Lettre d’Etienne Gilson à Henri Gouhier, 2 mai 1973, (Revue thomiste)







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Quelques témoignages au moment de la mort de Jacques Maritain

(Origine : Michel Fourcade, septembre 2014)

Lettre d’Etienne Gilson à Henri Gouhier, 2 mai 1973, (Revue thomiste). « Mon cher ami, Votre cœur ne vous a pas trompé. La mort de Jacques Maritain m’a fait beaucoup de peine et je vous remercie d’y avoir pensé. À partir du moment où vous en parlez, il me semble que l’idée d’une biographie de cet homme extraordinaire à maint égard ne pouvait pas ne pas vous venir à l’esprit, mais je dois ajouter que je n’y avais pas pensé de moi-même. Il y a longtemps que je suis hanté par une idée ; personne ne sera capable de tracer un portrait véridique de ce grand aventurier de l’esprit. Cette conviction profonde m’a toujours dispensé d’ajouter : pas même vous. La principale raison de ce sentiment est que Jacques Maritain est deux. Il me semble impossible de le séparer de Raïssa, et qui se flatterait de l’avoir connue ? Lâchant mes idées au hasard, je dirai qu’elle est à l’origine de tout le côté projudaïque et Léon-bloysien de Jacques, elle a lu S. Thomas avant lui et le lui a fait lire, elle est l’origine probable de l’intérêt croissant qu’il a porté à la théologie des dons du Saint-Esprit qui, jointe à son admirable talent poétique, l’a progressivement confirmé dans son esthétique de l’intuition poétique, qu’il me semble si difficile d’insérer dans une noétique aristotélicienne et thomiste, où même les principes sont vus par mode d’abstraction. Justement tout se tient dans la théologie du couple. La part qui lui revient en propre est son primat de la noétique sur l’ontologie, à laquelle il n’est venu que progressivement. C’est pourquoi, devenu thomiste sans avoir étudié S. Thomas, et par une sorte d’acte de foi, il a commencé par croire qu’il était urgent d’être antibergsonien pour être thomiste. Comme je manifestais mon intention de chercher à savoir en quoi consistait la doctrine de S. Thomas avant de prendre position sur sa valeur intrinsèque, il m’accusa d’historicisme, comme si la fin immédiate et propre de l’historien pouvait être autre chose que l’histoire ! Je me suis toujours souvenu du passage d’un de ses plus anciens livres où il se proclamait fièrement (non sans humour) « paléothomiste ». Thomiste par Jean-de-Saint-Thomas, Cajetan, Banez, etc., ce qui est exactement se proclamer néo-thomiste, car il n’y a jamais eu d’autre interprète fidèle de la pensée thomiste que S. Thomas lui-même, mais au moins faut-il avoir l’intention de puiser l’information à la source et de lui être fidèle. (.) Jacques était un combattant, au moins sur le champ de bataille des idées, son antibergsonisme était bien de lui ; je ne crois pas que Raïssa soit à son origine, en tout cas je ne le sais pas, mais je suis persuadé que toute son esthétique et une large part de sa mystique vient d’elle ou porte profondément empreinte la marque de son influence. Ils s’adoraient. J’en ai eu la preuve au sentiment de détestation que je lui inspirais (je parle de Raïssa) depuis que je m’étais permis de soutenir sur la poésie d’autres vues que les siennes……Mais ce saint homme (ce diable de saint homme !) est à la croisée de tous les chemins de son temps, courant tous les risques et gagnant tous les paris ».
Jacques Nobécourt, « Paul VI : un maître dans l'art de penser, de vivre et de prier », Le Monde, 2 mai 1973. « Rome. - Au cours de son allocution dominicale Paul VI a évoqué la figure de Jacques Maritain et a cité un fragment inédit d'un écrit récent du philosophe, provenant vraisemblablement d'un document envoyé au pape lui-même : « Tout professeur, dit Jacques Maritain, cherche à être le plus exact possible et le mieux informé dans la discipline qui lui est propre, mais il est appelé à servir la vérité d'une façon plus profonde. Le fait est qu'il lui est demandé d'aimer la vérité avant tout, comme l'absolu auquel il est entièrement consacré. S'il est chrétien, c'est Dieu lui-même qu'il aime ». En commentant cette citation (que nous retraduisons ici d'italien en français), Paul VI a qualifié Jacques Maritain de « grand penseur de nos jours, maître dans l'art de penser, de vivre et de prier », et il a affirmé que « sa voix et son personnage demeureront dans la tradition de la pensée philosophique et de la méditation catholique ». Parmi les commentaires de personnalités du Vatican, où l'émotion est très grande, citons celui de don Virginio Levi, directeur - adjoint de l'Osservatore romano, et personnalité très proche du pape. Il a notamment déclaré au Corriere della Sera que l'une des raisons du regret de cette disparition « est à rechercher dans l'amitié authentique de Maritain avec le pape Montini, qui admet lui-même qu'il doit beaucoup à sa pensée et, en général, à la culture française, de cette France catholique que le philosophe représentait avec beaucoup de dignité ». Tous les commentaires publiés dans la presse italienne ont un trait commun : ils vont bien au-delà de l'hommage rituel rendu à un penseur ou écrivain étranger de quelque notoriété. C'est véritablement un des jalons de la pensée et de l'évolution des catholiques italiens qui disparaît du présent, mais sans s'effacer du souvenir. Qu'il ait été ambassadeur de France auprès du Saint-Siège de 1945 à 1948, c'est au plus une anecdote. En revanche, c'est l'inspirateur même du « montinianisme » dont l'influence décisive est soulignée. Lorsque, à la fin du concile, en décembre 1965, Paul VI alla au-devant de Jacques Maritain et l'embrassa, avant de lui remettre le message aux intellectuels, le geste constituait une réparation publique et une marque de reconnaissance personnelle envers celui qui apparaissait son vieux maître, à l'égal du cardinal Bevilacqua. Très tôt, en effet, le jeune don Montini avait fait traduire en italien les Trois Réformateurs, en donnant à l'ouvrage une préface qui demeure une des clés de sa pensée. Plus tard, il se chargea en personne de la version italienne d'Humanisme intégral. Et la très violente attaque de la Civilta cattolica en 1956 contre Jacques Maritain résonnait aussi comme une mise en garde à celui qui, alors archevêque de Milan, en avait diffusé la pensée en Italie. On connaît bien peu - ou l'on méconnaît - en effet le rôle que joua Mgr Montini dans l'entre-deux guerres, alors qu'il était aumônier de la F.U.C.I. (organisme équivalent à la J.E.C. de l'enseignement supérieur). C'est de cette association, où se développe un des centres de l'anti-fascisme catholique, que sortirent bien des dirigeants et des cadres de la démocratie chrétienne. Et la pensée de Jacques Maritain, transmise par Mgr Montini, contribua de toute évidence à cette distinction des sphères entre le spirituel et le temporel. La violente réprobation exprimée en 1956 traduisait moins une volonté de redressement théologique qu'un retour de flamme, de cet « intégralisme » catholique qui semblait à Pie XII, sur la fin de son règne, la dernière garantie de l'ordre politique. C'est de ces mérites de Jacques Maritain que se souviennent les commentateurs : leurs réserves sur les dernières œuvres du philosophe n'entament pas leurs hommages au pouvoir libérateur d'Humanisme intégral, au moins en son temps. Certes, bien des équivoques se sont accumulées sur son nom qui tout comme celui d'Emmanuel Mounier, patronne ici ou là des groupes spontanés où ni l'un ni l'autre ne se reconnaîtraient. Et l'on voit maintenant surgir, dans la gauche contestataire, de violentes protestations contre les distinctions opérées par Maritain : elles auraient, dit-on, engendré la tiédeur et le modérantisme de la démocratie chrétienne. Cette disparition du philosophe, au moment où commencent à se dresser les bilans des dix premières années du pontificat de Paul VI, marque l'achèvement d'un cycle. Mais que le pape ait ou non jamais songé à créer avec Jacques Maritain le premier cardinal laïc de l'époque contemporaine, il demeure clair que cette inspiration se lit en filigrane bien net dans ses documents doctrinaux, encycliques ou homélies du mercredi, et dans son action même ».
Jean Lacroix, « L'apologie de l'intelligence », Le Monde, 2 mai 1973. « Jacques Maritain, avec Etienne Gilson et quelques autres, a réintroduit le thomisme en France et dans l'Université française. L'entreprise n'était pas facile. Il lui fallut défendre la valeur d'une tradition philosophique aussi bien contre les préjugés des « esprits systématiquement traditionalistes ou immobilistes » que contre ceux des « esprits systématiquement novateurs ». Lui-même s'est présenté modestement comme un simple commentateur de saint Thomas. Mais il ne faut pas le prendre à la lettre. S'il pose que « la synthèse thomiste existe », il croit aussi que la philosophie est toujours inachevée, qu'elle recommence sans cesse et exige un perpétuel effort d'invention. D'abord bergsonien, Maritain s'était détaché du bergsonisme entre 1908 et 1910. Mais, si âpres qu'aient été ses polémiques contre Bergson, il a toujours reconnu que c'est lui qui l'avait éveillé au « désir métaphysique ». Son premier article, publié en 1910, s'intitulait : « La science et la raison ». Il s'y proposait un double but : défendre l'intelligence, écarter le scientisme. C'est déjà un «  réalisme critique » qu'il proposait. Réalisme avant tout. Etre philosophe, c'est admettre « l'ordination essentielle de l'intelligence à l'être ». Nul ne fut plus naturellement métaphysicien. Tout en étant animée par une inspiration morale et même mystique, sa philosophie reste purement spéculative. Mais ce réalisme est critique parce qu'il examine les conditions de validité de l'appréhension de l'être par l'intelligence et distingue avec précision les divers modes de connaissance, ainsi que les degrés du savoir. Maritain, cependant, n'est pas un pur conceptualiste. Et il a vu dans le thomisme une philosophie de l'existence, sinon existentialiste. C'est ici que son orthodoxie thomiste a été parfois contestée. En réalité, sous son apparente raideur, sa pensée est extrêmement souple, et s'il a défendu la connaissance conceptuelle, c'est en ajoutant que l'intuition en était à la fois le fondement et le but. La raison n'est pas seulement logique : elle comprend une vie beaucoup plus profonde et obscure. « Si je suis thomiste, a-t-il dit, c'est parce qu'en définitive j'ai compris que l'intelligence « voit ». Certes, au sens le plus strict, le mot intuition désigne chez lui la connaissance que Dieu a de lui-même. Mais on peut lui donner une signification plus large dans le savoir humain. Il convient alors d'en distinguer trois formes. D'abord la perception sensible qui atteint la chose comme physiquement présente, en tant même que donnée dans l'existence actuelle et donc aussi présente dans sa singularité - et l'on songe à la notion d'intentionnalité et à la phénoménologie actuelle. Ensuite la perception introspective du moi-agent, qui ne saisit pas la nature de l'âme mais seulement son existence et son action - et l'on songe ici à Malebranche. Enfin, la perception intellectuelle proprement dite, car l'idée n'est pas ce que connaît l'intelligence, mais ce par quoi elle connaît intuitivement les objets de pensée qui sont dans les choses et qu'elle dégage par abstraction. D'où l'expression paradoxale et suggestive d'intuition abstractive.

Comme la métaphysique commande l'épistémologie, elle commande aussi l'esthétique et la philosophie politique de l'histoire. Dans Art et Scolastique (1920) et Frontières de la poésie (1926) notamment, Maritain a montré que l'intuition intellectuelle est à distinguer radicalement de celle du poète. L'intuition bergsonienne est plus poétique que métaphysique. Bergson n'a pas vu que la poésie est à l'opposé de la philosophie. Certes, elle est bien connaissance à sa manière, mais cette connaissance est opératoire : elle ne connaît pas pour connaître, mais pour produire. « La poésie est le ciel de la raison ouvrière ». L'intuition de l'artiste transforme le réel selon les lois de l'œuvre à faire. Sur le plan politique, tous les livres de Maritain tournent autour des idées de personne et de liberté. Les thèmes de Religion et Culture (1930) trouvent leur première expression dans Primauté du spirituel (1927) et leur achèvement dans Humanisme intégral (1936). Dans le premier livre, c'est la transcendance du religieux qui est mise en relief ; dans le second, c'est son incarnation dans le temps. Maritain est allé d'une libération du spirituel, payée elle-même de la désintégration de la chrétienté médiévale, à l'image future d'une intégration prospective qu'il appelait l'idéal historique d'une nouvelle chrétienté.

Maritain aimait répéter qu'il n'y a pour nous que deux sources : les sens et l'Esprit de Dieu. C'était définir la situation du philosophe : entre le temps et l'éternité. L'auteur d'Antimoderne ne correspond pas à l'image qu'on s'en fait trop souvent. Il a été mêlé à tous les grands combats de notre temps et s'est presque infailliblement trouvé du bon côté. C'est que pour lui l'intelligence était à la fois au-dessus du temps et engagée dans le temps. « La pensée catholique, écrit-il à la fin de Religion et Culture, doit être élevée avec Jésus entre ciel et terre, et c'est en vivant le paradoxe douloureux d'une fidélité à l'éternel jointe à la plus diligente compréhension des angoisses du temps qu'il lui est demandé de travailler à réconcilier le monde à la vérité ». Il avait adhéré en 1919 au Parti de l'intelligence, puis mieux compris que l'intelligence n'est pas un parti. Il avait beaucoup polémiqué sans aimer la polémique, et s'il regrettait parfois son âpreté c'était en ajoutant qu'une certaine dureté est nécessaire au service de la vérité. C'est peut-être en 1926, dans sa Réponse à Jean Cocteau, qu'il s'est le mieux révélé lui-même en prenant davantage conscience de sa mission : « J'ai été rivé à la pensée la plus dogmatique et la plus tranchante, la moins capable de conciliation et d'atténuation, à une doctrine absolument dure, pour essayer, en contemplant notre temps au passage, non pas de disperser, mais d'assumer, de réconcilier ».
Stanislas Fumet, « Un disciple de la Vérité », Le Monde, 2 mai 1973. « Jacques Maritain, la plus grande chance que la pensée catholique ait eue depuis plusieurs siècles. La France, de son côté, ne pourrait nommer un philosophe français plus digne d'elle. Et cependant qui, chez nous, pouvait s'en douter, hormis ces lecteurs privilégiés ou ces amis que son intelligence avait séduits et son cœur émerveillés, dans un pays où depuis longtemps on ne semble vouloir favoriser que des déserteurs ? A l'étranger, certes, Maritain avait plus de crédit, mais en France, où il aurait pu rendre d'inappréciables services à la civilisation humaniste pour l'éducation complète de l'homme moderne si gravement désemparé, lui a-t-on jamais donné vraiment le moyen de se faire entendre des « croyants » et des « incroyants », comme disent si bien, en les appelant à eux, les apôtres du marxisme ? L'Université ignorait à peu près le philosophe des Degrés du savoir qui s'appliquait, dans une lumière qu'il faut accepter si l'on désire en jouir librement, à distinguer pour unir, et non point à distinguer pour séparer - ou encore pour classer. Ses adversaires le respectaient, il est vrai, mais leur politesse à son égard empêchait tout dialogue sérieux sur le chemin proprement philosophique où il était redoutable. Nous étions amis depuis 1920. Et ce n'est pas par hasard que nous l'étions devenus, mais parce que Jacques Maritain, filleul de Léon Bloy, apportait à son époque un trésor tout à fait exceptionnel. Si je n'avais pas rencontré Maritain, aurais-je su apprécier ce que l'on appelait la pensée de saint Thomas ? On ne consultait presque plus saint Thomas directement. On le laissait s'empoussiérer dans des bibliothèques réservées à des théologiens coupés du monde. Il me semblait dans mon jeune âge que, si l'on se conformait aux définitions thomistes, c'était par routine, l'Eglise catholique ayant pris l'habitude – et Léon XIII lui en avait rappelé l'opportunité - de recourir aux articles de la Somme théologique pour répondre à toutes les questions plus ou moins délicates qu'avaient le droit et le devoir de se poser les esprits de bonne volonté qui ne demandaient qu'à s'aligner sur les positions du Vatican. Rome, dans ses encycliques, en se référant toujours à la sagesse de saint Thomas d'Aquin, commençait à irriter les modernistes fin de siècle, qui trouvaient un peu cavalière - disons paternaliste - cette manière de vous asséner du magister dixit pour mettre fin aux turbulences de l'imagination spéculative. C'est alors qu'était apparu le germe d'un certain néothomisme - disons en gros celui du cardinal Mercier - qui se voulait moins fermé à l'esprit scientifique du temps et préconisait une interprétation plus moderne des thèses de saint Thomas d'Aquin. On tenterait ainsi de conjuguer un respect intellectuel mieux motivé de la pensée du grand Docteur de l'Eglise avec un accommodement en souplesse des principes qui régissent sa doctrine. Eh bien ! voilà, précisément, ce qui ne pouvait séduire un pur philosophe comme Jacques Maritain, débarqué en 1905 sur le rivage de la loi. Jeune agrégé de philosophie, il venait de l'incrédulité, sinon de l'athéisme ; petit-fils de Jules Favre, sa famille très liée aux Renan, lui-même ami intime d'Ernest Psichari et du Péguy dreyfusiste... Formé dans la philosophie de son maître Bergson, il avait soudain reçu la grâce de la foi, en communion avec sa jeune femme, israélite d'origine russe, qui étudiait les sciences naturelles à la Sorbonne aux côtés de Jacques Maritain lui-même, que cette discipline avait toujours attiré - et non pas du tout à la suite de raisonnements philosophiques, mais parce que le mystère de Dieu, mysterium fidei, les avait inexplicablement orientés vers ce mendiant d'amour qu'était Léon Bloy. Ils ne pouvaient pas admettre que l'auteur de Désespéré, du Salut par les Juifs, de ta Femme pauvre, fût privé de la gloire que son art littéraire méritait et de son pain quotidien, dont il avait naturellement besoin pour lui, sa femme et ses deux filles.

A la suite de leur baptême, si Raïssa n'avait pas eu l'attention éveillée par quelques pages de saint Thomas qu'elle s'était empressée de signaler à son mari, celui-ci eût été capable de renoncer - du moins le croyait-il - à toute enquête philosophique plus poussée. Ils avaient ensemble trouvé Dieu ; ils étaient prêts, l'un et l'autre, à tout abandonner pour suivre aveuglément une Volonté qui les distançait d'un infini et qu'ils sentaient adorable ; l'abêtissement et l'eau bénite de Pascal ne les eût nullement horrifiés. La Providence voulut que leur destin fût autre et qu'un religieux dominicain, le Père Clérissac, à qui ils s'étaient adressés pour les diriger, les lançât sur une piste opposée : il leur conseilla l'étude de l'Aquinate et, dès lors, la Vérité, cette vérité qu'ils avaient cherchée d'instinct, mais très ardemment, dans les ténèbres - sans oser croire qu'il était possible de l'atteindre, - après leur contact avec le génie et la pauvreté de Léon Bloy qui les enflamma, et sa soif de justice, qui était déjà la leur, et qui ne faiblira jamais chez eux, bien au contraire, - cette Vérité, qu'ils avaient besoin d'aimer plus qu'eux-mêmes, se dégagea progressivement de la gangue d'obscurité où notre ignorance l'enferme, et c'est le Docteur angélique, saint Thomas, qui la fit resplendir pour eux avec une autorité capable de la rendre présente nécessairement partout. Il ne s'agissait point pour ces baptisés dans l'Esprit d'utiliser le formulaire thomiste afin de sauver, aux yeux du monde moderne, l'honneur de l'Eglise, mais de manger le pain de la lumière, de découvrir à l'univers un ordre cohérent, un sens à l'histoire, et de s'enivrer de la beauté comme de la bonté de l'Etre. C'est parce que le Docteur angélique a fait toucher aux Maritain l'existence de la Vérité, celle de la Bonté, celle de l'Unité, celle de l'Etre, en un mot, que le philosophe qu'était Maritain n'a pas craint de prendre, en face de ses collègues, le qualificatif désuet de thomiste. Sa seule raison de se définir thomiste est que saint Thomas lui était apparu comme le philosophe de la Vérité première et dernière, celui qui lui soumet radicalement, c'est-à-dire amoureusement, son intelligence, et trouve dans cet acte le secret de sa liberté - comme libération de la confusion des idées. Mais, à son tour, il ne veut être, comme saint Thomas, que disciple de la Vérité, et c'est à ce titre seul qu'il peut se dire thomiste. Il ne fallait pas lui parler d'être un néothomiste, comme le Petit Larousse ne manque pas de le faire, il eût froncé le sourcil.

On ne peut nommer Jacques sans évoquer Raïssa, tant leur collaboration a été si parfaite et si féconde. Raïssa était entièrement unie à sa pensée et elle a été entièrement unie à son action, car chez Jacques, guidé par le même esprit de contemplation et de poésie, il y avait toujours le souci de conquérir une terre inexplorée à cette Vérité qui en a faim, et ç'a été le sens même de leur apostolat que cette extension du domaine du vrai, là où le vrai est inconnu ou mal connu. « Je suis, a-t-il avoué à la fin de sa vie, une espèce d'agent secret du Roi des rois dans les territoires du prince de ce monde, prenant ses risques à l'instar du chat de Kipling, qui s'en allait tout seul... » Agent secret, Jacques Maritain, de 1920 à 1930, à 1940, n'avait pas jeté le masque avec autant d'humour. Disons que l'Esprit-Saint cachait mieux son jeu. Le fait n'en reste pas moins que, lorsqu'il vous invitait chez saint Thomas, ce n'était pas en compagnie d'entendements rétrogrades, compassés, pusillanimes... « Hein ? C'est dans cette claire bâtisse neuve (à l'époque on eût pu dire futuriste) qu'habite votre saint Thomas ? » C'est qu'il n'y a rien de plus neuf que ce qui est éternel, eût-il pu répondre. Voilà ce que fut pour nous Art et Scolastique, voilà ce que fut pour un plus grand nombre Humanisme Intégral, ce que fut la Lettre sur l'indépendance, ce que furent Frontières de la poésie et la Lettre à Jean Cocteau ; ce que furent les Sept leçons sur l'Etre (ne parlons même pas de ces Degrés du savoir, distinguer pour unir, son œuvre capitale, sa basilique philosophique), ce qu'est Dieu et la permission du mal, ce qu'aura été, car l'œuvre était in progress, cette suite de séminaires sur l'Evolution à laquelle un philosophe plus qu'octogénaire s'est attelé pour répondre enfin à l'immense question posée sur des bases intellectuellement si fragiles par Teilhard de Chardin, l'immense question moderne, jugée si délicate par les chrétiens depuis un bon siècle, de la genèse de l'humanité et de la place privilégiée de l'homme à cause de son âme dans le développement de l'existence des êtres. Si Jacques Maritain est parvenu, comme j'en ai la conviction, à débrouiller cet écheveau que le progrès des connaissances scientifiques et la démission des philosophes de la nature, et la mauvaise conscience de théologiens éperdus, ont laissé entre les mains de ce sage parmi les sages, même s'il a interrompu ce travail provisoire, le catholicisme lui devra une fière chandelle ! Enfin, quand l'Eglise ne sait plus trop dans quel miroir il faut qu'elle se regarde pour se reconnaître, Jacques Maritain, avant de disparaître, a tenté de faire son Portrait.

Sans doute il n'a pas eu que des partisans dans le monde catholique. bien que ce soit au milieu des clercs, inter cleros, qu'il ait été le mieux reçu. Mais, là encore, les passions politiques règnent, et comment eût-il plu aux uns sans désorienter les autres ? Tels qui étaient ses frères d'armes à l'époque où nos relations commencèrent qui tournèrent le dos lorsque le drame de l'Action française éclata - je veux dire la condamnation de ce mouvement auquel étaient attachés tant de catholiques de bonne foi, qui croyaient, en suivant Maurras, défendre les intérêts de l'Eglise. Jacques Maritain, comme beaucoup de convertis échappés à un affreux désordre intellectuel, avait cru trouver dans l'ordre de chrétienté, qui semblait pouvoir subsister encore, le meilleur modus vivendi pour un esprit comme le sien au milieu d'un monde se déchristianisant, et que devait retenir une certaine cohérence de structures établies pour ne pas retourner au chaos où les ennemis de l'Eglise n'eussent pas craint de l'entraîner. Mais le philosophe, dans son Carnet de notes, s'est expliqué. Il avait fait confiance au Père Clérissac, il avait admiré en Charles Maurras une intelligence de la chose politique dont aucun de ses adversaires ne faisait preuve alors. Quand l'Action française fut condamnée, il essaya auprès de Maurras de plaider la haute raison de l'Eglise et, celui-ci refusant toute soumission - son agnosticisme religieux ne lui faisant pas une obligation de s'incliner devant un pape qui ne l'intéressait que comme symbole d'une autorité occasionnelle, - le philosophe thomiste sur lequel les gens d'Action française avaient compté, rompit aussi, et définitivement, avec une cause qui avait eu sa sympathie de néophyte, mais non son adhésion. Cette rupture produisit une scission (tant il est vrai que la politique est une source de division, comme les eaux de contradiction - dont parle la Bible) dans les rangs des catholiques de France, et cette blessure se fera plus profonde, neuf ans après, avec la guerre d'Espagne lorsque des catholiques bien plus nombreux que n'en comptait l'Action française - et parmi ceux mêmes qui s'étaient détachés de Maurras et de son mouvement - virent « rouges » les chrétiens qui ne prenaient pas parti pour le général Franco et qui, déjà assistaient de loin à la montée du péril nazi, ou simplement fasciste. Alors Maritain se sentit plus isolé que jamais - il avait cependant autour de lui, sans les rechercher, les démocrates, les progressistes ceux qui découvriront dans Humanisme intégral des raisons d'espérer en une Eglise libérée de toute servitude temporelle, de toute vassalité à l'égard de l'Etat quel qu'il soit, de toute ambition d'hégémonie temporelle enfin.

La chrétienté avait vécu : elle avait eu ses grandeurs et ses misères. Historiquement elle avait joué un rôle sans égal, mais, en dépit de la splendeur quelle avait édifiée, des pages inoubliables qui avaient été écrites sous son égide, elle n’en avait pas moins à son compte bien des outrances, bien des injustices, d'inexpiables faux pas. En un mot, elle était autre chose que l'Eglise, même poussant à son ombre ; la part de l'homme en elle, pour éclairée d'en haut qu'elle fût, n'était pas exempte de compromission avec le péché, et la grande erreur du monde occidental avait été de la confondre avec l'épouse du Christ. Aujourd'hui cette distinction paraît naturelle, comme allant de soi. Il y a cinquante ans, elle se faisait encore mal : les perspectives de l'Eglise n'étaient pas dégagées comme elles le sont à présent. Ici, il est évident que Jacques Maritain a gagné. Mais il reste à savoir si les conséquences que les clercs tirent de cet aggiornamento dont, bien avant le concile, il a donné un premier plan dans son Humanisme intégral, doivent aller dans le sens de son esprit. Le Paysan de la Garonne, qui pourrait dire mieux que M. Teste et Paul Valéry lui-même que la bêtise n'est pas son fort, déclarait toutefois, parce qu'il était chrétien (et c'est l'exergue de l'ouvrage emprunté par l'auteur à un proverbe chinois), qu' « il ne faut jamais prendre la bêtise trop au sérieux ». Comme quoi Jacques Maritain n'a jamais été tout à fait compris de ceux qui peuvent penser aujourd'hui que le Maritain de 1967 diffère du Maritain de 1936, comme d'autres lecteurs qui, en 1936, jugeaient que le Maritain de cette époque trahissait celui qui avait écrit Antimoderne en 1921-1922. La vérité est que la pensée du philosophe thomiste, étroitement attachée au réel - à ce point que l'on a pu lui donner le nom de réalisme critique, - s'est toujours affinée en se développant, et purifiée en s'enrichissant avec l'accroissement des sciences et leurs plus libres investigations, et affermie sous la dureté des événements historiques que son regard doit plus hardiment percer. Si bien que son expérience, loin d'amoindrir la netteté de ses positions, n'a fait que montrer au philosophe de l'Etre - et à nous-mêmes qui lui avions accordé notre confiance - que les principes qui l'ont guidé ne plient pas à l'épreuve du temps, ne s'émoussent pas sous la lime de l'histoire, mais conservent toute leur efficacité sur l'esprit qu'ils délient et sur le cœur qu'ils illuminent.

Maritain n'a pas eu au début un public très étendu. Son thomisme, en France, le faisait exclure du circuit de la pensée vivante. Vivante ? O ironie ! Disons simplement de la pensée officielle. A la Sorbonne, on a longtemps, on a très longtemps feint de le tenir pour négligeable. Il était une raison à cela : les philosophes patentés, encore que Maritain ne fût pas moins gradé qu'eux, les philosophes de la génération de M. Brunschvicg, connaissaient toutes les philosophies historiques, hormis une seule, qui avait pourtant fait la gloire de l'Occident, la philosophie de saint Thomas d'Aquin. A l'heure actuelle, pour dire vrai, la situation n'a pas tellement évolué, en dépit des apparences. C'est beaucoup la puissante personnalité d'Etienne Gilson qui a obligé l'Université à regarder avec un peu moins de dégoût du côté de la scolastique, si décriée, qui n'a rien à faire hors de l'Eglise, comme, autrefois, le salut. Même pour le combattre, on n'étudie pas saint Thomas, sous prétexte que saint Thomas, d'une part, est un monde, et que, d'autre part, ce « monde » n'est plus habité par les esprits qui nous entourent, et au bénéfice desquels nous produisons de la connaissance. Autrement dit, nos clients ne demandent pas cet article-là. Mais il se trouve que Jacques Maritain, sans y mettre de malice, a eu la bonne idée, assez tôt, de frapper à la porte des artistes et, à travers eux, des poètes. Art et Scolastique, dès que cette brève étude parut dans la revue les Lettres, en 1919, puis en librairie, chez Rouart, en 1920, fut, pour plusieurs d'entre nous, un événement ou, comme on a coutume de dire, une révélation. « La beauté est le resplendissement de la forme sur les parties proportionnées de la matière ». Et encore : « L'Art, qui rectifie le Faire et non l'Agir, se tient donc en dehors de la ligne humaine, il a une fin, des règles, des valeurs, qui ne sont pas celles de l'homme, mais celles de l'œuvre à produire. Cette œuvre est tout pour l'Art, il n'y a pour lui qu'une loi, - les exigences et le bien de l'œuvre (...). Mais si l'Art n'est pas humain par sa fin, il est humain, essentiellement humain, par son mode d'opérer. C'est une œuvre d'homme qu'il s'agit de faire, il lui faut la marque de l'homme ». Ainsi Maritain dénonçait l'erreur de l'académisme, qui tend à effacer de l'œuvre, où l'on plaque une perfection arbitraire venant d'un idéal extérieur, toute trace d'émotion humaine. Voilà quel a été le commencement du prestige de Maritain dans les milieux laïques. Il avait déjà un groupe de jeunes philosophes, prêts à le suivre - des théologiens, des spirituels. Mais il n'existait guère de pont entre eux et les artistes, ou les poètes dits d'avant-garde, les vrais, ceux qui honorent le passé en ne faisant pas du passéisme. On rencontre alors chez Jacques Maritain, outre Georges Rouault, ami de longue date, et Maurice Denis, peintre catholique en vogue, sa fille, Noëlle, qui s'engagea dans la petite troupe des étudiants en philosophie scolastique. Des peintres comme Gino Severini, un des premiers futuristes, Jean Hugo, puis, plus tard, Chagall, sur qui Raïssa écrira un beau livre, Marc Chagall ou l'orage enchanté, et même le sculpteur Arp, ou Marek Szwarc, juif chrétien, et des peintres de diverses nationalités. Un musicien comme Erik Satie, qui fut introduit chez les Maritain par Georges Auric, Roland-Manuel, puis Arthur Lourié, qui venait de la Russie bolchevique, et dont Maritain a si vite mesuré l'importance. Enfin, avec Cocteau, Maurice Sachs, qui a su garder aux Maritain une place sans tache dans son cœur abîmé. Et puis, à l'époque du Roseau d'or, les écrivains, - des auteurs de tous les pays - fréquentent la maison de Meudon. C'est en 1924 que nous avons fondé, Jacques Maritain, Henri Massis, Frédéric Lefèvre et moi, cette collection, qui fit grand bruit, où parurent les Trois réformateurs de Jacques Maritain, sa Primauté du Spirituel, et tant de livres français ou étrangers qu'il faudrait tous citer, plus les chroniques du Roseau d'or.

Enfin, il y avait cette autre activité de Jacques Maritain, qui ne concerne plus la chose à produire, l'œuvre à faire, mais l'éthique de l'homme et son engagement - un art, oui, si l'on veut, mais alors le « totum bene vivere » de saint Augustin - le « pur usage que l'homme fait de sa liberté ». Jacques Maritain, qui n'est pas un philosophe réservé aux seuls artistes, sera un conseiller sans rigidité ni système, car il n'ignore pas - la sagesse que recherche et à laquelle aboutit sa philosophie du réel ne le lui laisse pas ignorer - que les voies de Dieu sont toujours impénétrables, que son respect de la liberté humaine est infini et que la grâce a heureusement sa « poétique » irrévélable, la poétique divine, qui nous surprend volontiers et se plaît à déjouer les calculs d'Animus, le mari d'Anima, selon la géniale parabole de Claudel. Comme philosophe, en intellectuel appliqué à connaître la vérité, il pourchasse l'erreur avec une vigilance angélique. L'erreur est une abstraction qui ne lui fait pas pitié. Il est intolérant à tout ce qui, dans l'esprit, offense la sainteté de l'Etre ; mais, quand il aborde les hommes, son prochain, voilà qui est tout différent : il les considère avec une bienveillance fraternelle, toujours prêt à redresser le " tort " en essayant de ne pas casser le sujet. Avec le temps, Jacques Maritain - plus impatient peut-être dans son jeune âge, lorsqu'il venait de se convertir et ne désirait que rallumer à sa flamme ardente les innombrables lampes qu'il voyait éteintes autour de lui - est devenu, oh ! je n'écrirai pas plus tolérant, mais plus accessible aux raisons personnelles que chacun peut avoir de ne pas se jeter à corps perdu et âme gagnée dans la lumière libératrice. Avec le temps, dis-je, Maritain aura davantage remarqué l'épaisseur des obstacles qui se dressent, par la faute de notre humanité incorrigible, même et plus sinistrement dans la mesure où elle prend ses passions pour chrétiennes, devant les portes ainsi barbouillées de l'Eglise de Dieu. Maritain, qui savait mieux que tous écouter, ne demandait qu'à « apprendre » de ses semblables. Il n'y a pas de tristesse dans le départ de Jacques Maritain, un philosophe qui, jusqu'à la dernière limite de ses forces, a continué à remplir sa tâche. Mais ce que nous désirons, c'est qu'il soit plus que jamais non un mort mais un vivant ».
Time, 7 mai 1973. « Died. Jacques Maritain, 90, seminal figure of Roman Catholic thought and the 20th century's leading interpreter of Thomist philosophy; in Toulouse, France. Born a Protestant in Paris, Maritain converted to Catholicism at 23 and became the principal intellectual defender of 13th century Catholic Philosopher St. Thomas Aquinas. During the '30s, he emerged as a symbol of Christian humanism, the concept that the church, while holding to its theological precepts, should support political democracy and social reform. Regarded as radical thinking at the time, this caused some conservative Catholics to consider him a near-heretic. In 1939, he left his post at Paris' Institut Catholique and came to the U.S. as philosophy instructor at Princeton and Columbia. During World War II he played a prominent role in urging U.S. support for the Free French, and in 1945 he went to Italy as France's ambassador to the Vatican. Maritain produced more than 50 books, including True Humanism, Reflections on America and, in 1968, his most conservative, The Peasant of the Garonne, written in seclusion near Toulouse, where he had lived for the past dozen years since the death of his wife. Among those influenced by Maritain's teachings were generations of philosophers, scholars and religious leaders. « I am a disciple of Maritain », Pope Paul has said. « I call him my teacher ».
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