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HYPOTHESES Les propositions de réponses 1, comprennent une hypothèse fondamentale et trois sous-hypothèses. L’hypothèse fondamentale est : Les acteurs qui produisent en I.F.S.I. la formation initiale en soins infirmiers intègrent différemment l’évolution de la conception du soin, l’évolution de la conception de la formation pour adultes et l’évolution de leur possibilité d’action dans des champs diversifiés. Les 3 sous-hypothèses sont :
Il est vrai que dans un travail de recherche de type compréhensif, la ou les hypothèses cheminent tout au long de l’avancée du travail. L’hypothèse ouvre la voie du travail, comme elle en est aussi sa conclusion. De fait, dans un écrit, il faut la formaliser et la situer, mais dans le raisonnement cognitif, elle est et reste transversale dans l’étude ; et l’on peut même certifier qu’elle évolue le plus souvent tout au long de celle-ci. Cependant, la réalité de la formalisation oblige à l’écrire quelque part. Notre choix est de la situer au décours du questionnement et de la problématique, et en amont du cadre de référence. CADRE DE REFERENCE Le cadre de référence développe essentiellement l’évolution de la conception du soin, l’évolution de la conception de la didactique dans le cadre de la formation pour adultes, et la diversification des champs d’application dans lesquels les acteurs responsables de formation en I.F.S.I. peuvent s’investir. 1. L’évolution de la conception du soin : Les représentations actuelles, occidentales, que nous avons de la médecine et de la maladie sont en fait assez récentes si on les situe dans l’histoire. Walter Hesbeen 1 se sert de l’histoire médicale pour expliquer en partie la différence qui existe aujourd’hui entre « faire des soins » et « prendre soin de quelqu’un » : « C'est à partir d'une logique de «l'usager» ou logique soignante que l'on pourra insuffler une nouvelle atmosphère d'humanité dans les lieux de soins, et améliorer la qualité réelle du service offert. C'est bien d'une qualité soignante dont il est question ici et pas d'une qualité macroscopique, normative, technique, scientifique ou hôtelière qui, pour nécessaires qu'elles soient, n'en sont jamais que des sous - parties. On ne peut, en effet, se contenter d'actes posés avec soin ou avec attention, avec précision et sécurité. Ce n'est pas suffisant même si c'est important car l'être humain ne se limite pas à un corps-objet - une forme de machine - sur lequel on peut appliquer son savoir et ses techniques aussi brillants, aussi sophistiqués, aussi spectaculaires soient-ils. C'est l'être en tant que tel, en tant que corps-sujet, celui qui a besoin de sens, qui demande de l'attention. C'est là qu'intervient la distinction que l'on peut établir entre « faire des soins à quelqu'un » et « prendre soin de quelqu'un ». C'est cette différence qui permet d'inscrire son action, le contenu de son métier, dans une perspective soignante, porteuse de sens et aidante pour la personne soignée. C'est la qualité de l'attention portée au sujet, celle du «prendre soin», celle de la perspective soignante qu'il convient aujourd'hui de développer et de valoriser, ce qui ne saurait se limiter à une excellente technique saupoudrée de quelques propos humanisants, même profondément sincères. » Le patient, après une première demande de « réparation », reproche essentiellement au système de soin l'aliénation de sa « liberté, « l'immersion dans un anonymat usinier, l'irrévérence ou le désintérêt des soigneurs et des initiatives médicales prises sans information du patient » 1. «Ce n'est pas de la médecine reçue dont les malades se plaignent, mais la manière dont elle est donnée ». 2 Le mot soin de nos jours est un peu trop « galvaudé », il est utilisé pour tout et pour rien. Il est peut-être temps de lui redonner le sens de « take care », le sens de « prendre soin ». « Le soin relève ainsi de l'attention. Il désigne le fait d'être attentif à quelqu'un ou à quelque chose, pour s'occuper de son bien-être ou de son état, de son bon fonctionnement. Plus précisément, l'expression « prendre soin » ou « faire avec soin» souligne cette attention particulière que l'on va porter à soi-même ou à un autre, à un objet ou à la tâche qu'on est en train d'accomplir... En limitant mon propos au seul domaine de la santé, le concept de «prendre soin» désigne cette attention particulière que l'on va porter à une personne vivant une situation particulière, en vue de lui venir en aide, de contribuer à son bien-être, de promouvoir sa santé. On voit ainsi combien la concrétisation de cette aide sera tributaire de la représentation que le soignant a de la santé.» 3 L’on voit aussi à quel point cet acte, ce soin, est unique puisqu’il s’adresse à un individu unique, à un moment donné (donc unique lui aussi), et ce dans une conjoncture donnée, donc unique elle aussi. De là, jamais le soignant ne peut refaire deux fois le même soin. Chaque soin est une « création » unique, totale, une entité. Le soin est tributaire de la représentation que le soignant a de la santé. Or, il y a deux siècles environ, dans le monde occidental, la médecine moderne a fondamentalement transformé cette représentation (qui remontait sans doute à l’origine de l’homme). En effet « la médecine scientifique ou médecine moderne, encore appelée biotechnologique ou technoscientifique, trouve son acte de naissance décisif au début du 19éme siècle. Elle a pour père deux Français, le premier François Magendie (1783-1855) et le second son élève, Claude Bernard (1813-1878). C'est le nom de ce dernier qui sera plus particulièrement retenu, car il est considéré comme le fondateur de la physiologie dite aussi « science de l'homme normal » ... La volonté qui prévaut au début de ce 19éme siècle, est celle d'approfondir et systématiser les connaissances en médecine, pour la faire accéder au rang de science, parfois définie comme «la connaissance de la vérité ». Pour accéder à ce rang et à toute l'aura qui l'accompagne, les protagonistes de l'époque auront recours aux démarches scientifiques utilisées dans d'autres disciplines, soit la physique et la chimie. On passera ainsi d'une médecine d'observation à une médecine expérimentale. Claude Bernard s'exprime très clairement à propos de la voie dans laquelle il s'est engagé : «Ce que je veux, c'est fonder la médecine expérimentale, en rendant scientifique la pratique qui n'est qu'empirique aujourd'hui. Pour cela, je prouve qu'on peut agir sur les corps vivants, comme sur les corps bruts». On voit bien la référence qui est faite à la physique et à la chimie permettant de réduire les corps vivants à des corps bruts, c'est-à-dire des corps-objets. L'auteur poursuit en précisant : «La médecine d'observation, bien qu'il reste encore à faire, existe; c'est Hippocrate qui l'a fondée. Mais d'un autre côté, je prétends que la médecine expérimentale, celle qui a pour objet d’agir sur l’organisme et de modifier ou de guérir les malades, n’existe pas ; son problème n’est pas posé ; elle attend encore son fondateur. » C’est ce que Claude Bernard deviendra. »1 Cette médecine là, va devenir de plus en plus utile, et est extrêmement utile. Mais cette médecine ne place plus l’homme au cœur du problème, mais seulement la maladie. Il fallait sans doute ce type de médecine pour accomplir des pas de géants dans la thérapeutique, mais il n’est plus pensable aujourd’hui de laisser évoluer la médecine sans l’homme qu’elle doit servir. Ce n’est pas l’homme qui doit être au service de la médecine, c’est la médecine qui doit être au service de l’homme. Cela semble aberrant... et pourtant. La médecine est-elle encore, autant qu’elle le prétend, dans la droite lignée d’Hippocrate ? Avec la médecine moderne, « l'organisme et, avec lui, ses maladies sont dissociés de la personne en tant que sujet. La médecine expérimentale en voulant fonder et objectiver ses pratiques selon les méthodes des sciences dites «dures» progresse vers une réduction de l'être humain, en le limitant à sa seule partie objectivable. C'est pourquoi, dans la médecine moderne, il y a si peu de place pour ce que le malade exprime, pour sa parole qui est, par essence, subjective. Or, c'est la parole qui permet au sujet de dire, de raconter la souffrance qu'il ressent en son être, sa maladie ou son mal-être » 1. Avec la médecine moderne tout ce qui n’est pas objectivable est peu pris en compte. « On » s’intéresse essentiellement au corps - objet, le corps - sujet est peu pris en compte, voire nier. La médecine moderne se situe volontairement au plus loin de la prise en compte du sujet. La parole même du sujet y est parfois exclue. A ce propos, le médecin Raymond Gueibe écrit : « ce n’est pas le sujet qui intéresse le médecin, mais le symptôme qu'il lui apporte et qu'il va pouvoir inclure dans son répertoire de maladies ». On n’écoute plus le malade. « Je ne vois rien » signifie « vous n’avez rien ». Le traitement devient plus important que le comment de la maladie, que le sens et le pourquoi de la maladie. Or l’homme a besoin de « signification » pour vivre, comprendre, continuer... Il y a eu mise au pas de la médecine par la science, c’est ce qui explique les performances, mais aussi les limites de la médecine actuelle. « L'émergence du soin », nous préférons dire la réémergence du soin, « de l'attention particulière portée au corps que la personne est, n'en est pas facilitée et nécessiterait, aujourd'hui, pour réussir à se développer, une véritable réorientation... Les recherches de plus en plus pointues, menées depuis cette époque, ont permis une avancée extraordinaire du savoir médical et des techniques qui en découlent. De nombreuses pathologies peuvent aujourd'hui être traitées. Certaines ont disparu, même si d'autres apparaissent ou réapparaissent. Les secours sont de plus en plus rapides et efficaces. Des traumatismes de plus en plus sévères peuvent être réparés, et certaines fonctions rééduquées. L'âge de la mort a été largement reculé, alors que la naissance est de mieux en mieux contrôlée, assistée, jusqu'aux caractéristiques du futur bébé qui peuvent être prédites scientifiquement. Les interventions chirurgicales sont de plus en plus audacieuses et de moins en moins invasives. Les méthodes diagnostiques sont de plus en plus sophistiquées, rapides et fiables... Toutes ces découvertes, tous ces progrès sont remarquables autant que fascinants » 1. Mais tout ceci, va le plus souvent de pair avec une perte de connaissance concernant le corps - sujet, l’individu, l’histoire de vie du sujet temporairement malade. Or, l’infirmière et l’infirmier sont obligés de se plier à cette logique, au moins temporairement, même si à l’origine, ce n’est pas cette logique qui leur semble la plus porteuse. On peut penser que l’infirmière s’inscrit naturellement dans une conception de « prendre soin de l’autre ». La personne qui se dirige vers le soin est sans doute plus que d’autre naturellement inscrite dans cette dynamique. Pourquoi ? Mais parce que le soin est vieux comme le monde. L’Histoire nous montre que le soin a toujours été. Comment imaginer que l’évolution de la vie ait perduré si longtemps, si la vie n’a pas pris soin d’elle-même? Comment imaginer que l’évolution de l’homme puisse se faire, sans que l’homme ne prenne soin de lui-même, de l’autre et de son environnement ? Comment imaginer la vie aujourd’hui, si rien ne prenait soin de rien. L’idée semble tout simplement inconcevable. L’on peut penser que prendre soin est inscrit profondément dans la nature humaine 2, et que les « soignants » y sont particulièrement sensibles. De plus, à un niveau moins conceptuel, moins historique et beaucoup plus pragmatique, une étude de la population des élèves infirmières 3 entrant en école en février 1991, montre qu’à la question : Comment définissez-vous la profession d’infirmier(ière) en cinq mots-clef ? « L’idée émergeante est la notion de valeurs et de sentiments qui sous-tend cette profession... Les principales valeurs et sentiments exprimés sont : l’humanisme, l’humanisation, le dévouement, la solidarité et l’idée d’apporter une aide et un soulagement... La profession d’infirmière pour ces futurs professionnels, est avant tout un métier relationnel au sens large du terme permettant l’actualisation de valeurs et de motivations profondes. » Alors, comment se fait-il que l’infirmière redécouvre souvent ce sentiment profond des années après ? Et bien, c’est peut-être parce que le système l’oriente dès le début et ce pendant des années vers autre chose. Le système la dirige inéluctablement dans la logique médicale, organiciste, depuis deux siècles. Avant ? La question ne se posait sans doute pas. Avant l’apparition de la médecine scientifique, le soin, c’était aider l’autre à donner la vie, aider l’autre à trouver du sens à sa vie. C’était l’aider à manger, à se déplacer, à s’occuper de lui-même, à se laver... Ce n’était pas la science de l’obstétrique, le système digestif, la fonction locomotrice et les douze toilettes à faire avant la grande visite médicale de 9 heures. Il fallait concevoir une médecine « compréhensive » de l’organe malade, mais il fallait aussi rester centré sur l’homme. Nous avons vécu deux siècles « déviants » dans ce domaine, en regard de « prendre soin ». Pendant le premier siècle environ (fin du 18ème siècle et 19ème), le médecin se « débrouille » seul. Il est totalement tourné vers ce qui le préoccupe ; mais petit à petit, il se rend compte qu’il doit accomplir beaucoup trop de tâches annexes. Il lui faut trouver une main d’œuvre, qui fera pour lui tout ce qu’il n’a plus le temps de faire. Mais qui est susceptible d’accomplir ces tâches annexes, intéressantes et valorisantes hier car à la pointe du progrès mais désintéressantes et dévalorisantes aujourd’hui car dépassées ? La réponse est évidente : c’est la personne qui prend soin du malade à longueur de journée bien sûr. Voilà l’origine du rôle sur prescription qu’il fut ou non légiféré à l’origine. Ce rôle sur prescription, c’est ce que le médecin délègue ; c’est ce qu’il n’a plus ni l’envie, ni le temps de faire. Et ceci va littéralement envahir les soins, au point qu’il faudra un jour créer la fonction d’aide-soignant. L’infirmière est tellement occupée par son rôle sur prescription, qu’elle va devoir déléguer à son tour une partie de « prendre soin ». Nous baignons dans l’incohérence. L’infirmière qui est venue au soin pour « prendre soin de la personne malade », se trouve tellement occupée « à faire des soins » pour le médecin, qu’elle se trouve obligée de déléguer une partie de ce qui est à l’origine l’essence même du soin. Et des générations vont se succéder de plus en plus formées à « faire des soins », de plus en plus formées dans la toute puissante logique médicale. Mais un tout petit bastion résiste, ce sont celles et ceux qui inconsciemment ont « plongé » dans la logique médicale de ces deux derniers siècles, et qui au fil des années sont devenus d’excellents professionnels, mais qui au fond ne sont pas pleinement satisfaits. Ils se rendent bien compte que la personne malade leur demande aussi autre chose. Elle leur demande de prendre soin d’eux. Alors là, cela devient un conflit interne pour les soignants. La nature profonde du soin qui les animaient, réemerge. Et rien ne peut arrêter cette résurgence, car elle se situe au moins consciemment à deux niveaux. Le premier niveau, c’est le niveau précédemment décrit : la nature du soin, c’est « prendre soin », et l’une de ces déviances limitatives c’est « faire des soins » ; ce professionnel a donc réussi à boucler le processus « prendre soin » - « faire de soins » - « prendre soin ». Le premier niveau concerne le soin et de là le soigné et le soignant. Le deuxième niveau est aussi professionnel, mais il concerne essentiellement le soignant. C’est l’effet réflexif de « prendre soin ». Le soignant découvre que, pendant ses longues années de production de soins, où il a enduré l’écart qui existe entre « faire des soins » et « prendre soin », personne ou presque n’a « pris soin » de lui. Et c’est malheureusement normal, puisque le système semble principalement inscrit dans « faire des soins ». Celui qui travaille des années est forcément confronté à un problème majeur. Le système lui demande, le plus souvent, de « faire des soins » tandis que sa conscience et la personne malade lui demande de « prendre soin ». Et dans cette interrogation profonde, presque personne ne le reconnaît, ni ne « prend soin » de lui ... 2. L’évolution de la conception de la didactique dans le cadre de la formation pour adultes : Les premières tentatives d’intégrer les divers concepts, notions et résultats de recherches sur la formation des adultes en un seul et même programme, commence dès 1949. Depuis quelques temps se développe en Europe, le concept d’une théorie unifiée de l’éducation d’adultes que l’on nomme andragogie, pour la distinguer de la pédagogie, théorie de l’éducation des enfants. En effet, le mot « pédagogie » provient du grec paid, qui signifie « enfant » et agogus, qui signifie « guide ». La pédagogie est donc l’art et la science d’enseigner aux enfants. En tant que telle, la pédagogie ne peut s’appliquer stricto sensu aux adultes; l’utiliser pour la formation des adultes n’est pas seulement antinomique, c’est dangereux, même si de nombreux adultes ont été formés jusqu'à une époque récente comme s’ils étaient des enfants. Malcolm Knowles considère que « l’andragogie consiste dans la pratique, à concentrer ses efforts sur la manière d’organiser et de mettre en œuvre les programmes d’enseignement, de former les enseignants pour adultes et d’aider les adultes à apprendre » 1. « Dans le modèle pédagogique, l'enseignant décide de plein droit ce qui sera appris, quand et comment cela sera appris et si cela a effectivement été assimilé. C'est une formation dirigée par le professeur, l'apprenant se contentant du rôle de la soumission. Pour que ce système puisse fonctionner, on postule sur deux attitudes des apprenants : 1. Leur besoin de savoir. Les apprenants ont seulement besoin de savoir qu'ils doivent apprendre ce que le professeur leur enseigne s'ils veulent réussir et progresser ; ils n'ont pas besoin de savoir comment ils pourront utiliser ces acquis dans leur vie. 2. Le concept de soi chez l'apprenant. Le concept que l'enseignant a de l'apprenant est celui d'un être dépendant , le concept que l'apprenant a de lui-même peut donc éventuellement être celui d'un être dépendant. »1 Or, il est démontré par de nombreux auteurs qu’au « fur et à mesure que les individus mûrissent, leur besoin et leur capacité à s'autogérer, à tirer profit de leur expérience dans une formation, à cerner leurs propres dispositions, à apprendre et à orienter leur formation autour des problèmes qu’ils rencontrent dans la vie, ce besoin et cette capacité s'accroissent tout d'abord progressivement pendant l'enfance et la pré-adolescence, puis rapidement au cours de l'adolescence » 2. Et l’on considère que : 3. Le rôle de l'expérience a peu d’importance. « L'expérience de l'apprenant est peu utile à l'apprentissage, en revanche, l'expérience qui compte est celle de l'enseignant, de l'auteur du manuel et du réalisateur des supports audiovisuels. C'est pourquoi les méthodes d'enseignement classiques - conférences et lectures conseillées, par exemple - sont au centre de la méthodologie pédagogique » 3. 4. La volonté d'apprendre est limitée. « Les apprenants ne sont disposés à apprendre ce que leur enseigne le professeur que s'ils souhaitent réussir et progresser » 4. 5. L'orientation de l'apprentissage est donné par le sujet. « Les apprenants orientent leur apprentissage autour d'un sujet ; pour eux, la formation est un moyen d'acquérir des connaissances sur un sujet donné. L'apprentissage est par conséquent organisé selon la logique du contenu de ce sujet » 5. 6. La motivation est externe. « La motivation des apprenants est stimulée par des signes extérieurs, comme des notes, l'approbation ou la désapprobation du professeur ou les pressions parentales » 1. Dans le modèle andragogique, l’apprenant est, et est considéré comme un « adulte », aux niveaux biologique, juridique, sociale et psychologique (nous devenons psychologiquement des adultes lorsque nous avons nous-mêmes pris conscience que nous sommes responsables de nos vies et que nous devons nous autogérer. D'un point de vue éducatif, c'est cette dernière définition qui prime). « Les hypothèses de base du modèle andragogique sont différentes de celles du modèle pédagogique. Les voici : 1. Le besoin de savoir. Les adultes ont besoin de savoir pourquoi ils doivent apprendre quelque chose avant d'entreprendre une formation » 2 . De fait, « le premier devoir de l'enseignant est d'aider l'apprenant à prendre conscience de son «besoin d'apprendre ». L'un des rôles fondamentaux est d'expliquer aux apprenants que la formation vise à améliorer leur efficacité et leur qualité de vie » 3 . L’enseignant doit également les aider à découvrir l'écart qui sépare ce qu'ils sont à un moment donné et ce qu'ils souhaitent être... 2. Le concept de soi chez l'apprenant. « Les adultes ont conscience d'être responsables de leurs propres décisions et de leur vie. Une fois qu'ils en sont conscients se développe en eux un profond besoin psychologique d'être vus et traités par les autres comme des individus capables de s'autogérer. Ils n'admettent alors pas les situations où ils sentent que les autres leur imposent leur volonté. Pourtant, dès l'instant où ils s'engagent dans une activité marquée du signe « éducation », «formation » ou autre synonyme, ils retrouvent le conditionnement de leur expérience scolaire antérieure, ils retombent dans un état de dépendance, croisent les bras, s'enfoncent dans leurs sièges et annoncent « Enseignez-moi »... Le risque est alors que nous supposions que cette attitude répond à un réel besoin, et que nous commencions à les traiter comme des enfants, car nous générerions ainsi chez eux un conflit entre leur modèle intellectuel - l'apprenant est un être dépendant - et leur besoin psychologique plus profond, et peut-être subconscient, de s'autogérer. Et dans la plupart des cas, une personne en proie à un conflit psychologique cherche à échapper a la situation qui en est à l'origine - il est probable que ce soit partiellement la cause du fort taux d'abandon dans beaucoup de formations libres pour adultes...
D'autre part, cela implique que dans de nombreuses formations, ce sont les adultes eux-mêmes qui constituent la plus riche ressource de l'apprentissage ; ce qui explique pourquoi les enseignants pour adultes préfèrent les méthodes expérimentales, aux méthodes d'enseignement classiques, ainsi que les activités d'échanges. Ces méthodes expérimentales, qui se nourrissent de l'expérience des apprenants, sont par exemple la discussion de groupe, les exercices de simulation, les exercices de résolution de problèmes, la méthode des cas et les méthodes appliquées... Les enseignants cherchent par conséquent des moyens d'aider les adultes à analyser leurs habitudes et leurs travers et à s'ouvrir aux nouvelles approches »1. L’adulte tient son identité de sa propre expérience, « ce qui signifie pour l'éducation que, à chaque fois que l'on omet ou que l'on sous-estime leur expérience, les adultes ont l'impression que ce n'est pas seulement leur expérience que l'on rejette, mais aussi toute leur personne... « 4. La volonté d'apprendre. Les adultes sont prêts à apprendre si ces connaissances et ces compétences leur permettent de mieux affronter des situations réelles... 5. L'orientation de l'apprentissage. Contrairement aux enfants et aux adolescents, dont l'apprentissage est orienté autour du sujet (du moins à l'école), les adultes orientent leur apprentissage autour de la vie (ou d'une tâche, d'un problème). Ils sont disposés à investir de l'énergie pour apprendre, s'ils estiment que cela les aidera à affronter des tâches et à résoudre des problèmes qu'ils rencontrent dans leur vie quotidienne. De plus, ils assimilent d'autant mieux les connaissances, les compétences, les valeurs et les attitudes, que celles-ci sont présentées dans le contexte de leur mise en application à des situations réelles... 6. La motivation. Si les adultes sont sensibles à des motivations extérieures (meilleurs emplois et salaires, promotions, et autres), ce sont leurs pressions intérieures qui sont le plus grand facteur de motivation (désir d'accroître sa satisfaction professionnelle, estime de soi, qualité de vie, et autres). En 1979, Tough a découvert que tout adulte normalement constitué est motivé pour progresser et se développer, mais que cette motivation est souvent bloquée par des obstacles tels qu'un concept négatif de sa qualité d'étudiant, l'absence d'occasions et de ressources, les contraintes temporelles et les programmes qui ne tiennent pas compte des principes fondamentaux de l'éducation des adultes »1. A raisonner trop vite, on pourrait penser que la pédagogie est mauvaise et que l'andragogie est bonne, que la pédagogie s'adresse aux enfants et l'andragogie aux adultes. Ce n’est pas aussi simple. Malcolm Knowles établit une distinction entre ce qu’il appelle une idéologie et un système de contre-hypothèses. Il semble en effet, qu’en bien des points, le modèle pédagogique ait pris l'aspect d'une idéologie. Celle-ci étant définie comme un ensemble méthodique de croyances exigeant la loyauté et la conformité de ses partisans. En revanche, le modèle andragogique « n'est pas une idéologie, mais un système de contre-hypothèses. C'est là où réside la différence fondamentale entre les deux : le modèle pédagogique est un modèle idéologique qui exclut toutes les hypothèses andragogiques, tandis que le modèle andragogique est un système d'hypothèses qui comprend les hypothèses pédagogiques. Dans la pratique, cela signifie qu'il est de la responsabilité des éducateurs de déterminer quelles hypothèses sont, dans une situation donnée, réalistes. Au cas où une hypothèse pédagogique se vérifie pour un apprenant dans un objectif éducatif particulier, il faut en déduire que la stratégie pédagogique est pertinente dans ce cas précis, du moins comme point de départ. Le modèle pédagogique s'impose par exemple lorsqu'il s'avère que les apprenants sont dépendants » 1 (notamment lorsque le domaine abordé est totalement inconnu, mais pendant combien de temps le domaine abordé est-il totalement inconnu?). « L'approche d'un pédagogue est très différente de celle d'un andragogue. Le pédagogue, qui considère que les seules hypothèses réalistes sont les hypothèses pédagogiques, tient à maintenir la dépendance des apprenants vis-à-vis de l'enseignant ; tandis qu’un andragogue, considérant qu’iI est préférable de s'orienter vers les hypothèses andragogiques, fera tout son possible pour aider les apprenants à prendre de plus en plus de responsabilités dans leur propre apprentissage. De plus, il est certains que l’on peut améliorer l'efficacité de l’enseignement en adaptant certains concepts andragogiques au modèle pédagogique, notamment en instaurant un climat dans lequel les élèves sentent qu'ils sont plus respectés, qu'on leur fait plus confiance, qu'ils sont plus en confiance et que l'on fait plus attention à eux; en leur expliquant la nécessité d'apprendre avant de commencer le cours; en leur donnant plus de responsabilités dans le choix des méthodes et des documents ; et en partageant avec eux la responsabilité de l'évaluation de leurs acquis » 2 . |
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