Paru in thérapie Psychomotrice et recherches, Hors série, 2004 pp. 408-443







télécharger 237.59 Kb.
titreParu in thérapie Psychomotrice et recherches, Hors série, 2004 pp. 408-443
page1/7
date de publication15.12.2016
taille237.59 Kb.
typeRecherche
a.21-bal.com > loi > Recherche
  1   2   3   4   5   6   7


B
Paru IN Thérapie Psychomotrice et recherches, Hors série, 2004 pp.408-443
enoit LESAGE

5, rue de la côte du moulin,

25 370 Le Moulin Sous Jougne

06 74 51 37 84

E-Mail : benoit.lesage@irpecor.com

Site : www;irpecor.com

ITINERAIRE POUR UN DIALOGUE CORPOREL STRUCTURANT :

QUEL CORPS, QUEL ENGAGEMENT, POUR QUELLES STRUCTURES DE TRAVAIL et AVEC QUELS OUTILS ?

La notion de dialogue corporel structurant renvoie à un parcours personnel qui m'a mené de la pratique sportive à la danse et la chorégraphie, des techniques de conscience du corps et de lecture du mouvement à la clinique psychocorporelle, de la médecine aux sciences humaines, intégrant l'apport oriental de l'énergétique chinoise (acupuncture) et les approches somatiques de thérapie manuelle. Le voyage peut sembler erratique, et il l'est si l'on se contente d'une vague conscience intuitive des liens transversaux qui se créent et des structures communes entre ces approches. Il faut bien sûr les approfondir, les préciser; c'est ce que je tente de faire, travail éclectique, dont le risque est la dispersion et la perte de cohérence, ou encore une confusion globale qui gomme les nuances et désarticule les concepts. Mais je prends ce risque en cherchant des liens, des convergences, ce qui m'interdit de nommer précisément ma démarche, de l'étiqueter.

On enseigne paraît-il ce qu'on a besoin d'apprendre. Au delà cependant d'une motivation intime, il faut dépasser une problématique personnelle et s'extraire d'une histoire trop localisée sans s'en couper. J'envisage ici les bases et fondements d'une démarche qui ne se veut en aucun cas méthode ou école de pensée et surtout ne se prétend pas achevée. Ce sera une "visite de chantier" qui tente d'intégrer des éléments qui peuvent sembler hétéroclites. L'interdisciplinarité n'a pas forcément bonne presse en France, mais mon souci est de relier des sources théoriques que je mets en regard de mon expérience corporelle et clinique, qui demeure mon point de référence fondamental. J'ai durant quelques années pensé et énoncé qu'un travail sur le corps en impliquait de facto un autre sur le psychisme, le remplaçait dans certains cas, ayant sans doute tiré des conclusions hâtives au contact d'approches par ailleurs remarquables, telles que l'eutonie, la méthode Feldenkrais, l'ostéopathie… S'il me semble acquis que ces pratiques constituent une excellente formation, en ce qu'elles obligent à un véritable état des lieux du corps et en permettent la construction, et qu'elles constituent un passage hautement souhaitable -si ce n'est obligé- pour qui prétend engager une relation d'aide à médiation corporelle, il m'est apparu aussi que leur empirisme parfois mal dissimulé derrière un discours qui leur est trop adhérent, ne rend pas compte de la complexité et de la richesse des questions qu'elles soulèvent.

Je m'efforce ici de sonder les bases d'une pratique, qui s'ancre dans le nouage entre trois champs conceptuels qu'il faut distinguer avant d'envisager les circulations. Tout d'abord le support biologique, le vivant en général, théorisé par la psychophysiologie. Cela concerne l'organisation anatomo-fonctionnelle du corps en mouvement, donc le champ de la sensori-motricité. Le cadre général philosophique qui m'a été donné est celui de la phénoménologie de l'expérience corporelle, avec comme références principales Husserl, Heidegger, Levinas, Merleau-Ponty, mais aussi des auteurs tels que Wallon, Schilder, Rosenfield. Enfin, le champ de la symbolisation corporelle, éclairé pour moi des concepts psychanalytiques, avec en premier lieu l'image du corps, l'enveloppe et les premiers contenants, l'axialité, l'imaginaire et l'étayage mutuel entre psychique et corporel. Ce triple ancrage tient à quelques rencontres déterminantes : du côté de l'organisation sensori-motrice et anatomo-fonctionnelle, Odile Rouquet, connue par les danseurs pour avoir apporté en France la lecture du mouvement1, et surtout Godelieve Struyf, créatrice de la systématique des chaînes musculaires dont je parlerai dans la seconde partie. Du côté de la phénoménologie, c'est J. Rivolier, directeur du département de psychologie de l'université de Reims, qui fut mon directeur de thèse pendant huit ans, et qui m'a inculqué les bases d'une méthodologie rigoureuse, de même que Mireille Arguel, danseuse, directrice du département de danse de Paris V2, qui a co-dirigé ma thèse de Sciences Humaines. Enfin, pour le champ psychanalytique, je l'ai d'abord approché par une démarche personnelle. C'est qu'en effet, après une douzaine d'années de pratique j'ai pu constater stupéfait, lors d'une séance, comment la verbalisation pouvait dénouer des tensions et libérer des mouvances tissulaires jamais ressenties auparavant. L'un n'allait pas sans l'autre. D'où l'idée d'une nécessaire circulation entre différentes sphères qui résonnent entre elles sans se confondre, et qui peuvent se dissocier dans la pathologie, ou ne pas s'articuler dans un développement dysharmonieux. Car d'où viendrait sinon que l'on rencontre des pratiquants de très haut niveau dans les différentes approches évoquées plus haut, ou encore en yoga, taï-chi-chuan ou autres arts nourris de sagesse orientale, et qui par ailleurs démontrent une immaturité affective ou relationnelle qui laisse à penser que des pans entiers de leur personne sont restés en jachère ? Ce qui semble dès lors indispensable, outre la pratique elle-même dont il n'est pas question de se dispenser, c'est le nouage entre des sphères somatique, psychique –qui englobe l'affectif, l'imaginaire mais aussi le cognitif- et j'ajouterais énergétique. Ce dernier terme est à manier avec précaution, et je me réfère ici essentiellement à l'énergétique chinoise dont la systématisation me semble le système le plus abouti et dont les applications cliniques en médecine traditionnelle (acupuncture, shiatsu) sont indiscutables3.

Quelques expériences fondatrices me semblent importantes à mentionner. En premier lieu, celle du caisson d'isolation sensorielle. Le dispositif a fleuri chez nous dans les années 70-80, et permettait de s'immerger dans de l'eau suffisamment salée pour y flotter, à température du corps, dans le noir complet. J'y ai constaté à quel point l'image de ce corps qui me semblait acquis est labile4 : une jambe qui s'allonge démesurément, un dos qui semble s'estomper, d'étranges distorsions dans la perception du moindre mouvement, m'ont convaincu que mon corps de danseur, d'ancien sportif de compétition, investi d'un savoir universitaire, pouvait se déstructurer en quelques minutes. L'expérience -ludique dans ce cadre- m'a permis d'appréhender ce que peut être l'angoisse de personnes n'ayant aucun moyen pour affronter ces éprouvés.

Du côté de l'eutonie, de l'ostéopathie ou encore de la fasciathérapie, c'est la prise de conscience d'une vie des tissus, de leur respiration, d'une mouvance qui traverse constamment le corps, et de son importance tant dans le mouvement que dans l'équilibre psychosomatique qui m'ont nourri. L'écoute de ces processus intimes m'a semblé aller beaucoup plus loin que la relaxation que je connaissais par ailleurs. Elle conférait une dimension supplémentaire, en inscrivant un travail d'ajustement tonico-émotionnel dans une relation très riche, sensorielle et empathique sans être fusionnelle. C'est avec le toucher tel qu'on le pratique dans ces approches que j'ai abordé des enfants polyhandicapés ou autistes, recueillant souvent l'étonnement enthousiaste des équipes soignantes en butte avec ces enfants réputés intouchables5

Une autre expérience primordiale qui fut au centre de mon travail pendant une dizaine d'années, est celle de la danse et de la chorégraphie. C'est Suzon Holzer qui m'a initié à la poétique du mouvement, me montrant comment un geste pouvait s'affiner, se nuancer à l'infini, incarner et mettre à jour à la fois un imaginaire insoupçonné. Ce n'est plus l'expression comme extériorisation sur le mode corporel de contenus psychiques, mais la naissance d'un monde qui arrive à l'existence et se dé-cèle à partir du travail du corps. Cette voie somato-psychique s'est ensuite reliée pour moi à la phénoménologie husserlienne, dont les concepts d'intentionnalité et de réduction6 m'ont semblé particulièrement féconds.

Une question essentielle est de savoir de quel corps nous parlons, que ce soit en clinique ou dans les approches citées plus haut. En termes universitaires, quel modèle du corps nous travaille, nourri par quoi, aboutissant à quels instruments et quelles visées ? La question est loin d'être abstraite; elle conditionne notre attitude, nos propositions, et la façon dont nous reprenons et lions des savoirs empiriques reçus çà et là. C'est donc inspiré par tout cela que j'entreprends ici un tour d'horizon des sources théoriques et pratiques de ma démarche; les références sont nombreuses, mais ne sont pas un paravent. Il s'agit toujours d'une rencontre, d'une reprise pour compte personnel à partir de laquelle s'effectuent les dérives associatives qui détournent parfois l'intention de l'auteur cité.

Du côté de la pathologie, la fréquentation de personnes polyhandicapées et/ou autistes m'a confronté à la désorganisation, ou plutôt la non-organisation des corps, le défaut d'articulation entre les trois sphères pré-citées. Nous assistons avec ces populations à l'aube des choses, lorsque se cherchent des limites, une spatio-temporalité, une axialité, une forme tonique qui n'est pas encore stabilisée, pas encore id-entité. Habitué à travailler avec des danseurs ou des sportifs de niveau professionnel, cette rencontre ne pouvait qu'interpeller et poser la question des fondements, de la mise en place et en jeu de ce qui trame notre vie quotidienne. Paradoxalement, ces deux populations dont on pourrait penser qu'elles nous présentent l'échelle entre un degré zéro d'organisation et une haute technicité parfaitement instrumentalisée, ont des points communs. La réaction de jeunes sportifs de niveau national à des approches psychocorporelles indique qu'ils sont eux-mêmes en grande difficulté dans leur relation au corps. Les danseurs sont eux aussi -peut-être plus consciemment parfois- travaillés par des questions d'identité corporelle et souvent des angoisses de morcellement et de mort. Ce qui laisse accroire qu'il faut une bonne raison pour se lancer dans un travail de redéfinition du corps aussi radical que ne l'imposent ces pratiques à un niveau professionnel.

Quant à ma rencontre avec le champ de la psychomotricité, elle s'est imposée peu à peu, sans que je ne me sois jamais promu spécialiste en la matière. Les psychomotricien(ne)s sont la population avec laquelle j'ai le plus à faire, et le plus d'affinités, dans mes interventions ou actions de formation, sans doute parce que nous naviguons dans les mêmes eaux, avec des concepts communs.

  1   2   3   4   5   6   7

similaire:

Paru in thérapie Psychomotrice et recherches, Hors série, 2004 pp. 408-443 iconAlternatives Economiques (Hors série)
«La petite Fille du Vél d’Hiv», D’Annette Müller; «Une poupée à Auschwitz» de Mosche Schulstein; «Si c’st un homme» de Primo Levi;...

Paru in thérapie Psychomotrice et recherches, Hors série, 2004 pp. 408-443 iconRobin Orlyn (Afrique du Sud), Salia Sanou et Seydou Boro (Burkina...
«Le Sacre du printemps» (2004) et Abou Lagraa «Cutting Flat» (2004) le tour du monde n°01

Paru in thérapie Psychomotrice et recherches, Hors série, 2004 pp. 408-443 iconÉditorial
«Cellules souches pluripotentes et thérapie cellulaire des pathologies rétiniennes»

Paru in thérapie Psychomotrice et recherches, Hors série, 2004 pp. 408-443 iconProtocoles de la communication et de la consultation des collections hors exposition

Paru in thérapie Psychomotrice et recherches, Hors série, 2004 pp. 408-443 iconDu conseil municipal du 27 septembre 2004

Paru in thérapie Psychomotrice et recherches, Hors série, 2004 pp. 408-443 iconRecherches scientifiques

Paru in thérapie Psychomotrice et recherches, Hors série, 2004 pp. 408-443 iconCommissaire-priseur Agrément n° 2004. 513

Paru in thérapie Psychomotrice et recherches, Hors série, 2004 pp. 408-443 iconRecherches amérindiennes au Québec

Paru in thérapie Psychomotrice et recherches, Hors série, 2004 pp. 408-443 iconRecherches sur les cadrans solaires

Paru in thérapie Psychomotrice et recherches, Hors série, 2004 pp. 408-443 iconThèse d’Habilitation à diriger des recherches (hdr)







Tous droits réservés. Copyright © 2016
contacts
a.21-bal.com