Les écrivains et la guerre d’Espagne







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Les écrivains et la guerre d’Espagne

par Marie Laffranque
(Article trouvé dans les archives de FR3, émission "un siècle d'écrivains" consacrée à Federico Garcia Lorca)
" El fuego romperà las puertas 1. "
Le soulèvement franquiste éclate le 18 juillet 1936. Deux jours après, la résistance populaire a déjà transformé cette tentative de coup de force en une lutte politique à mort, à la fois bataille militaire et lutte révolutionnaire ; explosion et répression avant-coureuses, certes, de la Deuxième Guerre mondiale, mais moins marquées d'une idéologie abstraite, parce que les ennemis n’y sont pas séparés par des barrières de langue ou de nationalité, et que, depuis des années. le conflit s’est développé ouvertement au niveau de la vie quotidienne. Pour l’étranger non averti, cette " guerre civile " apparaîtra comme une bataille d’ordre intérieur ; ses liens avec la situation internationale seront assez longtemps dissimulés par la politique de non-intervention des puissances occidentales.

De même, la mort de Lorca, fusillé à Grenade un mois plus tard, pourra figurer comme une déplorable erreur, ou le résultat d’antagonismes politiques concernant uniquement les Espagnols, sans rapport avec son rôle et sa qualité de poète. Certains iront jusqu’à l’attribuer à des mésententes d’ordre privé voire à un " règlement de comptes entre homosexuels ". En zone républicaine comme chez les amis étrangers de Lorca, écrivains ou artistes, on met longtemps à y croire. Aucun ne semble voir ou admettre que l’arrêt de cette œuvre, cette vie brisée, ce meurtre légal n’ont rien d’étonnant ; qu’il s’agit d’un naufrage parmi des milliers d’autres ; événement collectif où Lorca s’est trouvé pris — et non pas seulement mêlé — par son origine, son histoire personnelle, sa lutte intime et son " métier " d’artiste, enfin par une claire prise de position, politique, assurément, mais aussi poétique.

La légende, à son tour, a pu s'y tromper. Les récitals, les poèmes apocryphes, les éditions pirates ou clandestines pendant la guerre d’Espagne et la Deuxième Guerre mondiale, ont popularisé l’image d'un jeune poète plein de fraîcheur, de fantaisie, de passion, détruit soudain par son antithèse d’ombre : la Garde Civile. Ses pièces de théâtre déjà célèbres, telle Mariana Pineda, et ses drames inspirés par la vie paysanne andalouse, ont été perçus d’abord sous l’angle d’une passion habillée de folklore, ou recréée de toutes pièces par l’imagination lyrique d’un esthète de talent. La mort même de Lorca est apparue à l’étranger dans le climat émotif de la mort d’Apollinaire, à travers le symbole du poète blessé ou du " poète assassiné ", confondu quelquefois, par brusque métamorphose, avec celui du poète militant, voire soldat. Il faut en chercher la première raison dans le ralliement massif des écrivains de sa génération à la cause républicaine, et la seconde dans l’optique du milieu lui aussi " engagé " qui, le premier, répandra en France, en Europe, en Amérique, sa réputation et ses œuvres.

Aujourd’hui, de plus en plus, la légende s’estompe avec l’histoire qui l’avait engendrée, et les déguisements politiques tombent, avec l’intérêt qu’ils cachaient. L’œuvre et le souvenir de Lorca sont désormais soumis à deux courants, jusqu’ici contraires. Le premier les pousse vers le lac paisible des études universitaires et des éditions classiques ; le second les entraîne vers l’oubli et la dissolution dans un patrimoine commun où se perdent noms, visages et titres, avec une partie des vertus singulières qui ont fait d’abord la grandeur de Lorca. On ne sait plus s’il est mort ou vivant, quand ni comment il a disparu. On cite ses vers sans le savoir. On le confond avec ses œuvres…

Lorca aura à peine vécu ce que les Espagnols, la situant à leur tour par rapport à la Deuxième Guerre mondiale, ont appelé " notre " guerre. Il en est mort. On pouvait le comprendre, même avant la série des patientes recherches qui ont mené " à Grenade, sur les pas de Lorca ", historiens, critiques littéraires et lecteurs passionnés. L’enquête rigoureuse de Ian Gibson suffit à écarter les derniers doutes, sinon à éclaircir tous les détails ; elle clôt la discussion sur les principaux mobiles et les responsabilités officielles de la fusillade qui a tué le poète. Cette exécution sommaire se situe, il l’a prouvé, dans le contexte général de la répression nationaliste à Grenade ; Lorca, en effet, n’a été " qu’une victime parmi des milliers d’autres ". Lui aussi a été détruit, ainsi que le dit Ian Gibson, par une certaine " mentalité traditionaliste espagnole ", au sens statique, politiquement réactionnaire du mot tradition. Ce que l’on comprend moins, c’est comment il a vu, vécu, dit et appelé, à sa manière, l’aventure collective où il devait disparaître. Il n’y a eu de sa part ni prémonition ni intelligence exceptionnelle du devenir historique. Mais, en revanche, regard sans préjugés, vision large et chaleureuse des événements et des hommes de son temps, responsabilité assumée parce qu’elle coïncidait avec l’élan du poète vers ce qu’il aimait.

Quelle idée se fait-il donc de la guerre ? Quelle relation entretient-elle pour lui avec la révolution (passées contemporaine ou espérée) ? Quelle est cette révolution, dont le symbole apparaît dans son œuvre et donc dans sa vie ? Répondre à ces questions. c’est marquer d’avance sa place parmi les grands poètes espagnols contemporains, ceux qui vivront la " guerre d’Espagne ". Le symbole des poètes : répression et révolution.

La valeur d’un répertoire des mots pour l’exploration d’une œuvre littéraire dépend de l’usage qu’on en fait. Un mot unique peut aller à l’essentiel. L’image rare mais puissante des portes correspond, chez Lorca, à une attitude générale face à l’inconnu, comme au plus précieux et au plus inaccessible de la vie individuelle et collective. Elle évolue en même temps que sa position par rapport à deux phénomènes majeurs de l'histoire de son temps : guerre et révolution.

Son signe : négatif. Les portes de la mort, les portes du mystère, les portes du théâtre, celles de l’hospice ou de la prison ne seront jamais, pour Lorca, des seuils de liberté : mais des obstacles à écarter, renverser ou briser par effraction : des barrières et non des issues, des instruments de dissimulation, de séparation, de répression sourde. Objets artificiels, agents de tous les interdits. L’ouverture, la découverte, l’accomplissement. quels qu’ils soient, ne passent pas par elles ; Lorca les vit plutôt sous les espèces du jaillissement ou de la germination, de l’épanouissement ou de l’union amoureuse, de l’étendue infiniment libre et dépouillée des plages, du ciel et de la mer, où vie et mort viennent se confondre et s’apaiser.

Les portes, les murs, les lieux clos abondent dans son premier livre. Impressions et paysages, né d’excursions archéologiques à travers la Castille ou l’Andalousie, et de ses découvertes dans Grenade. " Portes muettes et basses ", " portes closes ou pleines d’ombre " ; portes qui s’ouvrent et se referment a avec un doux grincement sur le jardin d’une chartreuse ; portes de village et portails où se tient, de chair ou de pierre, une figure étrange et douloureuse ; portes symboliques du livre énorme qui se referme sur la passion d'un moine musicien ; portes ouvertes sur le vide de la campagne ou des ruines à quoi elles ont survécu ; portes mélancoliques de jardins abandonnés. Porte, enfin, de cet hospice galicien où le jeune homme va avec ses compagnons pour des raisons sans doute archéologiques : mais il ne voit que les enfants abandonnés, " l’enfance rachitique et douloureuse qu’elle garde ".

Cette porte énorme et basse qui s’ouvre en grinçant avec fracas, pleine de rage, et " résonne lentement, en se fermant, comme si elle pleurait ", ressemble aux portes de la mort. D’interminables processions de spectres humains l’ont franchie. En imagination, Lorca a vu passer, sous son arc, la théorie des êtres promis à la destruction qu’il évoquera plus d’une fois, et d’abord, en 1918, dans Cigarra (Livre de Poèmes) :

Tous les vivants qui s’engagent

sous les porches de la Mort

avancent, la tête basse,

l’air absent et endormi.

Mais la porte de l’hospice circonscrit, alourdit une injustice sociale que Lorca, à dix-huit ans, ressent déjà comme intolérable. " Il faut qu’elle sache sa mission et qu’elle veuille mourir de peine pour être ainsi vermoulue, sale, disjointe. Un jour, prenant pitié de ces enfants affamés et de ces graves injustices sociales, peut-être s’écroulera-t-elle avec force sur quelque commission de bienfaisance municipale où pullulent les brigands en habit pour en faire une de ces belles omelettes dont l’Espagne a tant besoin. " A cette réclusion répondent, à l’autre bout de l’œuvre de Lorca, les portes et les fenêtres condamnées par un deuil opportun dans La maison de Bernarda Alba ; et celle qui couvre la dernière retraite de sa plus jeune fille, Adela : elle ne s’ouvrira plus, forcée avec rage, que sur un corps sans vie.

D’autres portes effrayantes gardent d’autres mystères. Celle, par exemple, de la tour symbolique du " bois des cédrats de lune ", gardée par deux crânes ailés : elle lui livre en tombant, comme par magie, l’univers difficile de l’aventure amoureuse. Dans une pièce dont le thème et nombre d’éléments essentiels remontent au plus tard à 1923, Lorsque cinq ans seront passés, une autre porte secrète s’ouvre et se referme. au milieu du premier acte. Une main en sort, entrainant vers le néant définitif, l’enfant déjà mort et muet d’effroi. Cette pièce a été composée, en bonne partie, aux environs de 1930 et notamment dans la période new-yorkaise. De même, sans doute, les scènes connues du Public et celles qui dorment encore dans les archives de Rafael Martinez Nadal. Dans l’enceinte fermée du " théâtre dans le théâtre " où se déroule ce drame, " la révolution a éclaté ", une révolution qui dépasse de beaucoup les limites d’un bouleversement artistique. L’explosion s’est produite et " le tumulte a commencé " quand le public a découvert le mensonge dans la représentation même, et, sous les déguisements, la vérité de l’amour interdit ou du non-amour vécu par les acteurs lorsqu’il a pu voir l’effet bien réel de cet artifice : " comment le poison des fausses veines avait causé la mort véritable de beaucoup d’enfants ". Et cela, parce que le metteur en scène a ouvert les trappes. Il aurait voulu l’éviter, mais " les chevaux et la révolution ont démoli ses plans ". Quant aux portes jalousement closes du théâtre, pour les uns c’est le peuple, pour les autres " le feu " qui en aura raison : " aurore de liberté ? incendie mortel ? "

Dans la même période, d’autres portes ont apparu et disparu : ainsi dans l’une des Deux grandes odes où culmine, en son ordre actuel, le Poète à New York, Cri vers Rome. Sur le brouillon que j’ai pu consulter, le titre primitif était Rome. L’un des feuillets porte, au dos, un autre titre : Ode à l’injustice. Elle commence par une série de dénonciations : malédiction universelle qui retombera sur l’Homme en blanc ; plaintes de l’amour absent, en ce monde où des moribonds vivent de préparer la mort, forgent " les chaînes des enfants à venir ", et s’offrent aux balles en gémissant ; refus dû aux amours qui glace les lèvres pontificales tandis que la misère, la cruauté naïve et le malheur abritent l’amour banni. Avant la remontée de cette ode, qui va appeler la révolte et la libération des cités et des foules captives " du pétrole et de la musique ", on lit trois vers, biffés plus tard :

Compagnons du monde entier,

Hommes de chair, de violon et de songes

l’heure est venue de briser les portes.

La porte déjà symbolique des jeunes années de Lorca s’est élargie aux dimensions d’un monde apparemment nouveau, mais lui aussi froid, hypocrite et sans pitié. Dès avant la "Grande Guerre", Dona Rosita en fait foi, les premiers effets des " Temps Modernes " avaient atteint la bourgeoisie de province. Depuis Ganivet et Rubén Dario, les voyageurs de langue hispanique se faisaient l’écho de la déshumanisation de la société " manchestérienne " ou " yankee ". L’écran avait fait connaître aux foules espagnoles l’image des métropoles américaines, la fièvre impitoyable de la ruée vers l’or, la solitude des hommes — noirs ou blancs — dans un monde mécanique. Charlie Chaplin, Buster Keaton, habitaient, avant ce voyage, le monde sentimental et la pensée de Lorca, comme en témoigne expressément son œuvre des années 1920. Mais si New York ne lui a pas révélé l’Amérique, il l’a découverte, au moment du crack de Wall Street, dans une confusion redoublée : panique, chômage, suicides, luttes féroces et solitudes aggravées.

" Compagnons du monde entier, l’heure est venue de briser les portes " est-ce le souvenir d’autres appels similaires, mais plus célèbres qui a fait supprimer ces trois vers ? Lorca a lu et laissé lire Cri vers Rome dans les périodes les plus chaudes de la République espagnole. Il a vu, au village de Fuenteovejuna, une foule prête à lyncher le Commandeur de Lope de Vega, identifié aux oppresseurs du jour, n’a pu craindre de lancer sans le vouloir un appel direct à l’émeute, mais aussi d’être étiqueté et enfermé dans un casier partisan qu’il refusait. Cependant, le symbole des portes qu’on brise reste en lui. Plus encore : il devient image pure, sans intermédiaire intellectuel, et en ce sens, proche à nouveau de la réalité. " Frapper aux portes du théâtre ", c’est ce qu’il a fait lui-même, dans l’espoir d’y communiquer avec les autres hommes. C’est ce que font les foules, se pressant pour monter au pouvoir sur les scènes du monde, d’où on les repousse de plus en plus brutalement au fur et à mesure que se lèvent les fascismes européens, puis le nazisme. Ici, révolution et guerre se rejoignent.

Une œuvre inédite, et, peut-être inachevée de Lorca se déroule, comme Le Public, dans un théâtre. L’auteur y parle en personne, et cette fois ce n’est plus au nom de la fiction, mais de la réalité immédiate, et presque de l’action directe. C’est pour inviter les spectateurs à sortir, et à regarder la ville. La réalité commence, car l’auteur ne veut pas que vous vous sentiez au théâtre mais au milieu de la rue. Mais déjà on apprend que la révolution éclate, au dedans comme au dehors ; la répression l’accompagne aussitôt. Le peuple voudrait trouver, derrière les portes du théâtre hermétiquement closes, la place et la parole qui lui sont dues ; son salut, plutôt qu’un refuge ; à coup sûr, une force nouvelle. Nul ne viendra le lui ouvrir.
Réalité et symbole de la guerre. Guerre et révolution.
Mais cette œuvre brûle les doigts de Lorca, et l’imminence d’un bouleversement mondial, il le dit, paralyse sa plume. Nul besoin d’être en Espagne, au cœur d’un des foyers les plus critiques de l’actualité internationale : partout en Europe, aux Etats-Unis, en Extrême-Orient même, les hommes des villes peuvent sentir l’approche inexorable de ce qu’on appellera bientôt, précisément, la conflagration mondiale. De sa naissance à sa mort, Lorca l’a trouvée présente, confuse mais de plus en plus menaçante.

Pour lui, chemin faisant, elle a changé de signe, comme ces aéroplanes dont le vrombissement emplit la dernière scène qu’on vient d’évoquer. L’avion de son adolescence était une réalité joyeuse, une conquête de l’homme toute prête pour les envolées lyriques et les feux d’artifice des futuristes et des créationnistes. Ses hélices peuplaient de rondes multicolores les tableaux de Delaunay, réfugié à Madrid et ami de ces derniers. Son vrombissement, prêt à envahir la tristesse des vieilles villes castillanes, se confondait dans Impressions et paysages avec la marée victorieuse de la jeunesse : " La jeunesse est venue, elle viendra encore, et au-dessus des croix rougeâtres nous verrons s’élever un aéroplane triomphant. " Lorsqu’il évoque — en 1935 — une période légèrement antérieure, l’avant-guerre où déjà se fane dona Rosita, le progrès mécanique et l’aéroplane reparaissent. Ils accompagnent le vieillissement de son jardin, toujours accueillant et tendre d’un contrepoint qui cette fois menace et trouble la sérénité d’un monde infiniment précieux dans sa fragilité, et malgré son irrémédiable frustration.
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