La ville contemporaine fait-elle encore société ? Plus que jamais, les villes sont







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tion. Les mouvements modernes et ses caractéristiques progressistes avaient
l’avantage de la clarté (même dans l’erreur) et sont aujourd’hui facilement
critiquables. La notion individualiste des propositions contemporaines
génère une tendance sans lisibilité universelle. Évaluer pour intervenir est
fondamental afin de construire une culture commune, et ouvrir le champ
«L’universalité, des nouveaux urbanismes à une nouvelle cohérence.
c’est le local
sans les murs.» Culture commune. Les urbanistes-architectes qui font du
Manuel Torga
projet urbain produisent de l’expérience démocratique. La présence sur le

terrain est une responsabilité civique. Fonder une culture commune relative

à chaque spécificité de projet, construit une culture partagée des questions

urbaines. Formalisée par 5 critères non exhaustifs, elle peut se décliner

ainsi : 1.– le sens commun qui est le bien commun — faire la synthèse

des contradictions pour dégager un consensus local contre le pluralisme

ordinaire; 2.– le dialogue urbain — faire valoir des critères essentiels pour

faire partager d’autres expériences urbaines et instaurer la raison critique

du projet urbain; 3.– anticiper et prévoir le devenir de la ville — développer

une fonction de l’évidence, de la pertinence et du pérenne pour

situer l’intervalle des possibles; 4.– exiger un sentiment d’universalité —

lutter contre la dictature médiatique et s’opposer au politiquement correct

dans le but de confondre la médiocrité; 5.– constituer un savoir-faire et des

savoirs faire-faire — dire ce qui doit être dit en fonction d’une compétence

définie dans l’ordre de la culture du projet. Construire une culture partagée

n’est pas une morale mais une philosophie de l’action constituée des acquis

et des faits concrets. La culture commune, c’est la précision partagée qui

20 La ville qui s’invente
«De nos jours,

même ces nouveaux

urbanismes peuvent

devenir des

anachronismes.

Peu d’architectes

veulent parler de la ville.

Dans un temps où

la culture des objets

est ascendante,

quel architecte voudrait

être un urbaniste?»

Winy Maas
caractérise la culture de relation. La clarté, c’est la valeur de la modestie.

Cette modestie in fine, c’est une construction de la notion d’égalité car

c’est le dialogue qui la fonde dans l’effort de rendre clair ce qui n’avait pas

de clarté. Les urbanistes-architectes sont par nature contre la stigmatisation

de l’ancien et l’angélisme du nouveau. Une culture commune, c’est une

culture de la stratégie et du programme: éléments essentiels d’une vision

partagée de la ville qui s’invente.
Stratégies urbaines et programmes architecturaux

irréductibles. Pourtant, même Rem Koolhaas admet que l’Europe des

villes existantes est conduite par trois conditions: 1.– l’assomption de la

permanence européenne; 2.– la réalité qu’elle a en substance: un continent

d’histoire; 3.– l’impossibilité d’un nouveau commencement. Si

un commencement est une origine, cette constatation serait que la ville

contemporaine européenne est une cristallisation et une histoire inachevée.

Comment penser «l’évolution des villes» si la ville-réseau domine; ne faudrait-

il pas rappeler que l’espace public prime sur le réseau des voies pour

construire un paysage nouveau et reconquérir les paysages existants ? Le

réseau doit tendre vers un espace maillé construit avec la géographie des villes:

une grille sur mesure, adaptée, déformable et modifiable. Pour réussir

le renouvellement urbain du paysage d’une ville, il faut des stratégies et des

programmes fondés sur l’épaisseur des pratiques, des espaces traversés, des

espaces équipés et intégrer la biodiversité d’un territoire.
Le renouvellement urbain, Pierre Riboulet le définissait en 7

points programmatiques 17: 1.– désenclaver pour rendre traversant les quartiers

et tenter d’en faire la ville ordinaire, «la ville-passante» telle que la

définit David Mangin ; 2.– donner à chaque immeuble des adresses sur rue

et effacer l’idée de « cité » isolée ; 3.– renouveler, c’est apporter des valeurs

d’usage, des valeurs habituellement présentes dans un habitat haut de

gamme ; 4.– réinventer le jeu entre unité-diversité, alchimie tant appréciée
la ville qui s’invente 21
dans les villes nées de la sédimentation historique ; 5.– dialoguer avec maîtres

d’ouvrage, partenaires et notamment avec les habitants sans jamais

renoncer ; 6.– être militant pour achever un travail responsable ; 7.– développer

une capacité d’innovation toujours renouvelée. Cette modestie paradoxale

est celle de la conviction, une philosophie du raisonnable « contre

l’idolâtrie de l’événement personnel» (Jankelevitch); une contingence: «le

rapport aux choses, le rapport au site, appellent une architecture de circonstance,

une architecture opportune: une architecture de circonstances

urbaines lorsque tel est le cas, une architecture topographique lorsque tel

peut être le cas.» Yves Lion 18
Il faut compléter parce que Gérard Thurnauer avait engagé

d’utopie à Val-de-Reuil dans les années soixante-dix et qui n’a pas été poursuivi:

1.– orienter le paysage de la ville vers son site naturel. Le projet de

renouvellement urbain serait de construire les conditions d’un redéveloppement

urbain qui s’organise vers la vallée de l’Eure, et non pas de viabiliser

des terres situées hors de ce paysage ; 2.– reprendre le principe de réoccuper

les rez-de-chaussée sur rue par des commerces. Si les villes sont des systèmes

accumulatifs de stratifications, la politique de la ville est sans doute

le dernier combat actuel tangible. Une politique municipale est la seule à

pouvoir s’appliquer pour faire suite à la ville du xxe siècle et trouver l’âme

urbaine: face à l’hyper consommation énergétique d’un pavillon et oser

l’habiter, il faut être «exceptionnel» et avoir une vie parfaite, voir être un

héros; par contre on n’a pas besoin d’être exceptionnel pour habiter la ville:

avec un café à côté, et des commerces au rez-de-chaussée… Travailler dans

de multiples dimensions, créer des scénarios de mise en relation, découvrir

des échappées visuelles, fabriquer un dedans et un dehors, faire coexister

des assemblages, enchaîner les vues, faire exister les grandes mesures, les

grandes profondeurs, intervenir en continuité, gérer les dialogues, créer des

fronts d’urbanité ou des seuils et un paysage en élaborant des silhouet


22 La ville qui s’invente
tes ou « skyline », constituer un système d’échanges, organiser les vis-à-vis,
imaginer la mesure d’un grand ciel, donner de l’espace et faire des lieux,
relier les tissus anciens et récents…: bâtir une ville, c’est prendre en compte
tout ce qui est en attente, en créant le lien entre tous ces éléments ; projeter
la contemporanéité avec l’idée du temps. Architecture et urbanisme s’inter

pénètrent en une démarche indissociable: «On ne peut réfléchir à la fenêtre
sans penser à la ville» dit François Leclerc. 19
«La démocratie, La ville intégrale
c’est l’égalité
des conditions.» Projeter et construire le «grand paysage», les seuils, les inclu-
Alexis de Tocqueville
sions, les lieux… c’est cela, construire le projet urbain. Construire une
interdépendance de ces stratégies pour une coexistence de la ville, c’est
proposer des modes de vie. Malgré la discrimination sociale existante, la
densification de la ville contemporaine et le paysage peuvent conjuguer
dispersion et concentration, points stables et échelles territoriales et rendre
interdépendant les fragmentations actuelles. Une architecture du paysage
peut se construire si l’on intercepte la figure avec le fond. Bernardo Secchi
nous dit que «La figure, c’est le fond. Le support et la surface portent le
même territoire; le projet de nos villes est une description du territoire
entre une Europe diffuse et une Europe solide. La porosité qui s’est ouverte
dans la ville européenne au xxe siècle pose la question des bords c’est-à

dire de ses seuils ou de ses marches. » 20 Contre la peur du vide irrationnel
et l’obsession française de le remplir, la notion évolutive des tissus et des
territoires est un concept de l’espace ouvert, mesuré. C’est un domaine
territorial qui contient aussi bien la ville ancienne que tous les paysages
isotropes constitués par la présence de toutes les dispersions.
Quelles seront les prochaines frontières de la ville sinon à l’inté

rieur de ses propres paysages? La grille américaine Jeffersonnienne de 1780
comme celle de Cerda de 1859 sont toujours en action et ne sont pas vécus
la ville qui s’invente 23
comme le quadrillage des départements français nés des Lumières. Ces villes

ont toujours eu une vocation territoriale, extensible en termes urbains

et non plus ruraux: elles assurent l’unification géographique. La ville qui

s’invente aurait-elle oubliée le maillage étoilé de Braudel pour rendre lisible

ses paysages dans un rapport dialectique simple: la rationalité, comme
«règle qui corrige l’émotion» (Braque). La ville contemporaine a rejoint au

xxe siècle cette grande dimension qu’elle avait elle-même contribué à instituer

mais en créant des lignes de partage historiques et sociales, les stratifications

horizontales de l’histoire des villes. La ville qui s’invente doit avoir

un esprit pionnier et une pensée complexe capable d’affronter la nébuleuse

urbaine. Elle se conçoit comme une réconciliation, en prenant appui sur

ses territoires. Au-delà des deux dimensions de la ville contemporaine et

dans la mesure où une échelle identifiable sera définie et acceptée, alors,

de nouveau, dans une tradition structurée, la ville garantira la continuité

de son devenir urbain. De la ville-surface du xviiie siècle à la ville-réseau

du xxe, la ville en devenir est une ville en trois dimensions: horizontale et

verticale avec son histoire sociale et économique et son territoire anthropogéographique.

C’est la « ville intégrale », une ville dont la stratégie et le programme

fondent une nouvelle démocratie, celle de l’égalité des conditions

urbaines.
notes
1.– Éric Julien, Kogis, le message des derniers hommes. 11.– Sergio Crotti, Soglia , Unicopli, Milano.

2.– Entretien avec Bernard Reichen, in Signes des temps, 12.– Paul Ricoeur, Histoire et vérité.

fondation Bmw.

13.– Manfredo Tafuri, Projet et Utopie, de l’avant-garde

3.– Catherine Fourest, «La braderie des hlm

» à la métropole.

in Le Monde du 29 février 2008. 14-20.– Bernardo Secchi, Première leçon d’urbanisme.

4.– Jean Nouvel, « Il faut que la ville devienne 15.– Daniel Delaveau, Le Plu de Rennes,

un enjeu» in Créer la ville, paroles d’architectes. actes du colloque 2004.

5.– Jane Jacobs, Life and death of great american cities. 16.– Jean-Yves Chapuis, Le Plu de Rennes,

6.– Rem Koolhaas, « Bigness, ou le problème actes du colloque 2004.

de la grande taille» in Mutations. 17.– Ariella Masboungi, «Le génie tranquille

7.– Entretien avec Alan Colquhoun, in Criticat n° 1. de Pierre Riboulet » in Régénérer les grands ensembles.

8.– Kenneth Frampton, Megaform as urban landscape. 18.– Yves Lion, Architecture et modestie, ed. Théétète.

9 à 13.– Olivier Mongin, La Condition urbaine. 19 François Leclercq, conférence du 15 janvier 2008

10.– Hannah Arendt, La Condition de l’homme moderne. à l’école d’architecture de Paris-Belleville.


24 La ville qui s’invente
La Courrouze, un lieu de diversité
Bernardo Secchi
architecte-urbaniste,

professeur à l’école

d’architecture de Venise

et Paola Viganò

architecte-urbaniste,

Milan.
1. Le projet

de la Courrouze

naît d’un marché

de définition (2003)

gagné par l’équipe

guidée par Bernardo

Secchi et Paola Viganò

avec Charles Dard

et Gec ingénierie.

Les recherches

concernant

la biodiversité

ont été développées

par Pierre Bazin

(Aubépine).

Tout projet architectural a son histoire. Une histoire faite d’échéances et de

rendus, mais aussi une histoire intime, faite d’émotions, de suggestions et

d’idées qui nous ont traversé l’esprit pendant nos visites sur le site et que nous

avons choisie de retenir et, petit à petit, de développer. Ce qui est présenté ici

est le résultat de plusieurs mois et années, rythmés par les visites sur place, les

consultations de nombreux documents et études, les colloques informels et

les entretiens avec la maîtrise d’ouvrage, les services des deux villes de Rennes

et de Saint-Jacques-de-la-Lande et le groupe de pilotage1 .
Tout projet revêt forcément un caractère éminemment descriptif

et démonstratif. Il est toujours une exploration de l’archéologie des sites et une

sélection difficile: repérer les éléments fondateurs d’un lieu, choisir la manière

de les représenter, arrêter un programme pour la conduite d’opérations relevant

de différentes échelles d’intervention dans l’espace et le temps, repérer les facteurs

qui peuvent les déclencher et, enfin, choisir un «vocabulaire urbain» qui

les exprime concrètement. Un projet est toujours une hypothèse lancée vers le

futur et, comme toute hypothèse, il doit à la fois anticiper et orienter l’avenir.
Une zone longtemps interdite et secrète
À l’approche de la Courrouze en arrivant de la Prévalaye, en

longeant les allées cavalières ou en venant du centre ville, en franchissant le

chemin de fer pour arriver jusqu’aux marges de Cleunay, ou bien encore, en

venant de Bréquigny, lorsqu’on pénètre sur le site et qu’on le découvre, c’est

la diversité des lieux qui apparaît comme le thème dominant. À la marge de

la ville, entre les terres peu fertiles de la Lande et de la Maltière, la zone militaire

de la Courrouze a été jusqu’à des temps très récents une zone interdite
La Courrouze, un lieu de diversité 25
et secrète. Entr’ouverte, elle est devenue petit à petit un terrain de découverte

pour les habitants des quartiers voisins qui la considèrent déjà comme leur

parc. Nous avons beaucoup marché dans la zone et dans ses alentours pour

s’imprégner de leurs atmosphères respectives. La visite de la Courrouze est

rapidement devenue pour nous une dérive à travers la variété des paysages et

des lieux. Topographie, topologie et pratiques sociales sont à la fois l’origine

et la conséquence manifeste de cette diversité des lieux.
Notre projet part de ce constat. Il reconnaît implicitement que
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