarie militaire. »68 Désormais, il va s’agir d’opérer une forme de conversion d’une colonisation militaire qui ne recueille pas, à ses débuts, toutes les voix en métropole, en une colonisation plus consensuelle et « bien-pensante », trouvant une forme de légitimation dans l’idéologie des Lumières et de la Révolution française. Avec le soutien des démocrates et des promoteurs des droits de l’homme et du progrès, la colonisation française va chercher à se parer d’une image plus acceptable, pour elle comme pour le reste de la scène internationale.

Ce n’est que sous la IIème République que la colonisation s’accélère vraiment, pour que, en 1970, alors que la conquête s’achève, les éléments constitutifs de la société coloniale soient en place.  « Officiellement (…) la colonisation civile doit permettre de pacifier une région ravagée par les militaires. Du moins, c’est là l’intention des parlementaires français qui approuvent ce programme. »69 Reste à savoir à qui cette tâche de pacification et de colonisation va désormais être confiée. Ainsi, c’est par la volonté de la France d’installer sur place une population dévouée et utile que la population française d’Algérie va être véritablement créée, comme un moyen, voire un « outil », au service d’une cause ou d’une politique. « Et s’il est vrai que les motifs de l’exil furent aussi nourris par des aspirations d’ordre essentiellement économique, la naissance même de cette collectivité historique répondit plus largement à des enjeux politiques qui la dépassaient. »70 La présence sur le sol algérien d’une population hétéroclite s’il en est bénéficie donc, avant même qu’elle soit réellement constituée, d’une légitimation étatique et politique, que nous pouvons, finalement, considérer ici comme un premier canal homogénéisateur. Quelques 130 années plus tard, quand cette volonté politique n’aura plus cours, la présence des Français d’Algérie sur ce sol s’en trouvera, « logiquement », délégitimée. Toutefois, il ne suffit pas à cette population d’appartenir à l’Algérie française pour « produire un signe de ralliement ou un emblème identitaire qui subsume toutes les différences »71, et ce n’est que progressivement que la francisation va s’opérer.


I- Un laborieux cheminement vers la colonie de peuplement
En 1830, la France effectue un débarquement décisif en Algérie, celui qui inaugure sa présence sur cette terre, et, ainsi, la présence de ceux qui deviendront les Français d’Algérie. Le 16 mai, 500 navires quittent le port de Toulon et le 14 juin, l’armée française marque par son débarquement à Sidi Ferruch le premier pas de la colonisation française. Pourtant, «  lorsque le corps expéditionnaire débarque en Algérie pour la première fois, les Français ignorent tout de ce territoire cinq fois plus grand que le leur. »72
Dès le début, l’Algérie se doit d’être une colonie de peuplement. « « Partout où il y a de bonnes eaux et des terres fertiles, écrivait Bugeaud, c’est là qu’il faut placer les colons, sans s’informer à qui appartiennent les terres ; il faut le leur distribuer en toute propriété. » Ainsi, après que les militaires aient pris le contrôle du pays, les premiers Français s’installent, et ont la charge d’inscrire la France et sa civilisation sur la terre algérienne. »73 Toutefois, comme le rappelle Benjamin Stora, les premières batailles opposants colons et autochtones musulmans seront « meurtrières, souvent sanglantes et cruelles. »74
« L’Etat français fondait peu à peu des centres de colonisations pour galvaniser toute cette « main d’œuvre » au sein d’un ensemble organisé. La création de centres de colonisation se fit, tout du moins au début, de manière quelque peu anarchique. Gravitant autour de l’armée chargée de pacifier l’Algérie, des Européens formaient des « villages de tentes » profitant ainsi de la protection militaire. »75
Les premiers Français, venus d’abord de métropole, « ne voient pas encore dans cette terre aride, peu accueillante et qu’ils éprouvent les pires difficultés à dompter, le « paradis perdu » dont leurs descendants parleront lorsqu’il leur faudra la quitter. Ainsi, si les premiers colons ont déployé une réelle ténacité en se voyant confier de bonnes terres, ils doivent aussi se battre au quotidien « contre le climat, les maladies, l’insécurité. »76 A l’âpreté des combats s’ajoute donc une terre ingrate, des maladies, autant d’éléments qui font que beaucoup de ceux qui étaient venus plein d’espoir et de rêves de réussite, renoncent devant le trop lourd fardeau que l’Algérie semble décidée à faire porter. « Les pertes sont nombreuses et beaucoup renoncent : de 1842 à 1846, on dénombre 198 000 arrivées et 118 000 départs. Et plus de morts que de naissances. En 1842, 90 des 300 habitants de Boufarik meurent du paludisme. La même année à Marengo, 250 émigrants sont décimés par le choléra. (…) Dans les premiers villages de colonisation, les pionniers luttent contre un environnement hostile (…). L’image de l’Eldorado promis se brouille devant leurs yeux. L’allure des émigrants est parfois plus roche de celle du vagabond-aventurier que du conquistador. »77 Néanmoins, au fur et à mesure, ceux qui restent profitent « largement de tous les appuis de l’Etat, de son argent, de son armée qui les protège et perce les routes. »78

Dès le début, la volonté de la France métropolitaine dans son entreprise de colonisation de la terre d’Algérie est donc celle d’en faire une colonie de peuplement, un prolongement de l’hexagone, une ressource économique et humaine. Toutefois, « la politique de peuplement se révéla un échec. »79 C’est grâce à l’arrivée des Européens de tous pays que l’échec potentiel de l’Algérie française se transforme, progressivement, en un succès, « succès parfois mal vécu si nous pensons au péril étranger qui naît et se répand dans le groupe colonisateur à partir des années 1850. »80 « « L’Algérie est devenue le seul de nos territoires d’outre-mer où l’on ait vraiment réussi à faire de la France », écrit Gabriel Audisio. « Faire de la France a été la condition même de l’établissement des premiers colons. Aux déportés politiques et aux exclus en tous genres de la métropole, on a dit : « Allez faire en Algérie la France de vos nostalgies ou de vos utopies. » Dans ce but, ils sont partis. Pour survivre, ils ont réclamé un bouclier. Pour l’obtenir, ils se sont crus obligés, à juste raison sans doute, de « faire de la France ». » « Faire de la France », c’est à cette obligation qu’on été tenus, plus que tous autres, les « néos », soucieux d’être reconnus comme citoyens à part entière. « Faire de la France », c’est à cette normalisation que les juifs ont été contraints pour marquer cette différence avec l’indigène reconnu par le décret Crémieux. « Faire de la France », c’est cet impératif qu’on a imposé aux indigènes en échange d’une hypothétique émancipation politique. »81
Après les premiers colons, par vagues successives, « arrivent des paysans des régions pauvres du sud-est de la France et de la Corse, des chômeurs des ateliers nationaux de 1848, des condamnés politiques de 1852, des enfants trouvés, des forçats, des viticulteurs du Languedoc victimes du phylloxera, des Alsaciens-Lorrains de 1871 fuyant l’Allemagne, des soldats démobilisés, des émigrants du bassin occidental de la Méditerranée qui échappent à des pays misérables et trop peuplés. »82

A)La douloureuse période de la conquête de l’Algérie
« « La conquête de l’Algérie ? La réponse au coup d’éventail ! » Pendant de longues années, des générations d’écoliers ont appris et rabâché qu’un coup d’éventail, asséné par le dey d’Alger au consul de France, avait provoqué la prise d’Alger en 1830. »83
Loin de faire l’unanimité en métropole, l’expédition d’Alger passe relativement inaperçue au cœur bouleversements politiques du moment. « Conçue comme une mesure de politique intérieure, elle n’atténue pas la gravité de la conjoncture et ne parvient pas à faire diversion. (…) Que faire de ce fretin bien encombrant, quoique menu ? Faut-il le rejeter à la mer ? Sinon, comment l’accommoder ? » Le pouvoir métropolitain se trouve comme « piégé » par son absence de politique algérienne, mais elle doit en même temps préserver son armée qui vient de « conquérir » l’Algérie. « L’éloignement de cette possession, surgie à l’improviste ne permet pas d’en fixer aisément les limites, d’imaginer pour elle des structures administratives originales ni de faire face, financièrement comme intellectuellement, aux obligations qu’elle implique. Cette extension trop soudaine de la géographie nationale demeure longtemps incommensurable et toujours imparfaitement évaluée. »84

Devant les premières difficultés auxquelles la France doit faire face avec cette nouvelle colonie, personne ne semble prêt à miser sur un avenir de cette terre au sein de l’empire français. Toutefois, « cela n’empêche pas les questions d’affluer. Faut-il ne conserver que des comptoirs en bordure de mer ? Faut-il rapatrier les soixante mille soldats qui ont combattu avec courage ? (…) Thomas Bugeaud (…) s’irrite de l’apathie générale. Il a laissé des hommes sur le terrain, il connaît leur souffrance, il ne peut pas les décevoir. De passage à Paris, il se rend à la Chambre où il a son siège de député, monte à la tribune, interpelle les parlementaires et le gouvernement. « Vous voulez rester en Afrique ? Eh bien il faut y rester pour y faire quelque chose ! (...) ». »85

Ainsi, dès l’origine, il apparaît que l’Algérie aura été un terrain de profonde remise en question de la place et du rôle de l’armée. En effet, pareillement à la situation des années 50 et du début des années 60, l’armée s’engage massivement sur la terre algérienne, pour servir l’apparente volonté politique d’un Etat. Mais, malgré un engagement sans faille, elle se retrouve délaissée quand les gouvernants réfléchissent encore, et en sécurité, à la marche à suivre. Toutefois, l’armée ne connaîtra, au XIXème et au XXème siècle, ni la même issue, ni le même salut.
A l’origine, les choses s’avèrent relativement « simples » pour les militaires qui débarquent sur le sol algérien : « il y a les « indigènes » et les colons, les autochtones et les envahisseurs, les primitifs et les « civilisés ». Au temps de la conquête, les rapports de domination constituent la règle. »86 Pourtant, dès son arrivée au pouvoir, en 1852, Napoléon III fait libérer l’émir Abd el-Kader « et songe même un temps à le nommer vice-roi d’Algérie. Pour modérer la fringale de terre des quelque cent mille colons européens, déjà installés en Algérie, il y avait rétabli le régime militaire, plus apte à ses yeux « à faire le bonheur de nos ennemis de la veille », soit près de trois millions de musulmans. »87 Décidément partisan d’une colonisation pacifique et « égalitaire », il répond aux « partisans de la colonisation européenne à outrance qu’ « il refuse d’infliger à la population arabe le sort des Indiens de l’Amérique du nord, chose impossible et inhumaine », voulant au contraire faire prospérer « cette race arabe intelligente, fière, guerrière et agricole ».88 Pour lui, l’Algérie n’est pas une colonie. C’est un royaume arabe dont il est également l’Empereur, comme il est celui de la France. « Ce projet généreux, imaginatif, porteur en tout cas de la volonté de traiter de la même manière Arabo-Berbères conquis et Européens conquérants, aurait dû notamment se traduire, sur le terrain, par une promotion de la « colonisation »-développement » (…). La défaite de 1870 emporte ce « rêve arabe » de la France ».89

1) Quelle population ? Quelle émigration ?
A côté de la population arabe, mais aussi de la population juive –déjà très largement présente sur cette terre- plusieurs vagues d’émigration, depuis la métropole et depuis l’Europe, vont venir grossir les rangs de la future population française d’Algérie.

Progressivement, les militaires vont laisser leur place sur le terrain aux colons. D’ailleurs, dans leurs récits, « à un début aisément datable et guerrier, certains pieds-noirs préfèrent les balbutiements de la colonisation rurale, signalant qu’ils identifient leur histoire, non à la conquête, mais à la mise en valeur du pays. Les efforts et les affres de la première génération de colons leur paraissent une légitimation plus solide que les exploits militaires dans lesquels ils ne se reconnaissent pas. »90

Ainsi, Jean-Pierre R. associe-t-il directement l’histoire des Français d’Algérie au travail de la terre :

« Quand on regarde l’histoire des pieds-noirs, il y a toutes ces plaines qui ont été travaillées, la Mitidja, les plaines d’Oranie, tout ce qui a été construit. »91
« Aux incertitudes des précédentes années concernant le destin de l’Algérie, succède donc, après 1871 (…), une politique continue, fermement appliquée, qui donne tout son sens à la période proprement coloniale de l’Algérie française. »92 L’Algérie, assimilée à la France et d’ailleurs administrativement rattachée au ministère de l’Intérieur, devient dès lors un simple prolongement de la métropole outre-Méditerranée. Les paysans ont donc remplacé les soldats, mais la colonie de peuplement souhaitée par la France tarde à se consolider. « Aux batailles meurtrières souvent cruelles et sanglantes, livrées contre les populations musulmanes, succèdent d’autres combats. Contre le sol, le climat, l’épidémie. Les pertes sont nombreuses et beaucoup renoncent. »93

Ainsi,  devant les nombreuses difficultés auxquelles ils doivent faire face, certains choisiront même de repartir vers la métropole. C’est d’ailleurs ce que rappelle Jean C. :

« Ceux qui sont arrivés dans mon village, la moitié à peu près sont repartis, ils n’ont pas pu tenir… donc après un essai, ils se sont dit : « on ne va pas pourvoir vivre » alors soit ils sont allés en ville pour travailler dans les villes comme moi aujourd’hui soit pour rentrer en métropole en disant  « on n’a pas réussi là bas »… »94
Devant les difficultés rencontrées par les premiers colons et devant l’absence d’implantation spontanée d’une population française dans ce pays, les dirigeants vont alors s’essayer à un peuplement forcé, en déportant dans la colonie les opposants républicains de Louis-Philippe puis de Napoléon III. L’opportunité de se débarrasser d’éléments pouvant remettre en cause leur légitimité correspond alors idéalement à la volonté première qu’est celle du peuplement de l’Algérie. Comme le relèvera à l’époque un député « il s’agissait plus de donner un coup de balais dans les rues de Paris que de coloniser l’Algérie »95. Par ailleurs, devant ce qui semble être une porte ouverte vers l’Eden, nombre de Français vont se prétendre favorables au républicanisme, afin d’aller tenter l’aventure algérienne, en espérant y faire fortune. « Les réprouvés de 1848, [subissant le contre-coup de la fermeture des Ateliers Nationaux], les déportés du second empire, les sans-le-sous de l’immigration »96 vont ainsi aller grossir les rangs fragilisés des Français déjà installés.

Pour renforcer la colonie, il faudra donc « les déportations successives des républicains hostiles à Louis-Philippe puis à Napoléon III. Ses éléments « dangereux », la France en a envoyé une partie outre-Méditerranée, comme le soulignait un député de l’époque : « Il s’agissait plus de donner un coup de balai dans les rues de Paris que de coloniser l’Algérie. » (…) Ces premiers Français d’Algérie, mélange de paysans déclassés par la révolution industrielle en France et de « quarante-huitards » exilés, ensuite de communards, vont acquérir progressivement une mentalité de petits propriétaires terriens. »97

Si les Français vont en Algérie, c’est avant tout pour la France elle-même. Il s’agit pour eux «  de « l’étendre » et d’en accroître le prestige. »98 « Certains trouvent la France trop étroite. D’autres fuient les persécutions politiques. C’est moins vers l’Algérie qu’ils se dirigent que de la France qu’ils s’éloignent. Beaucoup se laissent séduire par les incitations officielles à la colonisation. Il s’agit en fait, pour la jeune République Française, convertie au conservatisme, de se défaire d’éléments turbulents. La même motivation conduit à des déportations manu militari. »99

Ainsi, ce sont d’abord les « enfants » que la métropole ne désire plus savoir chez elle qui se voient « proposer » d’aller recommencer leurs vies de l’autre côté de la Méditerranée. « « Longtemps », écrivait un romancier de l’époque, « cette colonie a été un dépotoir pour la métropole. L’administration y envoyait ses chevaux de réforme ; la politique, ses enfants perdus ; la bourgeoisie, ses enfants prodigues. » Assainir la France des indésirables de toutes sortes, telle sera donc la fonction première de l’Algérie. »100 Pour certains, Alger va même jusqu’à supplanter Cayenne. « On pourra, cela va de soi, y envoyer les condamnés de droit commun. Mais on pourra surtout profiter de la distance respectable entre la France et ce nouveau territoire pour y déporter ceux qui, parmi les classes laborieuses, se transforment, en cette période d’exode rural et de misère, en classes dangereuses. »101

« Terre nourricière et désirée par ceux qui manquent de pain et de travail, l’Algérie fut, pour plusieurs vagues de transportés, le symbole de la contrainte, des travaux forcés et des mauvais traitements. Ces déportations se produisirent en trois occasions : après l’échec des barricades de juin 1848, après le coup d’Etat du 2 décembre 1851, après la Commune de 1871. Les victimes de l’exil sont des opposants politiques : républicains ou socialistes. Certains se fixent en Algérie, leur peine purgée, et deviennent colons. D’autres ne s’attachent pas au pays et regagnent la France, dès que possible. (…) Pour d’autres, l’Algérie, au lieu d’être une brimade infligée à leurs idées, représente, au contraire, l’asile où ils pourront les manifester sous d’autres formes que l’opposition politique. »102 Ainsi Nicolas D. raconte-t-il :

« Au départ ils sont arrivés là-bas pour vivre… c’était souvent des déportés politiques, c’était des pauvres gens qui quittaient leur petit département, leur petit pays, ils avaient de tous petits moyens pour aller là bas. »103
L’Algérie semble ainsi se spécialiser comme terre d’accueil des opposants politiques puisque ce sont par la suite les communards qui y trouvent refuge, après que les premiers habitants de la colonie aient exprimés un « non » très franc à Napoléon III lors de son plébiscite du 8 Mai 1870, et pris le parti de la Commune. Après la guerre franco-prussienne et le Traité de Francfort, enlevant à la France l’Alsace et une partie de la Lorraine, de nombreux Alsaciens, se refusant à devenir allemands, rejoindront l’autre côté de la Méditerranée. En fait, les Alsaciens et les Lorrains constitueront une part importante de l’émigration vers l’Algérie, une émigration qui procède « de la défaite de 1870 et de l’annexion de leurs provinces par l’ennemi germanique. Comme l’annonce Alexis Lambert, commissaire de la République, « il s’agit d’offrir à nos concitoyens de l’Alsace et de la Lorraine une hospitalité digne de leur industrie et de leur patriotisme ». Le journal métropolitain La Patrie reprend l’idée à son compte tout en y ajoutant une proposition : « Que le peuplement devienne l’Alsace et la Lorraine, que les Alsaciens changent de sol sans changer de patrie. » »104 C’est donc bien un choix pour la France qu’effectuent les Alsaciens à la fin du XIXème siècle. L’Algérie, perçue comme un véritable prolongement du territoire français, s’offre comme possibilité aux Alsaciens de fuir leur région menacée par la présence allemande, mais de rester citoyens français en terre française. L’idée selon laquelle l’Algérie serait la France n’apparaît donc pas uniquement répandue sur le sol algérien, et parmi les colons qui ont besoin d’arguments de poids pour demeurer sur cette terre encore peu accueillante. Il ne semble pas non plus s’agir d’une idée développée plus tard, lorsque l’implantation européenne sera plus solide qu’aux premiers temps, ni même, au cours du XXème siècle, lorsque l’avenir de l’Algérie française se trouvera menacé. Robert L. rappelle ainsi :

« Ma grand-mère paternelle était alsacienne. Donc, elle a fait partie des Alsaciens qui sont venus en 1870 pour pas… pour pas être allemands… donc, qui, après la défaite française sont venus en Algérie pour pas être allemands. »105
Ainsi, « le succès relatif de l’émigration des Alsaciens et des Lorrains sert d’exemple au gouvernement pour inciter les Français à s’expatrier. Si bien que de nouveaux postulants arrivent d’un peu partout, notamment des provinces, notamment des provinces les plus proches de la Méditerranée. Le gros du contingent débarque de la Corse. »106
La période de la conquête, et ses pérégrinations politiques, est relativement peu relayée par les personnes interrogées dans le cadre de cette recherche. Toutefois, Roland A. rappelle :

« La France n’a pas su très bien… n’a jamais eu une politique très claire. Il faut savoir que le long de… tout le long du XIXème siècle, et même du XXème siècle en France, il y a eu des changements de régimes… on est passé d’empereur à roi, de roi à je ne sais quoi. Enfin… même en lisant les témoignages de Victor Hugo en 1848, au moment de la révolution… il parle de l’Algérie lui aussi. On sent que en fait la France n’avait… ne savait pas très bien quoi faire de l’Afrique du nord, de l’Algérie disons… donc, ils voyaient bien que la plupart des Français ne s’intéressaient pas tellement… ils envoyaient plutôt des gens qui étaient des déportés politiques de Paris de 1848. De façon spontanée, je crois que il n’y a pas eu un grand mouvement spontané de la part des Français, qui serait comparable à ce qu’on a eu en Amérique. »107
Mais, dans leur démarche d’inscription de leur histoire et de celle de leur famille dans un temps long, dans leur volonté de gagner une épaisseur historique, comme légitimatrice a posteriori de leur présence et de leur attachement à la terre d’Algérie, ils semblent marquer le début de l’histoire de la présence des Européens en Algérie, à l’arrivée de leurs aïeux, à leur dévouement à la valorisation d’une terre ou encore à leur volonté d’arriver plus ou moins rapidement à une situation sociale satisfaisante.

Toutefois, certains y font référence, comme Jean C., ancien agriculteur, avocat et bâtonnier :

«  Napoléon III (…) pensait en faire un royaume arabe, c’est-à-dire distinct de la France mais avec des attaches proches et très profondes avec la France, et puis la guerre de 70 était là, et puis on a eu d’abord la Commune qui a entraîné une semi guerre civile avec une répression très forte de ce qui était la troisième République et , qui a envoyé en Algérie une grande partie des communards pour les débarrasser de la métropole et encore des pionniers »108
En revanche, un élément est presque systématiquement présent dans les discours recueillis : celui qui consiste à préciser que les Arabes n’étaient pas non plus les premiers présents sur la terre d’Algérie, dont le nom fut d’ailleurs donné par la France, comme le rappelle Viviane :

« C’est la France qui a pris le nom de l’Algérie, c’était des territoires de Maghreb et c’était sous hégémonie turque »109
En effet, si la légitimité des revendications des Français d’Algérie quant à leur attachement et à leurs droits sur cette terre peut être mise en doute, alors il doit en être de même en ce qui concerne les Algériens d’aujourd’hui. Si l’on suit leur idée, les Arabes pas plus que les Français n’étaient les premiers habitants et gouvernants de cette terre. Pourquoi alors auraient-ils plus le droit d’y vivre ? Un tel discours semble pleinement participer de l’entreprise de légitimation a posteriori de la présence française, ou tout du moins européenne, en Algérie et de la compréhensibilité de leur histoire et du drame fondateur qui en a découlé. Dans le même sens, il s’agit pour les Français d’Algérie de délégitimer l’attachement soi-disant unique et exclusif des Musulmans à l’Algérie. Ainsi, si l’on suit le raisonnement des Français d’Algérie, pas plus qu’eux, les Arabes n’avaient à leur arrivée d’histoire algérienne particulière à prendre en charge. C’est le propre de la conquête et de l’installation que de marquer le point de départ d’une nouvelle page d’histoire, et, potentiellement, celui d’un nouveau peuple.

Ainsi, Jean-Claude G. affirme-t-il :

« Les Kabyles, c’est les véritables habitants de l’Algérie, ce n’est pas les Arabes parce que les Arabes ont été conquérants aussi, ils sont venus, mais si on regarde, si on est francs, on dit aussi que les Berbères ont été colonisés »110
Ou encore Michel V. :

« Si on regarde l’histoire, l’Asie mineure, c’était grec. Donc ce qui est toute la Turquie maintenant a été la Grèce avant donc les Turcs ont chassé les Grecs. De toutes façons, l’Algérie… la population initiale, c’est ce que sont les Kabyles maintenant »111
Jean C. :

« Est-ce que les Français peuvent être considérés comme des envahisseurs en 1955 par rapport à 1830, l’époque où ils se sont installés et à ce moment là, les Arabes sont aussi des envahisseurs… ils sont venus envahir l’Algérie qui était peuplée de Berbères et on voit aujourd’hui, l’émergence d’une ethnie kabyle, et je dis kabyle et non pas arabes… les Berbères qui sont à la fois dans les Aurès et en Kabylie disent  « nous ne sommes pas des Arabes »… qui eux avaient été envahis d’abord par les romains puis par les Arabes au VIIème siècle et VIIIème siècle »112
Jean-Pierre F. :

« L’Algérie était aux Arabes mais pas aux Arabes, donc si on remonte les étapes les Arabes ne sont pas propriétaires de l’Algérie »113
Jean-Marc L. :

« On disait même aux Algériens « mais, attendez, c’est pas à vous qu’on a pris l’Algérie. Quand on a eu des problèmes… non, c’est aux Turcs. Vous étiez déjà sous occupation turque ». »114

Précédemment conquise par la Turquie, l’Algérie sera la proie de colonisations successives, et la conquête par la France des Lumières n’en constituera, finalement, qu’un épisode supplémentaire, mais certainement pas le plus heureux. En effet, comme le précise Michel Winock, « les Turcs, avant les Français, avaient soumis les habitants de la future Algérie avec une pareille violence. Mais un élément aggravait le ressentiment des Arabes et des Berbères contre les Français : les Turcs étaient musulmans, le conquérant européen faisait partie des « infidèles ». (…) Toute au long de l’histoire de l’Algérie dite française, la majeure partie de la population resta réfractaire à toute assimilation, a fortiori à toute conversion au christianisme, comme l’espérait encore un Charles de Foucauld. Obstacle insurmontable qui ne cessa d’accroître le fossé entre colonisés et colonisateurs »115.

Ainsi, l’opposition religieuse qui va régner en Algérie constituera un obstacle insurmontable pour la France et ses velléités de colonisation. Si insurmontable, d’ailleurs, que certains voient dans l’incompatibilité des trois religions, christianisme, judaïsme et islam, la raison principale de l’échec de la colonisation française.

C’est le sens des propos de Roland A. :

« Il y avait à mon avis trois religions de trop en Afrique du nord »116
Sur ce point, Jean Pélégri racontera d’ailleurs dans un livre ses souvenirs d’enfant, se rappelant alors qu’il « avait été surpris de constater qu’à l’heure de la prière des ouvriers musulmans du domaine de son père se prosternaient sans tenir compte de l’axe de la route sur laquelle ils cheminaient ou des rangées de la vigne dans laquelle ils travaillaient. L’image est évocatrice. Le parcellaire géométrique symbolise ici le triomphe visible de la colonisation, l’orientation de la prière révèle la persistance d’une Algérie musulmane fidèle à sa propre perception de l’espace et tournée vers un autre centre »117.
Malgré une immigration métropolitaine peu nombreuse, ils sont pourtant quelques uns, parmi les Français d’Algérie que nous avons rencontrés et interrogés, à évoquer cette origine pour leurs aïeux. C’est ainsi le cas de la famille de Hervé H. :

« Ma famille maternelle est originaire de la région d’Albi, d’un village qui s’appelle Ambialé. Le nom de famille de ma grand-mère maternelle c’est Cabale, avec un C, et ils sont partis en Algérie fin du XIXème siècle… et ils sont partis avec trois fois rien. Ils ont laissé d’ailleurs un enfant derrière eux. Ils ont laissé ma grand-mère d’ailleurs, maternelle… qui avait 10 ans à l’époque. Ils l’ont laissée derrière eux. Ils sont restés cinq ans en Algérie, et puis ils sont revenus la chercher. Et ils sont allés s’établir… parce que l’Algérie déjà… toutes les régions du littoral, disons, dont les terres étaient pas trop mauvaises, étaient déjà prises… donc, ils sont allés s’établir sur les hauts plateaux qui précèdent le désert, dans la région de Tiaret, c’est-à-dire à peu près à 300 km au sud d’Alger… et à peu près la même chose d’Oran. C’est à peu près à mi-chemin des deux… dans un triangle isocèle… et puis, mon grand-père maternel, lui aussi, c’est vers le début du siècle… fin du siècle disons, fin du XIXème, qu’il est parti en Algérie. Alors lui, bon, il est parti de la région de Bordeaux. C’est un bordelais… et lui, par contre, c’était un… il a été berger en France. Et puis après, il a été ouvrier à la poudrerie. Il y avait une grosse poudrerie là-bas, qui existe toujours d’ailleurs. Et lui s’est sauvé de France carrément, parce qu’il avait des ennuis avec une femme. Il ne faut pas le dire… »118
René F. raconte aussi :

« Mon père, lui, est un pied-noir né en Algérie, comme nous dans la région d’Oran, mais lui était né à Philippeville dans la région du constantinois, pour une raison simple, c’est que mes grands-parents qui étaient corses, venant d’Ajaccio, dans la région d’Ajaccio, s’étaient installés dans la région de Philippeville-Constantine. »119
Dans le cas de la famille de Robert L., il s’agit de Français qui font le choix de « rester » en France, quand leur région d’origine, en l’occurrence l’Alsace-Lorraine, est en train de sortir du territoire métropolitain et de la souveraineté de la France :

« Du côté de mon père, ils sont… partiellement alsaciens. (…) ça c’est la partie grand-mère paternelle. Grand-père paternel… je sais qu’il est du Gers, parce que le nom que je porte est un nom du Gers… on n’a pas… on n’a rien, on n’a pas d’attache, sinon que le nom est très courant dans le Gers, dans la Haute-Garonne etcetera. »120
Michèle Fo. raconte :

« Les parents de mon père venaient de Savoie. C’était à la fin du XIXème siècle… les parents de ma grand-mère paternelle venaient du Berry, toujours à peu près à la même époque, et ils se sont rencontrés en Algérie. »121
Les propos de Marc G. permettent de mettre en avant une origine métropolitaine, pourtant différente de celles que nous avons citées jusque-là. La diversité caractéristique du groupe des Français d’Algérie ne repose ainsi pas uniquement sur l’apport des pays méditerranéens à la constitution de la population française d’Algérie, mais également sur celui de la métropole elle-même, et de ses différentes régions, chacune porteuse d’importantes différences :

« C’est mon arrière grand-père… arrière grand-père, languedocien, de l’Hérault… famille de l’Hérault, agriculteurs de l’Hérault, les G. … sont natifs depuis plusieurs générations… »122
Dans cette période de peuplement incertain, peut-être est-il possible d’apercevoir l’origine de la perception de l’Algérie en tant que paradis, à découvrir puis perdu, dans l’imaginaire des générations de Français d’Algérie qui s’y seront succédées. Au début de l’émigration européenne, l’Algérie apparaît comme une récompense à ceux qui y cherchent une vie meilleure. Pour ceux qui n’avaient pas su taire leurs opinions, elle prendra la forme d’une punition. Elle est enfin promise comme un avenir à tous ceux qui veulent tout recommencer et faire table rase de leur passé.
Depuis la conquête, elle n’aura jamais été traitée comme une terre comme les autres, et c’est dans les discours même de ceux qui doivent encourager et faciliter le peuplement et la transformation de l’Algérie en une véritable province française, que l’on peut trouver les racines de la vision, idéalisée, de l’Algérie par ceux qui en constitueront la population jusqu’au début des années 60. Ainsi que le précise Raphaël Delpard, « le gouvernement demande aux préfets de faire preuve d’imagination. Pour vanter les avantages proposés, ceux-ci ont l’idée –révolutionnaire pour l’époque, d’apposer des affiches publicitaires dans les mairies et sur les places où se tient un marché. On y évoque dans des termes au lyrisme grotesque la proximité d’une rivière, la fertilité des terres, la construction prochaine d’une ligne de chemin de fer. Il suffit presque de fermer les yeux pour sentir le souffle du paradis vous glisser sur les paupières. »123 En effet, « le rêve des colonistes de créer une seconde France vivant à l’unisson de la métropole, un nouveau Canada sur les rives méridionales de la Méditerranée, connaît de sérieuses difficultés. Partir ? Mais pour quoi faire ? Et avec quels moyens ? L’Algérie n’a rien pour séduire (…). Les responsables politiques sentent que s’ils ne font pas preuve d’imagination, s’ils ne mettent pas tout en œuvre, le peuplement de cette terre d’Afrique ne se réalisera pas. »124 Par ailleurs, « la tentative de certains groupes de réserver l’Afrique aux seuls Français est écartée assez rapidement. L’opinion qui prévaut parmi les politiques est de faire de l’Algérie un pays cosmopolite et, selon l’expression en usage à l’époque, une « colonie européenne ». »125
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