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Le journal du conseil régional du Languedoc-Roussillon NOS RACINES EN SEPTIMANIE. EPISODE 1 Des origines au VIIIe siècle
A la croisée des chemins entre Méditerranée et Atlantique, péninsules ibérique et italique et Europe du nord, le Languedoc méditerranéen et le Roussillon ont été, et sont toujours, un carrefour privilégié recevant des apports culturels novateurs, venus enrichir le fonds autochtone. De ce brassage de civilisations naquit une région exceptionnelle, dotée d'héritages multiformes encore palpables aujourd'hui, tant sur le territoire que dans les spiritualités et les traditions. Or, une période charnière de son histoire est à l'origine de ce caractère exceptionnel : celle où la région s'appelait Septimanie. Aux époques préhistorique et protohistorique, de nombreuses peuplades occupèrent la région, entre Rhône et Pyrénées. Aux Gaulois s'ajoutèrent les Ibères et les Ligures venus d'Europe occidentale qui se disputaient le territoire, tandis que Phocéens, Phéniciens et Carthaginois fondaient des comptoirs commerciaux sur la côte. Puis ce furent des Celtes venus de Belgique : les Volques Tectosages et Arecomiques. Chaque peuple apporta savoir-faire, coutumes et culture : vers 6000 avant notre ère apparurent les premiers villages, tombeaux, tumulus, cairns et dolmens. Vers 2100 av. J.-C., la métallurgie fut importée dans les Cévennes, sans doute par des navigateurs phéniciens. Trois siècles plus tard, les Ligures construisaient maisons de bois et charpentes, plaçaient des sépultures individuelles sous la pièce d'habitation principale et dessinaient des ornementations géométriques. Vers 1500, les Celtes conçurent, quant à eux, des décors où hommes et animaux étaient représentés. Gaulois et Ligures se mélangèrent et bâtirent de grands oppida. Au IVe siècle av. J.-C., les Volques Arecomiques chassèrent ou soumirent les autres peuples et firent de Nîmes leur capitale, construisant leur oppidum sur le Mont Cavalier, l'une des sept collines surplombant la cité. Le géographe grec Strabon et le naturaliste latin Pline l'Ancien, qui vécurent respectivement au Ier s. avant et au Ier s, après J.-C., mentionnent les vingt-quatre bourgades que gouvernaient alors les Volques depuis Nimes. Chaque peuplade s'organisait autour de son oppidum, tel celui d'Ensérune, refuge en cas de dangers mais aussi lieu où se tenaient les foires et les marchés, ainsi que les assemblées politiques et religieuses. C'est alors que Rome, maîtresse de la Méditerranée après sa victoire sur Carthage et Corinthe, fut appelée par Marseille pour lutter contre une peuplade celte et finit par envahir la Gaule méridionale. Entente cordiale En 122 av. J.-C., les légions romaines firent la conquête de la Gaule méridionale, des Alpes jusqu'à Toulouse, des Cévennes aux Pyrénées. Ainsi fut créée la province de Transalpine, dont Narbonne, colonie de vétérans fondée en l18, devint la capitale. Contrairement aux Grecs qui s'étaient contentés de commercer et de civiliser, les Romains eurent pour objectif d'établir une assise territoriale par des colonies de peuplement, l'organisation d'un réseau routier, l'exploitation économique du pays, le prélèvement de taxes et le recrutement d'auxiliaires militaires. La Via Domitia, route pavée qui suivait le tracé de la voie héracléenne empruntée par les Grecs et les éléphants d'Hannibal, devint l'artère principale de la Provincia. Remplacée aujourd'hui par l'autoroute A9, elle doit son nom à celui qui dirigea la conquête et organisa la nouvelle province romaine, le consul Cn. Domitius Ahenobarbus. A son arrivée, César trouva des indigènes fidèles à Rome qui lui fournirent des troupes prêtes à lutter contre les Helvètes, les Vénètes puis contre Vercingétorix et ses alliés, vaincus en 52 av. J.-C, à Alésia. En 49, sa victoire sur Marseille qui avait eu le tort de prendre le parti de Pompée, son adversaire, permit à Narbonne de prendre la première place sur le littoral. César renforça alors la présence romaine dans le sud de la Gaule en fondant d'autres colonies, dont celle de Béziers, la Colonia Victrix Julia Septimanorum Baetarae, destinée aux hommes de la VIIe légion. Selon certains historiens, ce sont ces vétérans, les Septimani, qui donnèrent, six siècles plus tard, à la fin du Ve s., leur nom à la province de Septimanie, devenue partie du royaume wisigoth. Cependant, le nom de Septimanie se rapporte plus vraisemblablement aux sept évêchés qui jalonnaient la province. La culture romaine s'implanta si bien que la région devint la province de Gaule la plus profondément et la plus durablement romanisée. En témoignent l'urbanisme et l'architecture, mais aussi l'adoption rapide de la religion romaine. La Via Domitia, le Pont du Gard, celui d'Ambrussum, les temples et l'amphithéâtre de Nîmes, les vestiges de Murviel-lès-Montpellier, la villa de Loupian et ses mosaïques sont ainsi des exemples célèbres parmi les apports inestimables de la civilisation romaine à notre patrimoine. En même temps, la population accepta spontanément le culte impérial, d'une part en reconnaissance de l’œuvre de pacification et d'organisation réalisée par l'empereur Auguste, d'autre part dans l'espoir d'obtenir de nouveaux bienfaits. Les habitants des cités assimilèrent très vite les dieux gréco-romains tels Mars, Mercure, Apollon ou Vénus, certains recouvrant des dieux celtiques réinterprétés à la romaine. Des temples s'élevèrent en leur honneur, voués en particulier à Jupiter, Junon et Minerve réunis dans la triade capitoline, « sainte patronne de toute colonie romaine » à laquelle on dédiait des Capitoles. Celui de Narbonne était colossal et digne de rivaliser avec le Capitole de Rome, rapporte le poète bordelais Ausone au IVe s. dans son Tableau des villes célèbres. Cependant, en matière de religion, des traditions celtiques ne furent pas pour autant oubliées, les couches populaires restant fidèles à leurs divinités : Nemausus, maître de la Fontaine de Nîmes, les déesses Mères, idoles féminines garantes de la fécondité ou des dieux monstrueux, comme Tarvos Trigaranos, le dieu taureau tricornu, maître de la force pour les Gaulois. Bientôt, un climat d'insécurité, courant à travers toute la Gaule depuis le IIIe s., modifia le paysage urbain de la région : les villes, comme Béziers, Narbonne ou Nîmes, construisirent des remparts qui protégeaient en partie l'agglomération. En 412, après avoir pris Narbonne, les Wisigoths, peuple germain installé au service de Rome dans le Sud-Ouest, s'affranchirent de leur fidélité et étendirent jusqu'au Rhône le territoire qui leur avait été concédé. C'est sous leur domination que la Narbonnaise devint Septimanie. Frondeuse Le nom de Septimanie fut cité pour la première fois vers 473 dans une lettre de Sidoine Apollinaire, évêque de Clermont, adressée à son cousin Avitus. Le texte montre l'importance de la région aux yeux du roi wisigoth Euric dans la guerre qu'il avait déclarée à l'empereur romain. Les Wisigoths avaient repris Narbonne aux Romains en 461 et se trouvaient alors maîtres d'un royaume allant de l'Aquitaine à l'Espagne, avec Toulouse comme capitale. A partir de ce moment, le nom de Septimanie fut largement utilisé pour désigner notre région, province du royaume wisigoth en pleine expansion et devenu indépendant à la fin de l'Empire romain. Cependant, en 507, le roi wisigoth Alaric II fut battu par Clovis à la bataille de Vouillé et l'Aquitaine passa aux mains des Francs. Refoulés au-delà des Pyrénées, les Wisigoths gardèrent une seule possession en Gaule : la Septimanie. Cette dernière fut un temps administrée par Théoderic, roi ostrogoth et empereur romain qui protégea ainsi la Septimanie des ambitions des fils de Clovis. Il mit en place une politique de mariages mixtes entre Ostrogoths et Wisigoths dans le but de les fondre en un seul peuple apte à faire face aux Francs beaucoup plus nombreux. Son petit-fils Amalaric tenta, par une alliance matrimoniale, de se lier à des rois francs mais l'entente échoua et la Septimanie fut envahie et pillée à plusieurs reprises par les Mérovingiens. En 569, le royaume wisigoth s'organisa autour d'une nouvelle capitale : Tolède. La Septimanie, quant à elle, occupait une position particulière, due tant à son éloignement géographique par rapport au gouvernement central qu'aux ambitions de sa noblesse qui se révolta à plusieurs reprises contre la monarchie et le clergé de Tolède. En 587 , notamment , 1a conversion du roi Récarède au catholicisme déclencha de violentes réactions en Septimanie où la noblesse arienne se révolta, soutenue par le roi Gontran de Burgondie (Bourgogne). Sous l'influence du clergé de Tolède, Récaréde venait de rejeter l'arianisme jusque là pratiqué par son peuple et qui niait la divinité de Jésus. Le troisième concile de Tolède proclama officielle la religion catholique et le roi réprima les soulèvements afin de constituer un royaume uni par la même foi, au sein duquel Eglise et Etat partageaient le pouvoir. Cependant, malgré l'unicité du roi, la Septimanie restait une province lointaine, excroissance du royaume hispano-gothique au nord des Pyrénées, région gallo-romaine de plaines prospères, largement ouverte sur la Méditerranée, le Rhône d'Arles et la Garonne, de Toulouse à Bordeaux. La noblesse romano-wisigothique de Septimanie, ambitieuse et indépendante, était prête à s'allier aux rois francs ayant des possessions en Aquitaine. Ce qu'elle fit lorsque le roi Swinthila associa son fils au pouvoir. En effet, très hostile à la monarchie héréditaire et centralisatrice mise en place à Tolède, la noblesse nationaliste, menée par le duc de Septimanie Sisenand, acheta l'alliance du Mérovingien Dagobert qui lui envoya des troupes. Ainsi fut détrôné le roi de Tolède, alors que le duc de Septimanie se faisait acclamer roi. Au cours de la seconde moitié du VIIe s., dans un contexte de crise politique au sein du royaume wisigoth, éclata une nouvelle révolte de la Septimanie. Le roi Wamba, confia au duc Paul, un Hispano-Romain, la mission d'aller réprimer la révolte du comte de Nîmes qui s'était proclamé roi avec l'aide de l'évêque de Maguelone. Mais Paul, décidant de combattre le rebelle pour son propre compte, entra à Narbonne, se fit élire roi et sacrer par l'onction qui faisait de lui un souverain de droit divin. Le « roi oriental » perdit toutefois la guerre contre Tolède. Solidarité Le VIIe s, s'acheva sur une période de troubles en Septimanie, attaquée par les Aquitains et ravagée par une épidémie de peste. Face à ces épreuves, les hommes de Septimanie, quelle que fût leur religion, réagirent dans l'union et la solidarité et imposèrent leur mode de vie au gouvernement de Tolède. En effet, les négociants juifs contribuèrent à aider le duc de Narbonne en oeuvrant pour relever la région appauvrie. En conséquence, le roi wisigoth Egica leur accorda un statut d'exception par rapport à la législation antijuive prise par les conciles de Tolède depuis 589. Voyant en outre, que ces lois n'avaient aucune prise en Septimanie, il finit par séparer sa province gauloise de ses possessions hispaniques et eut ainsi deux sortes de sujets juifs : ceux d'Hispanie, véritables esclaves, étaient contraints de recevoir le baptême et d'adopter la pratique chrétienne sous peine de décalvation, coups et exil ; en revanche, ceux de Septimanie bénéficiaient d'une tolérance certaine et de la liberté, grâce à la protection de hauts personnages et d'évêques. Ainsi, la communauté juive de Narbonne fut assez importante pour avoir le nom de ses responsables, les domini, inscrits sur une épitaphe datée de 688, où figuraient le chandelier à sept branches et la formule en hébreu « Paix sur Israël ». Une nouvelle lutte opposant la Septimanie à Tolède déclencha, cette fois, l'effondrement du royaume wisigoth. En 710, Agila, gouverneur de la Tarraconaise et de la Septilnanie, fit appel aux Musulmans pour renverser le roi Rodrigue. Débarqués en Espagne prés de Gibraltar, Arabes et Berbères remportèrent une victoire décisive en 711, lors de la célèbre bataille du Guadalete. Les armées arabes prirent ensuite les principales villes, atteignant, dès 714, la vallée de l'Ebre. La Septimanie, assaillie à son tour, résista quelques temps puis finit par céder. Partie excentrée du royaume wisigoth de la fin du Ve s. au début du VIIIe, la Septimanie manifesta à intervalles réguliers son caractère indépendant et insoumis vis-à-vis de Tolède. En même temps, elle continuait d'entretenir des contacts maritimes avec les pays méditerranéens. Ausone termine son éloge de Narbonne par l'évocation de son commerce lointain. Sulpice Sévère, dans ses Dialogues, souligne que, de Narbonne, il ne fallait que cinq jours pour gagner directement un port d'Afrique. Le port d’Agde, quant à lui, était toujours en relation avec l’Orient. Ceci explique la forte présence de colonies d’Orientaux dans les villes de Septimanie, notamment à Narbonne où vivaient, au sein d'une société à dominante romaine, wisigothique et chrétienne, Juifs et Syriens. L’arrivée des sarrasins allait-elle perturber cet équilibre ? EPISODE 2 Sarrasins et Francs
En 719, les Sarrasins, nom donné aux Musulmans au Moyen-Age, envahirent la Septimanie, prenant Narbonne, puis Carcassonne et Nîmes, malgré la résistance de la population et de la noblesse romano-wisigothique. C'était en majorité des troupes berbères, renforcées par des Syriens et des Yéménites, commandées par l'émir Al Samh, gouverneur de l'Espagne récemment conquise. Leur présence en Septimanie dura une quarantaine d'années mais nous savons peu de chose sur cette période. Peu de traces ont subsisté et les Chrétiens, en particulier les chroniques carolingiennes ont, par la suite, forgé l'image des Sarrasins ravageant tout sur leur passage. |
![]() | «In the place of an object» Bice benvenuto – Journal of the centre for Freudian Analysis and Research Londres 2000 | ![]() | «Behind the Iron Curtain : architecture in the former Communist bloc, between isolation and fascination» de Journal of Architecture... |
![]() | ![]() | 6 juillet 1990 : recensement et mise en valeur du patrimoine musical régional : orgues et cloches | |
![]() | «Quand un radis et une chaussure s’unissent aux lettres, tout est possible», Journal de Saint-Bruno, 11 novembre 2006, p. 22 | ![]() | |
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