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Fiche de français n° 6 a CORPUS Saint-Rémi SUJET: la notion de "REGISTRE" ; le REGISTRE COMIQUE Les numéros de pages renvoient aux manuels en usage au lycée Saint-Rémi : FMH = Français-Méthodes 2de-1re, Hachette, 2004 ; Litt-2de = Littérature 2de, Textes et séquences, Hatier, 2000. Bordas 1° = Français-Première, coll. Littérature, Bordas, 2001. Autres références : N.P.F. = Les nouvelles Pratiques du français, Hatier, 2000 ; FMT = Français, Méthodes et techniques, cl. des lycées, Nathan, 2001 ; Bordas 2004 = Français. Méthodes et pratiques, 2de-1re, 2004 ; Belin, 2000 = 2° et 1re Français. Textes, langue, écriture, Belin, 2000 ; Gradus = Gradus. Les procédés littéraires, Bernard Dupriez, coll. 10/18, 1984 ; T.E.C.= Coll."Textes et contextes" (Index), Magnard ; Magnard = Méthodes pour les objets d'étude, 2004 ; L.2° = Littérature seconde, Hachette ; LAR.= Vocabulaire du commentaire de texte, Larousse ; G.I.L.= Guide des idées littéraires, Hachette ; MPB-Hachette = Méthodes pour le bac, Hachette, 2002 ; M.D.F. = Méthode du français, Bordas, 2001 ; B.H. = Bruno Hongre, Le Dictionnaire portatif du bachelier, Hatier, Profil, 1998 ; JJR. = J.J. Robrieux, Eléments de rhétorique et d'argumentation, Dunod, 1993 ; DFC = Dictionnaire du français contemporain ; Bénac = Nveau vocab. de la dissert. et des études littér.(Hachette) ; Olivier Reboul, Introduction à la rhétorique, PUF, 1991. DAL = Document d'accompagnement du programme de 2de-1ère, sept. 2001. *************************************************************************************** INTRODUCTION : 1) Qu'appelle-t-on un "registre" ? "Le langage en général, et l'art littéraire en particulier, a pour propriété spécifique d'exprimer des attitudes et émotions fondamentales, communes à tous les hommes, qui prennent forme dans les genres et les registres de l'expression." (B.O. n° 6, du 31 août 2000, Le français au lycée) Ces" émotions et ces mouvements de sensibilité (…) ne s'expriment pas dans les langages scientifiques ou utilitaires et (…), par les langages artistiques et par l'art du langage, peuvent être échangés même à grande distance dans le temps et dans l'espace." (DAL, p. 15 b) Définition : Les "registres" sont la manifestation par le langage des grandes catégories d'émotions et de mouvements de sensibilité. La joie, l'angoisse, la colère, l'indignation, l'admiration, la plainte, la compassion, la méfiance, trouvent là leur lieu, à travers des formes d'expression multiples." (DAL, p. 15 b) Le terme "registre" désigne donc l'ensemble des moyens visant à exprimer les émotions de l'émetteur ou à en susciter chez le destinataire. L' "émotion" dont il est question dans la notion de "registre" peut, en effet, être celle de l'émetteur et/ou celle du récepteur : - Emotion de l'émetteur avec fonction expressive dominante : lyrisme, attitude triste (nostalgie, plainte, colère ...) ou gaie (joie, éloge...) - Emotion du récepteur avec fonction impressive dominante : pathétique, dramatique ... - Certains registres conjuguent les deux fonctions, expressive et impressive. Par exemple, le registre polémique, le ton mélancolique ... On appelle dans cette fiche "catégorie d'émotion" les sentiments ou émotions que l'on exprime et que l'on veut faire partager. Les principaux registres : "En relation avec les émotions fondamentales ci-dessus, on peut retenir comme principaux registres manifestes dans le langage et ayant donné lieu à des productions littéraires majeures telles qu'on peut les étudier au lycée : le tragique, le comique, le polémique, l'épique, le lyrique, l'épidictique" (admiration ou blâme), "le satirique (dont l'ironique), le pathétique, le fantastique et le délibératif, lequel représente un cas particulier lié au doute". "Pour une part, ils sont associés dans la tradition littéraire à des genres (la tragédie et le tragique, l'épique et l'épopée, etc.). Mais ils ne s'y enferment pas : le tragique se manifeste ailleurs que dans la tragédie." (DAL, p. 16b) "Cette approche (des registres) ne se borne pas à la littérature, mais concerne aussi les arts et, au-delà, la philosophie." (DAL, p. 17 a). "Les registres sont présents dans toutes les cultures et (…) la question des registres est pertinente pour d'autres domaines que le littéraire (images, musique, divers genres et langages). (DAL, p. 18 a) 2) Les termes "registre" , "ton" et "tonalité" a) Le terme "registre" remplace celui de "ton". Le mot "ton" était pris dans le sens de "tonalité générale". "Un usage assez courant consiste à envisager dans les textes leur "tonalité". Mais la tonalité indique une inflexion dans le langage et non le mouvement subjectif qui y est en jeu. La notion de tonalité est donc utile, mais elle n'est pas suffisante." (DAL, p.16 b). "Un registre peut présenter des nuances ou tonalités : le registre lyrique peut prendre une tonalité plaintive, élégiaque, ou enthousiaste et véhémente." (Bordas 1°, p. 518) N.B. : Le mot "ton" peut désigner aussi l'"intonation" de la lecture à haute voix. b) Le terme "registre" (de langage) a servi à désigner entre les années 70 et les années 2000 la notion de "niveau de langue" (courant, familier, soutenu). LE REGISTRE COMIQUE (FMH 119 ; N.P.F., p. 87 ; L.2de, T-S, p. 497 ; FMT, p. 74-78 ; Bordas 1°, p.518-9) Catégorie d'émotion : plaisir du rire et de l'amusement ; est "comique" ce qui provoque le rire. Ce rire peut venir de l'emploi des mots (comique verbal), de la situation (comique de situation), des gestes (comique de gestes) ou d'un personnage (comique de caractère) ; il repose sur des situations, des caractères, des jeux de mots inattendus qui créent un effet de rupture. Entre le sourire le plus fin et le rire le plus épais, entre le rire délicat et la raillerie méchante, il existe toute une palette de nuances. Tout type de comique peut entrer dans une stratégie argumentative : faire rire ou sourire le récepteur, c'est déjà s'attirer ses bonnes grâces (captatio benvolentiae) ; à plus forte raison dans la polémique (cf fiche 6c). 1) L'HUMOUR (adj. "humoristique" ; de l'anglais "humour", repris du français "humeur" au sens vieilli d' "enjouement") (lire Bordas 1°, p. 519). L'humour consiste en un décalage, une discordance entre ce dont on parle et la manière dont on en parle ; cette distanciation du ton et du propos produit un effet comique (ORG I p. 328). Sorte de court-circuit entre deux fils qui n'auraient pas dû se rejoindre, d'où l'étincelle du rire. Ce registre a toujours quelque chose de léger. A. Premier aspect : C'est une forme d'esprit qui consiste à présenter certaines situations plaisantes ou insolites avec un air sérieux ; on invite le récepteur à jeter un oeil neuf sur les conventions en usage, pour en dénoncer les incohérences, les dysfonctionnements, mais sans agressivité, à la différence de l'ironie (M&T p. 251). Il suppose toujours l'impassibilité (cf le flegme britannique). Pour créer ce décalage, l'humoriste a souvent recours au personnage de l'étranger ou du naïf (Profil). Ex. : Dans les Lettres persanes de Montesquieu, Rica écrit à Rhédi : "Je trouve les caprices de la mode, chez les Français, étonnants. (...) Une femme qui quitte Paris pour aller passer six mois à la campagne en revient aussi antique que si elle s'y était oubliée trente ans." B. Deuxième aspect : L'humour peut consister aussi à traiter avec légèreté un sujet sérieux. Il devient alors un procédé de contestation et vise à faire réagir le récepteur (L.2). Exemples : a) Description d'un champ de bataille au XVII° siècle par Grimmelshausen (L.2°, p.162) : "L'air fut sillonné de balles sifflantes (...).Ceux qui avaient du courage et qui à plusieurs reprises avaient déjà assisté à une plaisanterie du même goût les laissèrent filer au-dessus d'eux, sans pâlir.(...) La terre, qui recouvre habituellement les morts, en était couverte. Des têtes, que leurs légitimes propriétaires avaient perdues, gisaient." b) Swift propose, en 1729, de régler le problème des famines en Irlande en faisant du pâté avec les enfants :"Un jeune Américain de ma connaissance, homme très entendu, m'a certifié à Londres qu'un jeune enfant bien sain, bien nourri, est, à l'âge d'un an, un aliment délicieux, très nourrissant et très sain, bouilli, rôti ou à l'étuvée ou au four, et je ne mets pas en doute qu'il ne puisse également servir en fricassée ou en ragoût."(L.1°,p. 26) Un cas particulier, l'humour noir, qui va jusqu'à faire rire des réalités les plus cruelles (le désespoir, la mort) pour atténuer ou dominer la souffrance (MDF, p. 330). Conscience lucide d'un monde inhumain, l'humour prend parfois pour objet chez Ionesco et Beckett la condition humaine tout entière. Mais si l'humour mêle le rire au désespoir, il est par lui-même affirmation de l'humain et protection : ainsi l'humour noir, en riant du macabre, révèle l'art d'apprivoiser la mort. (Bordas, 1°) 2) L'IRONIE (du grec "eirôneia", action d'interroger en feignant l'ignorance ; cf. l'ironie socratique) (Litt.2°-Tet S, p. 490 ; NPF, p. 117) A. Premier aspect : Au sens strict et étymologique, l'ironie désigne une figure et correspond à l'antiphrase et consiste à dire le contraire de ce que l'on pense, mais d'une manière qui fasse entendre qu'on ne pense pas ce qu'on dit. Ex.: A propos de l'esclavage des nègres, Montesquieu écrit :"On ne peut se mettre dans l'esprit que Dieu, qui est un être très sage, ait mis une âme, surtout une âme bonne, dans un corps tout noir." B. Deuxième aspect : Le terme "ironie" désigne une attitude, il est souvent pris dans un sens très général de "moquerie" (Profil), de dérision pour ridiculiser et dénoncer un adversaire. L'ironie n'est pas toujours badine, elle peut être douloureuse. Exemple dans la 1° Bucolique de Virgile (v. 73) : Mélibée est un propriétaire campagnard chassé de ses terres qui ont été distribuées aux vétérans. Il se parle à lui-même : "Après cela, Mélibée, occupe-toi encore à greffer des poiriers, aligne tes rangées de vigne". Bénac précise que l'ironie veut faire comprendre "qu'il y a chez ceux qui prétendent vraie la proposition, soit de la sottise, ce qui provoque sa raillerie, soit de la mauvaise foi, ce qui provoque son indignation". C'est de là qu'on est passé à l'emploi d'ironie au sens élargi de moquerie. (Gradus) L'ironie est souvent au service de la satire et de la polémique (cf. fiche 6c, registres épidictiques) Certains linguistes proposent une autre définition de l'ironie, qui distingue les différentes "voix" présentes dans l'énoncé ironique : "Parler de façon ironique, cela revient, pour (le) locuteur, à présenter l'énonciation comme exprimant la position d'un (autre) énonciateur, position dont on sait, par ailleurs, que le locuteur n'en prend pas la responsabilité et, bien plus, qu'il la tient pour absurde" (d'après Ducrot, Le dire et le dit, p. 204). L'ironie met à distance un énoncé en montrant que le locuteur s'en désolidarise ; pour être comprise, l'ironie suppose une connivence entre le locuteur et le destinataire (FMH 423) Ex. : "J'ai passé ma journée à l'attendre. Du coup, je n'ai rien pu faire. C'est vraiment bien, d'avoir plein de temps libre !" (Belin, 2000, p. 212) Critères d'identification : 1) La moquerie est plus ou moins subtile. 2) Le locuteur a l'intention de ridiculiser celui ou ce dont il parle. 3) Pour être perçue, l'ironie suppose une complicité entre les interlocuteurs. 4) Le locuteur donne des indices permettant de déceler son ironie : décalage entre son discours et les idées qu'on lui connaît, exagération … Outre l'antiphrase, de nombreuses figures de style et procédés peuvent être empreints d'ironie : - la litote : a) "On ne va pas être étouffé avec ce que tu nous as apporté à manger !" ; b) "Non, le docteur X n'a pas encore tué tous ses malades ..." - l'euphémisme (ex. , Chap. 3 de Candide : atténuation et approximations) : "Les canons renversèrent d'abord à peu près six mille hommes de chaque côté ; ensuite la mousqueterie ôta du meilleur des mondes environ neuf à dix mille coquins qui en infectaient la surface. La baïonnette fut aussi la raison suffisante de quelques milliers d'hommes. Le tout pouvait bien se monter à une trentaine de mille âmes." - l'hyperbole : "Ne fumez pas, pensez à l'incendie du Bazar de la Charité. (En dessous, au crayon) Ne crachez pas, pensez aux inondations de la Seine." (Jean-Charles, les Perles du facteur). - l'hyperbole contraire (ou tapinose) : Il n'a pas inventé le fil à couper le beurre ! (= il n' a rien inventé) ; Il ne fait pas partie de la ligue antialcoolique ! (= il n'est pas sobre). - la prétérition : "Je ne vous rappellerai pas que vous êtes encore en retard !" . - la périphrase : "bascule à raccourcir" pour "guillotine", - l'oxymore ("boucherie héroïque"), - le pastiche, - le calembour (cf. fiche 3 bis), - la fausse naïveté ou le faux compliment, - le persiflage (cf. ci-dessous), - la juxtaposition de propositions contradictoires, - les fausses articulations logiques ...; cf. aussi ci-dessous le raisonnement par l'absurde. 3) LE BOUFFON Le terme "bouffon" désigne un comique peu délicat. Le décalage se situe entre le registre de langue et la caractérisation sociale des personnages. Deux formes contraires sont possibles : a) Le burlesque (NPF , p. 117 ; Bordas 1°, p.518 b) L'effet "burlesque" consiste à faire parler ou agir des personnages nobles, des héros, dans un style vulgaire. b) L'héroï-comique (Bordas 1°, p. 518 b) Consiste à faire parler ou agir des gens du peuple ou des bourgeois comme de nobles héros. 4) JEUX DE MOTS (cf. fiche 3 bis, figures lexicales) 5) AUTRES PROCEDES DE LA MOQUERIE a) La caricature (FMH 420 ; NPF, p. 117, 215 ; Bordas 1°, p. 518) Souligne en les grossissant les traits saillants d'un personnage, d'un discours, d'une situation dans l'intention de faire rire ou de se moquer. b) Le persiflage Ex.: a) "Ce matin, nous avons rencontré une banquise. Les Anglais s'en sont étonnés. Moi, pas du tout : en fait de glace, ce qui m'étonne, ce ne sont pas les banquises, ce sont les Anglais." (J.Fournier, Mon encrier) b)"J'accuse les trois experts en écriture, les sieurs Belhomme, Varinard et Couard, d'avoir fait des rapports mensongers et frauduleux, à moins qu'un examen médical ne les déclare atteints d'une maladie de la vue et du jugement." (Zola, article "J'Accuse", publié dans l'Aurore le 13 janvier 1898) Le persiflage est une moquerie "sifflante" qui consiste à tourner quelqu'un en ridicule sur un ton badin ; le persiflage est proche de l'ironie, il laisse quelque chose à deviner et prend volontiers la forme d'un trait d'esprit.(Gradus) c) Le sarcasme Exemple: Voici comment Flaubert parle de Thiers dans sa Correspondance à G.Sand en 1867 : "Peut-on voir un plus triomphant imbécile, un croutard plus abject, un plus étroniforme bourgeois ! Non, rien ne peut donner l'idée du vomissement que m'inspire ce vieux melon diplomatique, arrondissant sa bêtise sur le fumier de la bourgeoisie !...Il me semble éternel comme la médiocrité ." Le registre sarcastique consiste en une moquerie évidente, agressive, amère, virulente et souvent cruelle. 6) LE COMIQUE DE LA PARODIE (du gr. "parôdia", de "para-" et "odê", chant ; FMH 425 ; NPF, p. 13, 117; Bordas1°, p. 518) Ex.: a) La pensée de Pascal,"L'homme n'est qu'un roseau, le plus faible de la nature, mais c'est un roseau pensant" est parodiée par A.Jarry de la façon suivante : "L'homme n'est qu'un zozo, le plus faible de la nature, mais c'est un zozo pensant". b) Le film La folie des grandeurs, de Gérard Oury parodie Ruy Blas, de Victor Hugo. La parodie consiste à imiter de façon plaisante une oeuvre ou un passage d'oeuvre littéraire ou artistique. 7) LE COMIQUE DE L'ABSURDE (NPF, p. 117, 161 ; lire aussi Bordas 1°, p. 519 b) Exemple : "Je connaissais un sportif qui prétendait avoir plus de ressort que sa montre. Pour le prouver, il a fait la course contre sa montre. Il a remonté sa montre, il s'est mis à marcher en même temps qu'elle. Lorsque le ressort de la montre est arrivé en bout de course, la montre s'est arrêtée. Lui a continué, et il a prétendu avoir gagné en dernier ressort !" (Raymond Devos, Sens dessus dessous) Le comique de l'absurde se caractérise par des propos déroutants, l'absence de logique, l'aspect imprévisible du discours. Il provient d'un décalage entre une forme apparemment très sérieuse et un contenu insensé. Ne pas confondre avec le "raisonnement par l'absurde" (cf fiche 12b). D'une façon générale, le terme "absurde " caractérise ce qui n'a pas de sens. Il a qualifié au milieu du XX° siècle certains courants intellectuels, philosophiques et artistiques : l'humour prend la forme grinçante de l'absurde, dévoilant (ce que certains considèrent comme) le non-sens du quotidien et de la réalité, dont il refuse les règles. (Bordas-1°, p. 519) Fiche 6 a , registre comique, juin 2005 page / 4 |