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La Terre et les hommes · René Char (1907) : Il côtoya les surréalistes et participa en 1929 à l’entreprise d’André Breton (cf. Le marteau sans maître 1934). A cette expérience, il doit sans doute l’essentiel de son langage, son goût du poème en prose, son sens de possibilités poétiques du mystère verbal, tout ce qui rend sa poésie difficile d’accès. L’expérience de la guerre et de la résistance le transforma profondément (Feuillets d’Hypnos 1946). A travers « l’incantation du langage », il rejoint l’universel humain et l’on retrouve chez lui une sorte de romantisme éternel, qui s’inscrit par exemple dans le dialogue difficile entre la nature et le cœur humain. Son recueil majeur est :
Dans l’Argument rédigé pour le poème pulvérisé, il écrivait :
son regard poétique se porte sur la relation tragique ente le cœur humain et les images du monde (surtout de la nature). La poésie de Char a connu l’adhésion profonde d’A. Camus, auteur d’une de ses préfaces. Le verbe poétique est l’opérateur de la conscience. Le verbe poétique de Char, à force de conscience et de rigueur tend à se concentrer dans des images elliptiques jusqu’à atteindre le dépouillement même de la maxime, et la parole du poète culmine dans la plénitude condensée de la maxime poétique. :
En 1964, Char a donné un nom révélateur à son anthologie : Commune présence. LES OBJETS ET LES CHOSES. · Francis Ponge : En 1963, dans la revue Art de France, Francis Ponge écrit un « poème-art poétique » où la fonction du poète se définissait conte le lyrisme et contre la métaphysique. Se définit plutôt comme une poésie d’objectivité. - « J’écoute Le monde comme une symphonie Et bien qu’en aucune façon je ne puisse croire que j’en dirige l’exécution Néanmoins il est en mon pouvoir de manier en moi certains engins ou dispositifs. » Se trouvent radicalement contestés la poétique (d’origine baudelairienne et mallarméenne) d’un pouvoir créateur du langage et l’hypothèse d’une éventuelle poétique ou esthétique. Au contraire, soumission absolue de la poésie à l’objet, caractéristique d’un des grands courants de la littérature contemporaine ( comme le nouveau roman) et une définition de la poésie en relation avec l’existentialisme (Sartre a vu en Ponge, le poète le plus proche de sa doctrine cf. Situation I). Ses œuvres :
Dès 1942, il a affirmé sa poétique par le titre son recueil. Si Mallarmé désirait donner l’initiative aux mots, c’est des choses que Ponge prend le parti et à qui il réserve l’initiative. Il a une préférence, du point de vue technique, pour la prose dont il crée un néologisme : « Proème », en 1948, contamination de la prose et poème. Il s’agit de constituer un poème par la mise en jeu de procédés et d’objectifs d’enregistrement qui d’ordinaire relèvent de la prose. La poésie est présente, elle qui ,en poussant l’objectivité du langage jusqu’à ses extrêmes limites dégage de l’objet toute sa charge poétique de mystère ou d’insolite. De plus, Ponge est l’initiateur d’un courant poétique duquel Prévert n’est pas étranger, qui sera illustré par Eugène Guillevic (1907…) avec une nuance tragique en plus qui se fait jour au delà de la pure objectivité et débouche éventuellement sur la peur ou la révolte :
EXORCISME DE L’HOSTILITE. · Henri Michaux ( 1899…) : Sa poésie est l’une des plus neuves de note temps. Il ressent comme une blessure la présence du monde. Il est sensible à la condition désarmée de l’homme, il comprend que la seule arme qui lui reste est le langage : il l’utilise pour attaquer et se défendre. Il faut noter l’importance de l’humour dans son œuvre, humour métaphysique qui change les conditions mêmes de l’être par l’agressivité du langage. Michaux a créé Plume, personnage dont le symbolisme est évident : à la manière de Charlie Chaplin, il se heurte continuellement au monde. De ces chocs naissent des étincelles verbales humoristiques et fascinantes : la fatalité hostile se trouve à la fois « encaissée » et exorcisée par le langage, qui joue le rôle d’un boomerang. Le langage se retourne contre son ennemi en le transformant. Le langage se refuse à imiter le monde, le rompt et le désarticule pour le vaincre. Michaux est l’auteur d’une œuvre poétique très abondante. L’image du froid et de la glace (cf. Icebergs) est un des aspects les plus obsédants du monde hostile. Même la mort peut être exorcisée par lez langage, la poésie est une réduction hiéroglyphique des êtres et des choses. Michaux est aussi un dessinateur : la pureté linéaire de la lettre, considérée comme un idéogramme est l’ultime et l’éternel résidu de l’Etre suprême. Dans la disproportion et la ténuité de l’idéogramme et l’immensité même de l’évocation d’un autre monde réside l’humour et la vérité poétiques. L’EPOPEE INTERIEURE. · Saint John Perse ( 1887-1975): Alexis Saint Léger, sous le pseudo de Saint John Perse se révèle poète dès 1924. il est littérairement, comme Pierre Jean Jouve, contemporain des plus jeunes poètes, malgré son âge. Il a interdit de publier ses écrits tant qu’il faisait de la politique (Ministère des affaires étrangères). Révoqué par le gouvernement de Vichy en 1940, s’installe aux USA. A la suite de Claudel et sous son influence, son œuvre emploie le langage en immenses étendues rythmiques et en larges plages de symboles. Une ambition épique envahit ses poèmes. L’épopée fait appel à des rythmes exotiques et/ou fantastiques pour transformer en vision grandioses un inépuisable secret intérieur. Le poète désire réunir, dans l’unité de son langage d’images et de rythmes, l’irréductible secret de son aventure intérieure et la hauteur d’ une communication aristocratique. Une expression résume son ambition poétique : « Terre arable du songe ! » . la poésie est en effet le labour fertilisant d’une terre impénétrable, le poète est le « conteur qui prend place au pied du térébinthe ». Ses œuvres :
Dans son œuvre, on retrouve les variations capricieuses et rigoureuses sur le thème du voyage, les versets d’Anabase explorent le monde intérieur. Le caprice réside dans la surprise, la rigueur dans la constance thématique de l’étendue, de l’inconnu et, par la figuration rythmique du verset, dans ce parcours intérieur. Anabase est aussi une Odyssée à travers l’empire mystérieux où se rejoignent éternellement les mots et les songes. Comme chez Claudel, le poète prend comme unique objet la Poésie et le Poète car l’épopée intérieure se concentre sur la question poétique et devient témoignage spirituel. Le langage est chasse et poursuite de l’Idée (platonisme) à travers les obsessions et les et les paysages de l’âme, et « la trace du poème » dessine l’ombre fidèle de la Réalité cachée dans le rythme et l’image. · Joë Bousquet (1897-1950) : Blessé, comme Apollinaire, pendant la guerre de 1914, Bousquet devint à la fois « l’homme immobile » et l’un des grands poètes de la vie intérieure. Sa chambre de paralysé, fut, pendant 30 ans environ, un haut lieu de l’esprit. Le titre de sa première œuvre, parue en 1936, est significatif : traduit du silence. Pourtant, ce n’est qu’après la guerre de 39-45 qu’il se fit connaître du public, mais il est vu comme un « poète réservé ». Rarement la poésie a atteint une telle pureté dans la traduction du silence intérieure, et à force d’authenticité mystérieuse, elle décourage le commentaire. C’est toute la gamme des états spirituels dans leur tragique ou leur sérénité qui s’élabore en arabesques verbales où se fondent la pureté linéaire et l’harmonie musicale. Bousquet est à la fois anachronique et moderne, présent au monde et absent de lui, secrétaire du silence intérieur et messager de ses suggestions. Ses œuvres :
Le froid, la nuit, thèmes aussi anciens que la poésie elle même, inspirent le « recours au poème » comme une métamorphose créatrice. ENTRE LE DESIR ET LE DESERT. A force d’intériorité, la poésie devient une Quête (cf. La tour du pin plus loin), où les poètes se rencontrent avec leurs ancêtres, de Scève à Mallarmé. Mais cette quête, si elle ne s’ouvre pas sur l’évidence immédiate du surnaturelle ou du sacré reste, pour ainsi dire, suspendue ente le désir qui l’anime, l’angoisse qui la tourmente, le désespoir qui la guette. L’ascèse même de l’expression verbale participe à cette triple postulation qui pourra se symboliser par l’alternance du mouvement et de l’immobilité, du jour et de la nuit, du désir et du désert. · Yves Bonnefoy (1923) : Il est le poète le plus représentatif de la poésie en « suspens ». il débute en 1953 avec un recueil intitulé : du mouvement et de l’immobilité de Douve. En 1958 est mise en avant l’obsession du désert. De toute évidence, les titres des recueils de Bonnefoy sont symboliques et représentatifs. Le monde qu’il décrit est pétrifié, monde à propos duquel il écrit : « je suis venu au lieu de nul soleil. », mais qui ne saurait arrêter sa Quête : dans cette impossibilité entre l’impossible désir et l’inéluctable désert réside la source de ce que Bonnefoy appelle une poésie de l’agonie interminable. Le dilemme poétique tend à se résoudre non dans la proclamation d’un Sacré transcendant, mais une substitution du langage à l’absence du Sacré : on comprend mieux dès lors que Bonnefoy compte au nom de ses maîtres, Valéry et Mallarmé. C’est comme si la poésie n’avait plus rien a dire, mais dût, pour « prendre musique », à partir de l’interrogation qui risque de transformer la Quête en impasse, fonder son existence et sa légitimité sur la seule rigueur de son langage, alors devenu pure conscience poétique de l’angoisse, inscription verbale de l’agonie, ultime repliement en soi- même de l’imaginer. PROPHETIE La renaissance chrétienne du XXème siècle inscrite en particulier dans l’œuvre de Claudel ,a fortement rayonné sur la poésie contemporaine. De plus, le thème baudelairien du péché et du salut s’en trouve renforcé : sur ce point aussi la poésie se fait retour aux sources, c'est-à-dire à la grande source biblique, et les circonstances de la guerre 39-45 accentuent encore cette vocation prophétique, car climat apocalyptique. Deux grands poètes appartenant à deux générations différentes illustrent cette tendance dans des œuvres fulgurantes : Pierre-Jean Jouve et Pierre Emmanuel, le premier ayant inspiré le second. L’inspiration baroque y anime une spiritualité visionnaire où se retrouve la grande tradition d’Agrippa d’Aubigné et Victor Hugo mais plus encore la trace indélébile des lectures bibliques. · Pierre-Jean Jouve (1887-1976) : Il est contemporain de saint John Perse, et il dut comme lui attendre les années 40 pour trouver sa place dans la poésie d’aujourd’hui, mais là s’arrête leur ressemblance. En effet, Jouve, après avoir subi des influences symbolistes, découvre à 40 ans sa vocation prophétique. La guerre lui est l’occasion de ressentir encore plus profondément l’accord de sa sensibilité avec la dimension du drame : mort et résurrection, les chevaliers de l’Apocalypse, la nuit obscure de Saint Jean de la Croix l’amour et la connaissance, le Christ et l’Antéchrist… tels sont les thèmes et réalités dont la poésie prophétique entreprend de peupler « l’absence du monde », en manifestant aussi leur correspondants dans la nature : le sang, l’arbre, l’orage, la sueur. Œuvres :
Jouve a aussi écrits des essais, parmi lesquels :
Les visions du Jugement dernier, évoquant la Bible, Michel-Ange, Blake, d’Aubigné retrouvent leur puissance et leur nouveauté, grâce à la réinvention d’un langage que la poésie française n’avait pas entendu depuis longtemps, mais qui ne tombe pas dans l’anachronisme, car il a su s’assimiler, au cours de longues années de formation, toute la substance de la poésie récent, de Rimbaud à Claudel et de Baudelaire au surréalisme. Ainsi réapparaît la poésie visionnaire, dont Jouve est, en notre temps, le grand restaurateur.
· Pierre Emmanuel (1916) : En 1939, alors qu’il est âgé de 23 ans, Pierre Emmanuel permet à la poésie prophétique de prendre son essor au cœur même de la guerre, et du Mal qu’elle déploie. Aussi fut-il d’abord un grand poète de la résistance. Mais il ne faut pas uniquement voir la portée de son œuvre dans son actualité, car il trouve dans cette actualité de quoi redécouvrir les grands mythes prophétiques : après celui d’Orphée, il reprend celui de Sodome et Gomorrhe. La poésie visionnaire ne saurait être non plus une sorte d’alibi, car la poésie est aussi une forme d’action dans la mesure où elle rend compte de l’événement en termes d’éternité. Telle est bien la meilleur définition de sa poésie, donnée par Emmanuel lui même, au titre d’un nom d’un de ses recueils : Poésie, raison ardente. Cette raison ardente anime une abondante production poétique :
Dans le mythe de Babel, le poète prophète atteint le cœur même du drame humain, en illustrant la confusion tragique de la grandeur et de la vanité. Le poète dresse le constat dramatique et dérisoire des assauts de l’Homme contre le ciel, jusqu’à ce éclate, dans une image grandiose, spectaculaire et « surnaturelle », la vision du heurt de la Terre et de Dieu. LA POSIE MYSTIQUE · La Tour du Pin (1911-1975) : Issu d’une famille au nom prestigieux, et lui-même est attaché aux traditions de sa race. Dès son plus jeune âge, a été confronté à l’expérience de la solitude et de la communion avec la nature. Cette rencontre adjointe à son tempérament mystique et une intelligence curieuse des pouvoirs du langage donne à sa poésie l’harmonie spontanée de la sincérité spirituelle et de l’effort expérimental. Poète religieux et humain avant tout, son œuvre est le compte-rendu symbolique d’un itinéraire spirituel qui, partant de la Nature et de l’Homme, aboutit à la prière par la voie du « jeu » mystique. Les grands thèmes de son œuvre sont les thèmes bibliques et évangéliques de la Genèse, de l’Exode, de la Pentecôte (accès à la possession de l’esprit), qui se composent avec le thème proprement poétique du Jeu : le Jeu du Seul et le Second Jeu. C’est en effet dans son dialogue avec lui-même, avec la Nature et avec Dieu que l’homme joue sa signification et son salut. Le mouvement de cet itinéraire, la continuité, la cohérence… la permanence de ses images sont orientés vers la connaissance personnelle de Dieu à travers une poésie qui est finalement « l’accession à l’esprit », par la voie d’un langage d’ouverture sur le symbolisme du monde et de révélation des au-delà du monde. Car, selon l’affirmation initiale du poète : « Tous les pays qui n’ont plus de légende seront condamnés à mourir de froid » contiennent virtuellement les étapes d’une œuvre complexe et abondante. La Tour du Pin a exposé lui-même le sens profond de son aventure spirituelle dans sa Lettre aux Confidents. Dans La Quête de Joie (1933), le poète voit sa propre expérience et le monde où elle se développe à la fois comme un « microcosme » à explorer et comme un « passage » à franchir. · Jean-Claude Renard (1922) : C’est par le double mouvement naturel de la Grâce et de l’Inspiration que la poésie mystique aboutit à la prière. Représentant de cette dernière génération des poètes contemporains, Renard poursuit une tradition et un itinéraire qui s’inscrivent dans la lignée de Péguy, Claudel… mais qui s’en distingue par la quête d’une connaissance métaphysique qui donne à sa poésie une résonance originale. Il s’achemine vers une poésie de la Paternité divine qui assume aussi bien l’humain, tout le charnel, le terrestre : effort mystique vers la possession, par le langage, d’une Transcendance révélée. Les poèmes sont aussi une entreprise de restauration du langage : redécouverte, à travers la liberté des images et des visions, de la rigueur du rythme et de la métrique ; alliance de la mystique et de la parole dans l’unité du symbolisme religieux. |
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